• Le Grand d’Échiquier d’Asie Centrale_partie 5

    par Saïd Ahmiri

     

    Inde et Pakistan ou l’histoire de deux frères ennemis

    Avant de définitivement quitter le nord du Pakistan pour aborder le Balouchistan, il convient de faire le point sur la situation du Cachemire qui monopolisent une grande part des relations indo-pakistanaises. C’est dans le contexte géopolitique extrémement tendu et passablement stabilisé au Cachemire que certains des mouvements pakistanais ont longtemps bénéficié du soutien d’Islamabad et même de l’appui de ses puissants services secrets, l’ISI. Le gouvernement pakistanais étant lui-même opposé à la présence indienne dans la région disputée du Cachemire, à l’origine de deux des trois guerres (1947-1948, 1965, 1971) entre les deux pays voisins possédant chacun l’arme nucléaire. Un autre vieux conflit eurasien généré lors de la Partition des Indes, le partage de la gigantesque colonie de l’Inde britannique, au moment de l’indépendance, les 14 et 15 août 1947, après des mois de violences aussi impitoyables que sanguinaires faisant plus d’un million de morts [27]. La Partition des Indes a donné lieu à deux nations indépendantes : l’Inde et les deux entités du Pakistan, le Pakistan occidental (l’actuel Pakistan) et le Pakistan oriental (l’actuel Bangladesh) distants de plus de 1.500 kilomètres de part et d’autre l’Inde. La frontière a été tracée par l’avocat Cyril Radcliffe et négocié par le dernier vice-roi de l’Inde britannique, l’illustre Louis Mountbatten, suivant les considérations religieuses – hindou, musulman et sikh – exigées par le fondateur du Pakistan, Muhammad Ali Jinnah, le leader indien du parti politique de la Ligue musulmane. 

     

    le Cachemire

    Source de la carte : Cachemire : quelques repères (Philippe Rekacewicz)

     

    La libération du Bangladesh

    En 1970 et 1971, pendant la Guerre Froide, l’Inde est une nation alliée de l’URSS et les relations avec les Etats-Unis sont au plus bas. De son côté, le Pakistan servait d’intermédiaire aux Américains pour se rapprocher de la Chine. Le gouvernement central du Pakistan était essentiellement composé de Penjabis, les Bengalis du Pakistan oriental n’étaient pratiquement pas représentés. Le redoutable cyclone de Bhola qui a dévasté le Pakistan oriental et la province indienne du Bengale occidental, les 12 et 13 novembre 1970, a fait officiellement entre 224.000 et 300.000 morts, officieusement plus de 500.000. Bhola est considéré comme le cyclone le plus meurtrier de tous les temps dans l’histoire des catastrophes naturelles avec le séisme de Tangshan en 1976 et le tsunami de l’Océan Indien en décembre 2004. Les secours du gouvernement central ont tardé à intervenir, le Pakistan occidental refusa l’aide de l’Inde, et par conséquent cela à peser lourd lors des élections législatives du 

    Yahya Khan

    21 mars 1971. La Ligue Awami ayant obtenu la majorité au Parlement (160 sièges sur 162) s’est vue interdite d’entrer en fonction par le président et ancien général en chef de l’armée pakistanaise, Yahya Khan, qui fit arrêter le leader politique bengali, Mujibur Rahman, dans la nuit du 25 mars 1971. Au lendemain, Ziaur Rahman, un officier rebelle de l’armée pakistanaise orientale déclarait l’indépendance du Bangladesh au nom de Mujibur Rahman. Appuyée par les forces armées du Pakistan oriental, l’opération Searchlight est lancée par le Pakistan occidental en guise de répression sévère contre les Bengalis. L’élite dirigeante de la Ligue Awami s’exila à Calcutta et 10 millions de personnes ont fui vers l’Inde. Les combats durèrent 9 mois et ont fait entre 500.000 et 3 000.000 de décès de civils bengalis. En d’autres termes, un nettoyage ethnique ou une Shoah bengalie qui ne dérangeait pas du tout la Maison Blanche qui ferma les yeux sur ce côté sombre du conflit. C’est grossier à dire, et sans doute choquant, mais le dictateur Pol Pot du Cambodge, leader des Khmers Rouges bénis par la CIA, fait figure d’amateur comparé à Yahya Khan. Le plus choquant, d’après moi, réside surtout dans les implications occidentales, tant anglo-saxonne que française, soutenant tous ces monstrueux régimes autoritaires, dans la plupart des cas pour s’accaparer leurs ressources énergétiques, mais c’est un autre sujet de la longue descente aux enfers de tout le continent asiatique. 

    Indira Gandhi

    En avril 1971, la Première ministre de l’Inde, Indira Gandhi, décide d’aider les séparatistes bengalis à libérer le Pakistan oriental du joug des Penjabis d’Islamabad. New Delhi commence dès lors à accumuler ses forces armées le long de la frontière de la Cachemire et attend l’hiver afin d’éviter le soutien de la Chine au Pakistan occidental. L’aviation pakistanaise répond à la menace cachemirie en attaquant les camps de réfugiés suspects de Bahini de Mukti situés sur le territoire indien à l’ouest du Pakistan oriental. Pendant les mois sanglants de la violente guerre civile entre les deux entités pakistanaises, les Etats-Unis du président Nixon et/ou du sécretaire d’Etat Henry Kissinger soutiennent le Pakistan occidental en craignant que l’Inde finisse par annexer le Cachemire et devienne un poids lourd dans la région passant sous contrôle soviétique. Le 3 décembre 1971, des avions pakistanais bombardent plusieurs bases militaires indiennes dans le nord de l’Inde, et le 4 décembre à minuit, New Delhi entre officiellement en guerre contre le Pakistan occidental. C’est le début de la Troisième Guerre indo-pakistanaise ou guerre de libération du Bangladesh. L’Inde lance une invasion massive du Pakistan oriental mettant en déroute les forces armées pakistanaises. Islamabad est sous pression, le Pakistan occidental, déjà menacé au nord par les forces armées indiennes amassées le long du Cachemire, voit son port de Karachi placé sous le blocus de l’Indian Navy. L’armée de terre indienne sous le commandement du lieutenant général Jagjit Singh Aurora remporte une victoire décisive le 16 décembre en capturant 90.000 soldats pakistanais. Pour refroidir les ardeurs de l’Inde, Washington envoie le porte-avions américain USS Enterprise tremper dans les eaux du Golfe du Bengale dans le but d’intimider l’Inde et littéralement l’obliger à conclure un cessez-le-feu. 

    Au bout de 13 jours de combats intenses, la perte entre 10.000 et 30.000 soldats dans les deux camps et plus de 93.000 prisonniers de guerre, l’armée pakistanaise finit par capituler. Islamabad a perdu le Pakistan oriental. Le président pakistanais Yahya Khan démissionne le 20 décembre 1971. Zulficar Ali Bhutto, père de Benazir Bhutto, lui succède et fait libérer Mujibur Rahman, le 22 décembre 1971, devenant le premier Premier ministre de la République populaire du Bangladesh. Le 2 juillet 1972, l’Inde et le Pakistan s’assoient à la table et signent le Pacte de Simla, consentant à respecter la Ligne de Contrôle imposée en 1949 par l’ONU entre le Jammu-et-Cachemire indien et l’Azad Kashmir pakistanais, jusqu’à ce que la question soit définitivement résolue. 

    Le conflit de Kargil

    Le conflit de Kargil s’est déroulée du 9 mai au 26 juillet 1999. Il s’est disputé sur des hauteurs himalayennes à plus de 5.000 mètres d’altitude et souvent à des températures inférieures à 0° d’où son surnom de « guerre des glaciers ». Appuyés par les hélicoptères de l’aviation pakistanaise et équipés par les services secrets du Pakistan en mitrailleuses moyennes, des mortiers lourds, des missiles Stinger pour se protéger de l’aviation indienne et des petites armes sophistiqués afin de se battre avec les mobiles de neige, des centaines d’éléments issus des 40 camps concentrés à Gultari, Faranshat, Shaqma, Olthingthang, Marol et Kharmang, dans l’Azad Kashmir, se sont infiltrés dans le secteur de Batalik de l’autre côté de la Ligne de Contrôle. Leur objectif était de prendre le contrôle de la route stratégique reliant les villes indiennes de Srinagar, la plus grande ville du Jammu-et-Cachemire située à l’ouest, à Leh du district de Ladakh, situé plus à l’est et surnommé le Petit Tibet, une autre région disputée entre l’Inde et la Chine qui revendique aussi une partie du Cachemire. Kargil se situe entre les deux villes, légèrement au nord de la route Srinagar-Leh. Des patrouilles de l’armée indienne du Jammu-et-Cachemire ont découvert les éléments infiltrés, le 8 mai 1999, et la tension entre les deux pays a très vite grimpé. Le 31 mai, le Premier ministre de l’Inde, Atal Behari Vajpayee, disait qu’il y avait une « situation de guerre » à Kargil. Le 6 juin, les forces armées indiennes lancaient l’opération Vijay, une offensive massive dans les secteurs de Kargil et Drass. Elle était accompagnée de frappes aériennes. L’objectif de la stratégie de reconquête était de garder la route cruciale Srinagar-Leh libre de toute menace pakistanaise. Trois jours plus tard, l’armée indienne prennait le sommet de Tololing en parvennant à chasser les combattants pakistanais vers Batalik. La Chine demeurant neutre, le 4 juillet, le président américain Bill Clinton réclamait aux combattants pakistanais de se retirer du Jammu-et-Cachemire. Le 10 juillet, Kargil est libéré par l’armée indienne. Le lendemain, Vajpanee visitait la ville et ordonna le retrait de tous les éléments infiltrés pour le 16 juillet. Le 12 juillet, le Premier ministre du Pakistan, Nawaz Sharif, annonçait le retrait à la télévision et proposait des entretiens avec Vajpayee. Malgré quelques combats de basse intensité, les combattants pakistanais commencèrent à se replier vers l’Azad Kashmir. Le 14 juillet, Vajpanee déclarait l’opération Vijay comme un succès. Le 26 juillet marque à présent la date d’anniversaire de la victoire indienne, « Kargil Vijay Diwas » ou « Fête de la victoire de Kargil ». Nul besoin d’être un véritable expert en géopolitique pour comprendre que l’attaque pakistanaise était tout sauf une nouvelle tentative d’Islamabad pour s’emparer du Jammu-et-Cachemire. 

    La soif de pouvoir du « Muhadjir »

    le Premier ministre déchu Nawaz Sharif

    La défaite du conflit de Kargil qui s’est accompagné du désaveu de ses principaux alliés, américain et chinois, ainsi que les accusations de corruption qui pesèrent sur Nawaz Sharif déclenchèrent un coup d’État militaire, le 12 octobre 1999. L’armée renversa le gouvernement civil du Nawaz Sharif, sans effusion de sang, et plaça le général limogé par Nawaz, Pervez Musharraf, à son poste jusqu’au 23 novembre 2002. Dès la veille du coup d’État, le conflit de Kargil avait pris une tournure de complot orchestré par l’ISI contre son propre gouvernement. Entre temps, le 20 juin 2001, Pervez Musharraf a été élu à la tête de l’État faisant donc de lui, simultanément le chef d’état-major des armées, le Premier ministre et le Président de la République islamique du Pakistan. Ce qu’il convient d’appeler un dictateur. Après le référendum de novembre 2002 où il parvint à obtenir 97,5% des suffrages, ce qui lui permit de prolonger son mandat présidentiel de cinq ans, Pervez Musharraf abandonna la fonction de Premier ministre. Pour éviter de comparaître devant les juges et répondre des accusations de corruption, Nawaz Sharif s’exila du Pakistan et s’envola pour l’Arabie Saoudite. Devenu l’un des plus importants alliés de Washington dans sa guerre contre le terrorisme, Pervez Musharraf fit interdire cinq organisations religieuses, surveiller les mosquées et les madrassas, mit 2.000 islamistes en prison dont Sufi Mohammed et livra 450 membres présumés d’Al-Qaïda aux Américains qui soupçonnaient la pieuvre ISI de soutenir le réseau des Taliban afghans et pakistanais dans leurs opérations visant la coalition ISAF en Afghanistan. Le choix de cette coopération lui valu une progressive perte de confiance de la population pakistanaise. Pour le Talibanistan, le natif de Delhi fut considéré comme un ennemi de l’Islam. En décembre 2003, il échappa à deux attentats perpétrés par des hommes soupçonnés d’appartenir à Al-Qaïda. En dépit de quelques avancées démocratiques, notamment pour les femmes, en mars 2007, le juge Iftikhar Muhammad Chaudhry, président de la Cour suprême, que Musharraf accusa d’abus de pouvoir, fut suspendu de ses fonctions, ce qui provoqua de nombreuses manifestations dans les villes pakistanaises à majorité anti-Musharraf. Le juge Chaudhry fut rétabli à son poste quelques mois plus tard mais de violentes émeutes éclatèrent à partir de mai 2007 entre sunnites et chiites et entre partisans et adversaires du dictateur. Réélu le 6 octobre 2007 à la présidence du Pakistan avec 252 voix sur 257 malgré sa grande impopularité, Pervez Musharraf abandonna son poste de chef d’état-major des armées. C’est le général Ashfaq Kiyani, 55 ans, qui lui succéda avec, bien sûr, la bénédiction de celui-ci, dont il est, depuis plusieurs années, l’homme de confiance. 

    le dictateur Pervez Musharraf

    Il autorisa Nawaz Sharif à rentrer au pays et signa également un décret d’amnistie qui marqua l’abandon des poursuites pour corruption à l’encontre de l’ex-Première ministre Benazir Bhutto après huit années d’exil. Après les éléctions législatives, au début de l’année 2008, qui marquèrent le triomphe du parti de Bhutto assassinée, le PPP (fondé par Zulficar Ali Bhutto), et de la Ligue musulmane (PML-N) de Nawaz Sharif, Yousouf Raza Gilani, candidat du PPP qui était soutenu par le veuf Asif Ali Zardari, fut élu Premier ministre et s’engagea aussitôt dans une épreuve de force avec Pervez Musharraf. La nouvelle coalition qui s’est emparée du pouvoir fit accuser le dictateur de violations graves de la Constitution. La coalition lança une motion de destitution à son encontre, en août 2008, en lui reprochant notamment d’avoir volontairement évincé des magistrats qui s’apprêtaient à statuer sur sa réélection contestée en octobre 2007 et d’avoir instauré des mesures impopulaires durant l’état d’urgence en novembre 2007 sans oublier l’animosité personnelle que lui vouait Nawaz Sharif. « Nous avons de bonnes nouvelles pour la démocratie », lançait Asif Ali Zardari au cours d’une conférence de presse. Le 18 du même mois, Pervez Musharraf, âgé de 65 ans, se décida finalement à démissionner, pour éviter d’être destitué, après avoir dirigé le Pakistan pendant neuf longues années. « Après avoir considéré la situation et consulté divers conseillers en droit et alliés politiques, sur leurs conseils, j’ai décidé de démissionner », déclarait-t-il lors de son dernier discours télévisé à la nation en remettant son avenir de Muhadjir (immigré) entre les mains du peuple. Ayant quitté la scène politique, le 23 novembre 2008, muni d’un visa ordinaire et accompagné de son épouse, Pervez Musharraf à la retraite arriva à Londres à bord d’un vol régulier en provenance d’Islamabad et fut accueilli, sans strass et paillettes, par un simple chargé d’affaires de l’ambassade. Après une visite au domicile d’un vieil ami, l’ex-général Niaz Ahmed, Pervez Musharraf prononça une conférence à l’université de Cambridge avant de s’envoler pour une tournée en Europe et aux États-Unis. D’après des officiels de l’actuel président, Asif Ali Zardari, l’ex-protégé de Bush junior aurait acquis une demeure dans le comté de Buckinghamshire, au nord de Londres, et aurait l’intention de s’installer définitivement au Royaume-Uni. 

    Comme chien et chat

    Dans une dernière rixe diplomatique, survenue en octobre 2003, Faisal Saleh Hayat, le ministre pakistanais de l’Intérieur, a accusé l’Inde d’avoir ouvert six camps d’entraînement terroristes en Afghanistan qui se situeraient à proximité des consulats indiens de Djalâlâbâd et d’Hérat. « RAW (les services secrets indiens) fournit les fonds et procure les faux papiers pakistanais et la fausse monnaie aux recrues qui sont ensuite envoyées au Pakistan après avoir été entraînées à mener des attaques », a-t-il précisé. Des camps d’entrainement pour mener des tentatives de déstabilisation sur son sol, ou pour porter atteinte aux intérêts pakistanais en Afghanistan. Ainsi, les autorités pakistanaises ont déclaré que la « main de l’Inde » a téléguidé l’attentat contre la mosquée chiite de Quetta, dans la province du Balouchistan, le 4 juillet 2003 faisant 53 morts, ou le saccage de l’ambassade du Pakistan à Kaboul dans les jours qui suivèrent. Le 15 octobre 2003, un séminaire était organisé par le parti pakistanais pro-pachtoune Pakhtun Quami et réunissait de nombreuses personnalités pachtounes, tant pakistanaises qu’afghanes pour débattre de « L’influence néfaste de la ligne Durand sur le peuple pachtoune » accentuant les prémices de déstabilisation du Pakistan. 

    Les attentats de Bombay

    les lieux des attentats de Bombay

    Du mercredi 26 au samedi 29 novembre 2008, à Bombay, l’Inde a vécu son « 11 septembre », l’épisode terroriste le plus terrible de son histoire dont le bilan s’est élevé à 174 morts parmi lesquels neuf des dix assaillants, une trentaine d’Occidentaux et plus de 300 blessés. Véritable opération techno-commando, tant dans la préparation ingénieuse que l’exécution implacable qui a paralysé toute la stratégie usuelle du contre-terrorisme de plusieurs milliers de policiers et militaires indiens, les 10 kamikazes pakistanais, d’une moyenne d’âge de 20 ans, ont notamment utilisé selon Charles Bwele pour Alliance Géostratégique : 

    • des mobiles GPS pour l’orientation et des téléphones satellittaires pour la coordination opérationnelle lors du trajet maritime entre le Pakistan et l’Inde,
    • des PDA Blackberry et la VoiP (voix par Internet) pour la communication tactique,
    • Google Earth pour la géolocalisation tridimensionnelle des sites ciblés : les docks de Mazagaon, les hôtels de luxe Oberoi-Trident et Taj Mahal, le terminus ferroviaire Chhatrapati Shivaji, la station de métro Vile Pale, le restaurant touristique Léopold Café, l’hôpital Cama, le siège juif du Mouvement Loubavitch Nariman House et le siège de la police de Bombay
    • des plate-formes Web 2.0 pour l’analyse en temps réel de la couverture (e-)médiatique des attentats et le suivi permanent de la réaction policière et militaire.

    Alors que l’Inde et le Pakistan s’orientaient vers un processus de paix pour le Cachemire depuis 2003, est-ce que les attentats de Bombay étaient réellement de l’oeuvre des séparatistes du Lashkar-e-Toiba, que tout semble accuser y compris les aveux du kamikaze capturé Azam Kasav Amir, ou du groupuscule inconnu baptisé Moudjahidins du Deccan, défendant la cause des musulmans indiens opprimés, qui a revendiqué les attaques ? Quoiqu’il en soit, dans le cadre de la guerre globale contre le terrorisme, les attentats de Bombay n’ont fait que fortifier la volonté hégémonique américaine de frapper fort les mouvements islamistes du nord du Pakistan, au grand dam de la Chine. Du moins, c’était encore le cas jusqu’à ce mois de janvier 2010 comme nous le verrons plus loin. Toutefois, le partenariat nucléaire entre Washington et New Delhi a oté au Pakistan toute illusion d’une véritable amitié américaine malgré l’alliance qui lui a été imposée. Ce partenariat a poussé le Pakistan à nouer plus fort encore ses vieux liens avec l’autre ennemi de l’Inde, et le principal des États-Unis, la Chine.


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  • Le Grand d’Échiquier d’Asie Centrale_partie 4

    2008, le début du chaos

    le Bouddha de Jihan Abad

    Police humiliée, armes volées, écoles brûlées, instituteurs assassinés, statues bouddhistes taillées dans le roc détruites, dont le Bouddha de Jihan Abad datant du VIIe siècle appartenant au patrimoine mondial de l’UNESCO, non pas en hommage à leurs frères d’armes afghans qui ont dynamité les deux géants Bouddhas de Bâmiyân en 2001 mais par application stricte de la Charia, le nouveau traité de paix précaire conclu entre les Taliban du maulana Fazlullah et le régime de Musharraf vole en éclats. Tandis que la traque d’Oussama Ben Laden, d’Ayman al-Zawahiri et du mollah Mohammad Omar se poursuit, encore et toujours, le Waziristan retourne sur les sentiers de la guerre et le Pakistan plongé dans un chaos évident ne se déstabilise plus, il glisse à présent et pratiquement de manière inévitable sur la pente de la multiple fragmentation territoriale : Pachtounistan, Balouchistan et qui sait, tôt ou tard le Cachemire certainement. 

    Les Taliban du district de Khyber des régions tribales du FATA commençaient à faire peser une grave menace sur la ville de Peshawar, après la prise de contrôle des villes voisines dont Darra Adam Khel, Michini, Warsak, Shabqadar, Tangi, Charsadda pour ne citer qu’elles. « Nous sommes virtuellement assiégés par ces militants », s’inquiètait un responsable de la sécurité. « S’ils ne sont pas arrêtés, ils prendront Peshawar ! », estimait-il. Depuis la vallée de Tirah, le Taleb Hâdji Namdar, 39 ans, leader du Mouvement pour la Promotion de la Vertu et la Répression du Vice, est soupçonnée de lancer des attaques contre les forces étrangères déployées en Afghanistan. L’autre figure locale de la talibanisation du district de Khyber est Menghal Bagh, ancien chauffeur de bus dont les hommes sont accusés d’avoir lancé des attaques dans Peshawar même et d’avoir tendu des embuscades à de nombreux convois de camions chargés de ravitailler les forces étrangères présentes sur le sol afghan. Craignant la prise de la capitale provinciale Peshawar et pour ralentir la progression des Taliban, les autorités pakistanaises lancèrent, le samedi 28 juin 2008, une opération militaire dans le district de Khyber, à la frontière de l’Afghanistan, pour tenter d’enrayer la talibanisation de toute la région qui menace de se propager jusqu’à Peshawar, puis Islamabad. Il s’en suivit l’opération Sherdil (en ourdou « coeur de lion ») dans la zone tribale de Bajaur qui s’est déroulée d’août jusqu’à mi-septembre 2008 face au TTP et ayant causé le déplacement estimé entre 500.000 et 700.000 personnes, y compris 70.000 Afghans. 

    Le changement dans la continuité

    le président Asif Ali Zardari

    Suite à la démission du président Pervez Musharraf, Asif Ali Zardari, un richissime homme d’affaires pakistanais et veuf de l’ex-Première ministre Benazir Bhutto, est devenu le nouveau président de la République le 6 septembre 2008. Une source sûre au Pakistan m’a confié à maintes reprises que le président Zardari était aussi corrompu que ses prédécesseurs. Dès son entrée en fonction, les opérations conjointes américano-pakistanaises et les attaques de drones s’intensifiaient, notamment contre des éléments de la résistance afghane du réseau Haqqani opérant au Nord-Waziristan. Bill Van Auken, pour WSWS, dévoilait le 28 décembre 2009 que « le quotidien The News de Lahore, citant des données fournies par les responsables pakistanais, a rapporté en avril que 687 civils avaient été tués par une soixantaine de frappes de drones menées depuis janvier 2008 ». Il explique ensuite que « pendant les deux dernières années, le gouvernement pakistanais – autant celui du dictateur militaire Pervez Moucharraf que son successeur, le président Asif Ali Zardari du Parti du Peuple du Pakistan – a conçu un modus operandi avec Washington qui consiste pour le Pakistan à protester publiquement les attaques de drones et à demander qu’elles arrêtent, tout en leur donnant le feu vert dans les coulisses. (…) Le New York Times a rapporté qu’il y avait eu « plus de soixante opérations conjointes de l’ISI et de la CIA dans les régions tribales administrées fédérales (FATA) et au Balouchistan l’an passé » [16]. 

    Et qu’en est-il de la question nucléaire ?

    Selon une source citée par Mecanopolis, dans un article intitulé « La menace terroriste contre les armes nucléaires du Pakistan » qui a été publié en juillet 2009 dans un numéro du CTC Sentinel, publié par un institut de recherche basé au Département des sciences sociales de l’US Military Academy, West Point, Shaun Gregory, directeur de l’Unité de recherche sur la sécurité du Pakistan à l’Université de Bradford au Royaume-Uni, a écrit : « Les militants ont récemment attaqué un certain nombre d’installations nucléaires du Pakistan, dont un le 20 août 2008 dans le cantonnement de Wah, largement estimé comme l’une des principaux sites d’assemblage des armes nucléaires du Pakistan. La préoccupation, toutefois, est que la plupart des sites nucléaires du Pakistan sont proches ou même dans les zones dominées par les Taliban pakistanais et Al-Qaïda ». Le directeur Shaun Gregory a déclaré : « Une série d’attaques sur les installations des armes nucléaires a également eu lieu. Celles-ci ont inclus une attaque sur le site de stockage de missiles nucléaires à Sargodha le 1 novembre 2007, une attaque sur la base aérienne nucléaire, à Kamra par un kamikaze aspirant au martyre le 10 décembre 2007, et peut-être la plus importante le 20 août 2008 » [17]. 

     
     
     
     

     

    carte des installations nucléaires pakistanaises

    Les Taliban gardent mais ne meurent pas 

     

     

    L’opération Rah-e-Rast (en ourdou « chemin de la droiture ») ou Seconde bataille de Swat qui a eu lieu entre le 5 mai et le 15 juillet 2009. Le 30 mai, l’armée pakistanaise annonçait être parvenue à reprendre le contrôle de Mingora, la plus grande ville de la vallée de Swat comptant près de 270.000 habitants. L’événement avait fait les gros titres de la presse mondiale. Le 11 juin, l’armée pakistanaise étend son offensive au district de Bannu, frontalier du Waziristan. FATA et NWFP ne forment bientôt plus qu’une seule très vaste zone de guerre. Au lendemain du 11 juin, l’armée pakistanaise annonce le lancement de l’offensive contre Baitullah Mehsud. Courant juin, le gouvernement de Zardari annonce que le fief du TNSM a été bombardé et détruit. La violence de ces derniers combats a déjà provoqué l’exode de plus de deux millions de personnes, le plus grand déplacement depuis la Partition des Indes en 1947, ainsi que la fuite de la quasi-totalité des journalistes régionaux qui travaillent pour Shamal, Salam, Chand, Awaz-e-Swat, Azadi et Khabarkar dans la ville de Mingora. Selon le dernier rapport de Reporters sans frontières paru ce mois-ci, le président du Club de la presse de Swat, Salahuddin Khan, déclarait en mai 2009 à RSF que la vallée vivait « sans aucun média ». Aujourd’hui, il affirme : « Tout le monde constate ce changement. » « Nous nous sentons bien maintenant et nous espérons que la situation continuera à s’améliorer », affirmait Shireen Zada, l’un des derniers journalistes à avoir fui la vallée en mai dernier. La compagnie Ali Cable, installée à Mingora, a rouvert le 20 août 2009, après avoir été contrainte de fermer en novembre 2008, sous la pression des Taliban. « Je suis heureux de pouvoir de nouveau offrir mes services après de si longs mois de fermeture (…) Depuis août, j’ai vendu plus de 4.000 connexions et nous en avons réparé beaucoup d’autres endommagées par les Taliban », explique Umer Ali Baacha, propriétaire d’Ali Cable, à RSF [18]. 

    camp de réfugiés pakistanais Yar Hussain de Swabi

    le camp de réfugiés pakistanais Shah Mansour

    De concert avec l’opération Rah-e-Rast se déroulant dans les zones tribales du NWFP, l’offensive aérienne de l’opération Rah-e-Nijat (en ourdou « chemin de la délivrance ») est lancée le 19 juin 2009 dans le Sud-Waziristan pour combattre les 10.000 à 12.000 combattants du TTP et du Mouvement Islamique d’Ouzbékistan (MIO). Cette nouvelle offensive provoque l’exil de plus de 100.000 habitants de la région. Publié le lundi 22 juin 2009 dans le Washington Post, le président Asif Ali Zardari déclarait qu’avec 1.200 soldats morts, le Pakistan avait payé un plus lourd tribut dans la guerre contre les Taliban que l’ensemble réuni des États de l’OTAN engagés en Afghanistan [19]. 

    Vendetta contre les Mehsud

    l'émir Baitullah Mehsud

    Le TTP a été dirigé, jusqu’au 5 août 2009, par l’émir Baitullah de la tribu Mehsud, l’une des quatre plus influentes familles du Waziristan. Chef de guerre pakistanais et l’un des plus puissants chefs Taliban qu’a connu le Pakistan avec les seigneur Nek Mohammed et commandant Abdoullah Mehsud, Baitullah imposa la Charia dans de nombreux villages de la vallée de Swat. Il était soupçonné par la CIA et le gouvernement pakistanais d’être l’auteur de l’assassinat de Benazir Bhutto commis le 27 décembre 2007 à Rawalpindi mais Baitullah démentit ces accusations. A l’instar de Nek Mohammed, Baitullah Mehsud a été assassiné lors d’une attaque de drone américain contre la maison d’Ikramuddin, son beau-père sorti miraculeusement indemne de l’attaque. Interrogé par les Taliban dans leur bastion de Sararogha avec plusieurs de ses proches dont le fils et le frère de ce dernier, du nom de Saadullah Mehsud, ainsi qu’un neveu, Ikramuddin Mehsud a été exécuté par les chefs du TTP le soupçonnant d’avoir livré des informations aux services de renseignements pakistanais ayant permis l’assassinat de l’émir Baitullah par un missile lancé par un drone Predator de la CIA [20]. 

    Le 28 septembre 2009, Kalimullah Mehsud, l’un des frères de Hakimullah, a été tué au nord-ouest du Waziristan lors d’un accrochage avec les forces de sécurité pakistanaises. Le samedi 10 octobre 2009, neuf hommes armés et vêtus d’uniformes militaires s’étaient présentés, à bord d’un minibus, à l’entrée principale du Grand quartier général (GQG) de l’armée pakistanaise à Rawalpindi, qui abrite l’état-major au complet, au cœur même du dispositif le plus sécurisé du Pakistan avec Islamabad, déjà transformés en camps retranchés avec des check-points de la police et de l’armée. N’ayant pas réussi à déjouer la vigilance des gardes, les assaillants ont ouvert le feu et lancé des grenades. Dans les premiers combats qui ont suivi, un général de brigade, un colonel et quatre militaires ont perdu la vie. L’attaque du GQG s’est poursuive par une prise d’otages de 42 personnes, militaires et civiles employées par l’armée, retenues dans un bâtiment jouxtant le GQG de la plus puissante institution pakistanaise. 4 assaillants sont morts tout au long de la journée du samedi. Quelques secondes avant que les premiers muezzins n’appellent à la prière du matin, le 11 octobre 2009, des commandos pakistanais prennent d’assaut le complexe militaire, libérant les otages et mettant en fuite les agresseurs. L’attaque a causé la mort de 22 personnes, dont 11 militaires pakistanais, 8 assaillants et 3 otages. Le dernier assaillant, blessé, a été capturé quatre heures après le début de l’assaut. Considérée par tous comme une évidente riposte aux opérations militaires, l’audacieuse attaque du GQG, qui a tenu en haleine le monde entier pendant plus de 24 heures, a été attribuée au TTP d’Hakimullah Mehsud ayant promis de venger la mort de son prédécesseur, Baitullah. « Nous avons la capacité de frapper où nous voulons au Pakistan, nous pouvons viser les lieux les plus importants », déclarait à l’AFP, en revendiquant l’attaque du GQG, Azam Tariq, le porte-parole du Mouvement des Taliban du Pakistan. 

    l'opération Rah-e-Nijat

    Cette attaque contre le QG de l’armée pakistanais a lancé l’offensive terrestre de l’opération Rah-e-Nijat (en ourdou « chemin de la délivrance »), le 17 octobre 2009, en mobilisant 28.000 soldats pakistanais et 500 commandos d’élite. Bien que l’armée pakistanaise a assuré, le 19 octobre 2009, avoir pris le contrôle de la localité de Sararogha au nord-est de Wana, un important fief des Taliban, des combats ont continué de s’y dérouler dans les environs. Ainsi, le même jour, une embuscade tendue par les Taliban a fait 7 tués parmi les militaires selon les autorités pakistanaises, les Taliban revendiquaient 36 victimes. De même que dans la ville stratégique de Kotkai, les maisons d’Hakimullah Mehsud, le nouveau chef du TTP depuis le décés de Baitullah, ainsi que celle de son lieutenant Qari Hussain Mehsud ont été détruites. Entre deux absurdes communiqués de presse relayés à travers tout le globe annonçant la mort de 60 terroristes d’Al-Qaïda au cours des dernières 24 heures, le président américain Barack H. Obama a qualifié le Sud-Waziristan d’« endroit le plus dangereux du monde pour les Américains ». 

    Le dimanche 1er novembre 2009, un haut responsable de l’armée pakistanaise a affirmé avoir fait fuir entre 600 et 800 combattants étrangers de la ville de Kanigurram du Sud-Waziristan. Toujours lors de cette visite organisée pour la presse dans cette zone de conflit habituellement inaccessible, le général de brigade Mohammad Ihsan déclarait que des combattants « principalement des Ouzbeks, mais certains sont Tchétchènes ou Arabes », ont été mis en déroute par de lourds bombardements des chasseurs, des hélicoptères et de l’artillerie de l’armée. Depuis le déclenchement de l’offensive aérienne de l’opération Rah-e-Nijat en juin, plus de 120.000 personnes ont fui le Sud-Waziristan, selon l’armée pakistanaise et le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) [21]. « Environ 100 000 personnes ont été déplacées, elles s’installent dans les districts voisins de Tank et Dera Ismail Khan », déclarait le colonel Waseem Shahid. Près de 300.000 autres ont fui le Nord-Waziristan, selon Médecins sans frontières. 

    le commandant Hakimullah Mehsud

    Après six mois passé à la tête du TTP, une armée estimée entre 10.000 et 20.000 combattants ainsi qu’environ 1.500 combattants étrangers présumés liés au MIO, le cousin de Baitullah, Hakimullah Mehsud (né Jamshed Mehsud) alias Zulfiqar longtemps considéré comme l’un des plus dangereux Taliban pakistanais, est décédé suite à ses graves blessures au cou infligées lors d’une énième frappe de drone dans le Sud-Waziristan, le 14 janvier 2010, contre un camp d’entraînement taliban près du village de Sakhtoi. Hakimullah était suspecté d’être le responsable de nombreuses attaques contre les forces de l’OTAN dans les districts de Khyber et de Peshawar à partir de 2008. Des attaques ayant conduit à la destruction de près de 600 véhicules militaires qui ont poussé les généraux de l’OTAN à chercher d’autres voies de réapprovisionnement, notamment par le biais de la Russie. Par ailleurs, Hakimullah était également soupçonné d’être à l’origine de la très violente vague d’attentats-suicides qui a secoué le Pakistan depuis mi-septembre 2009 [22] dont l’audacieuse attaque du GQG de l’armée pakistanaise de Rawalpindi le 10 octobre 2009. Azam Tariq, porte-parole du TTP, a déclaré que son groupe n’avait en aucun cas été impliqué ni dans l’attentat du marché de Peshawar du 28 octobre 2009 qui avait fait plus de 130 morts, ni dans l’attaque de la mosquée de Charssada, une ville située à la frontière de la province pakistanaise du Nord-ouest perpétrée en pleine cérémonie de l’Aïd al-Adha le 21 décembre 2007. Il a demandé « que le monde arabe, en particulier le Pakistan, sache que les Moudjahidins ne posent pas de bombes destinées à tuer des civils. C’est plutôt l’œuvre des sinistres organisations secrètes à la solde de l’État et de Blackwater ». Le porte-parole du Tehreek e-Taliban a justifié certaines explosions « légitimes sur le plan religieux. Les cibles de notre groupe ont toujours été clairement définies : il s’agit des organisations étatiques qui, sur ordre des Américains, s’en prennent à nous et ont sur les mains le sang de nos martyrs. » Dans un entretien accordé à Katrina Husain pour Nouvelles Express, le secrétaire américain à la Défense Robert Gates a bel et bien admis que Blackwater/Xe Services opèrait au Pakistan et en Afghanistan [23]. Une affirmation longtemps démentie par des officiels d’Islamabad et de Washington [24]. Selon les sources du journal Dawn, aujourd’hui c’est Maulvi Noor Jamal qui aurait repris la tête du TTP [25]. 

    Les meurtrières attaques de drones

    Les médias pakistanais rapportaient en décembre 2009 qu’un bombardier américain B-52 avait survolé le village Saidgi, situé à environ six kilomètres de la principale ville du Nord-Waziristan, Miranshah, terrorisant la population locale. Deux missiles lancées par un drone MQ-1 Predator auraient frappé des installations dans ce petit village du Nord-Waziristan, correspondant à la troisième attaque depuis le 17 décembre 2009 et un nouvel échelon dans l’intensification des opérations américaines au Pakistan. Ainsi, selon certaines sources, le nombre d’attaque au moyen de missiles air-sol AGM-114 Hellfire lancées par les drones MQ-1 Predator (transportant 2 missiles Hellfire), MQ-9 Reaper (8 missiles Hellfire ou 2 missiles air-air AIM-92 Stinger et 2 bombes à guidage laser GBU-12 Paveway II) ou MQ-1C Sky Warrior (transportant 4 missiles Hellfire et 2 bombes guidées GBU-44/B Viper Strike) depuis août 2008 est évalué à plus de 70, faisant plus de 600 victimes, principalement civiles. Rien que Baitullah Mehsud aurait été la cible d’une quinzaine de missiles durant l’année 2009, tuant entre 200 et 300 civils, selon le think tank New American Foundation. D’après une brillante analyse des frappes aériennes commises par drones Predator au Pakistan jusque septembre 2009 qui est parue, le 1er octobre 2009, sur le site The Long War Journal [26], il y a eu, de juin 2004 à juillet 2008, 87 frappes aériennes au Pakistan sans compter la première attaque officielle enregistrée le 18 juin 2004 qui assassina Nek Mohammed. 78 de ces frappes ont eu lieu à partir de janvier 2008. 36 attaques pour toute l’année 2008 dont 28 frappes entre août et décembre 2008 et 42 du 1er janvier 2009 au 29 septembre 2009. Sur les 88 frappes aériennes au total, 78 ont eu lieu au Nord-Waziristan (36 attaques) et Sud-Waziristan (42 attaques). Toujours d’après les données de cette analyse, en 2008, ces attaques ont fait 317 victimes, ciblées et civiles. Au 29 septembre 2009, elles étaient de 447. Des chiffres qui se rapprochent de ceux cités par les affirmations de Bill Van Auken.


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    Le Grand d’Échiquier d’Asie Centrale_3

    Les poudrières du Talibanistan

    les provinces NWFP (clair) et FATA (foncé)

    Le chef-lieu de la Province de la Frontière du Nord-Ouest (NWFP) est Peshawar, une ville d’environ 1,4 million d’habitants. C’est dans cette province que se situent les districts de Malakand et de Swat dont Mingora est la principale ville de la vallée de Swat surnommée la Suisse du Pakistan pour ses hautes montagnes, ses forêts vertes et ses lacs aux eaux limpides. En 2005, la population du NWFP était d’environ 21 millions d’habitants sans compter les 3 millions de réfugiés afghans. La plus petite des quatre provinces du Pakistan, à l’ouest de l’Azad Kashmir et au nord-est du FATA (Federally administered tribal areas ou Régions tribales fédéralement administrées), le NWFP se compose de régions tribales pachtounes qui abrite le fief des Taliban et plusieurs mouvements fondamentalistes islamiques tels que le Harakat ul-Mujahidin (Mouvement des compagnons du Prophète), le Tehrik-e-Nifaz-e-Shariat-e-Mohammadi (Mouvement pour la Défense de la Loi du Prophète), le Lashkar-e-Jhangvi (Armée de Jhang) et l’organisation séparatiste cachemirie Lashkar-e-Toiba (Armée des Pieux) qui agissent essentiellement pour certains au Cachemire (divisé entre le Jammu-et-Cachemire indien et l’Azad Kashmir pakistanais) avec comme objectif principal pour les uns, le rattachement au Pakistan de cet État majoritairement musulman qu’ils considèrent occupé par l’Inde et pour les autres, l’application de la Charia (loi islamique) au Pakistan avec l’établissement de tribunaux islamiques. 

    C’est plus au sud-ouest, dans les deux districts du Waziristan au sud du FATA frontalière de l’Afghanistan, que l’on retrouve le TTP, l’acronyme de Tehreek-e-Taliban Pakistan (Mouvement des Taliban du Pakistan) qui aurait été fondé fin 2007 en réunissant une quarantaine de factions. Autant que le Tehreek-e-Nifaz-e-Shariat-e-Mohammadi (TNSM), interdit au Pakistan depuis le 12 janvier 2002 sur ordre du dictateur Pervez Musharaf qui fit emprisonner, sous la pression américaine, son fondateur Sufi Mohammed ayant envoyé des milliers de combattants sur le front afghan, le TTP a fait couler beaucoup d’encre dans la presse de propagande impérialiste, depuis le début du conflit armé en 2004, entre les forces armées pakistanaises et les différents mouvements islamistes, étant tous considérés sans exception, ni sans la moindre distinction, comme des alliés de la nébuleuse internationale Al-Qaïda. Deux mouvements majeurs du Pachtounistan qui défient ouvertement le gouvernement d’Islamabad dont la ligne de conduite est dictée par les États-Unis, de George W. Bush hier et aujourd’hui de Barack H. Obama, pour débusquer les Taliban afghans et les autres Moudjahidins étrangers qui, après la chute de Kaboul en 2001, sont venus au Waziristan en ayant fui à travers les montagnes de Shah Wali Kot en mars 2002, afin de se regrouper et relancer leur guérilla contre les forces d’occupation en Afghanistan.

    Le Talibanistan déterre la hache de guerre

    Dans une chronologie non-exhaustive de la guerre du Waziristan, depuis 2002, tout l’ouest du Pakistan vit pratiquement à l’heure afghane, ou plutôt à l’heure américaine de la guerre contre le terrorisme. Fin février 2002, la presse britannique Sunday Express [6] annonçait déjà que « les forces spéciales américaines et britanniques avaient localisé le chef d’Al-Qaïda, Oussama Ben Laden », et 50 partisans fanatiques, dans une zone montagneuse de la région de Toba Kabar « au nord de la ville de Khanozai et de Quetta » dans le nord-ouest du Pakistan, près de la frontière afghane, justifiant ainsi aux yeux de l’opinion publique occidentale l’entrée de l’OTAN au Pakistan. « Nous nous engageons dans des opérations des deux côtés de la frontière, dans une opération du genre  » marteau et enclume «  », disait le général David Barno lors d’une vidéo-conférence en direct d’Afghanistan avec la presse propagandiste, moins catastrophiste que cacophonique mais tout autant sensationnaliste, spécialement accréditée au Pentagone, la même presse que le tapage médiatique contre les armes de destruction massives de Saddam Hussein et ses liens supposés avec Al-Qaïda, dans les préambules de la guerre d’Irak de 2003. 

     

    les régions pakistanaises sous le contrôle des Taliban

    Au milieu du marteau américain et de l’enclume pakistanaise, la guerre du Waziristan a ainsi éclaté, dans un contexte international en 2002 et national en 2004, avec un jeu du chat et de la souris dans les zones tribales pachtounes du Sud-Waziristan entre les Taliban afghans accompagnés des djihadistes étrangers, bénéficiant de l’appui des Taliban pakistanais, et les Scouts de Wana (unité paramilitaire pakistanaise stationnée à Wana) aidé du soutien des laskhar (milice tribale de la tribu Wazir) chargés de partir à la recherche des militants étrangers et de punir les membres des tribus qui les aidaient en détruisant leurs maisons et en leur imposant de lourdes amendes d’un million de roupies pakistanaises, soit environ 14.500 euros. Ces Taliban pakistanais, de la tribu pathane Mehsud notamment, ont alors été considérés comme des alliés inconditionnels d’Al-Qaïda et, sous les impératifs américains, ont été recherchés par les autorités tribales et fédérales pakistanaises. 

    Suite à la longue opération Blizzard de Montagne aux résultats mitigés, « en deux mois, 1 731 patrouilles, 143 raids et opérations de recherches ont été menées. 22 combattants ennemis ont été tués, de nombreuses caches d’armes ont été découvertes, avec 3 648 roquettes, 3 202 obus de mortiers (…) et des dizaines de milliers de munitions pour armes légères », détaillait le général David Barno, l’opération Tempête de Montagne fut menée, à partir du 7 mars 2004, dans les régions frontalières du Pakistan, avec des actions coordonnées entre l’armée régulière pakistanaise ainsi que des forces paramilitaires et l’armée américaine dont la fameuse Task Force 121, unité d’élite dont les membres, agents sur-entraînés de la CIA et militaires des forces spéciales, sont crédités de la capture du président irakien Saddam Hussein en décembre 2003. Malgré la traque par des milliers de soldats, les milliers de dollars du contribuable américain déversées aux différentes tribus pakistanaises, aux liens aussi étroits que des ruelles parisiennes depuis les années 1980 durant la guerre soviétique en Afghanistan, et les moyens technologiques haut de gamme mis à l’oeuvre, l’effet de tenaille de l’opération Tempête de Montagne n’a eu pour résultat que de déstabiliser un peu plus le Pakistan et de renforcer les rangs du Talibanistan mais aussi du monde musulman en général.

    le seigneur Nek Mohammed

    Face à l’incapacité américaine et la nonchalance pakistanaise, les accords de Shakai sont conclus en mars 2004 entre les tribus et le gouvernement. Après avoir amené des centaines de militants étrangers à Wana en 2002/2003 et infligé une cuisante défaite à l’armée pakistanaise, le célèbre seigneur de la guerre Nek Mohammed, du clan Yargulkhel de l’élite tribale des Wazir qui domine la partie occidentale du district du Sud-Waziristan directement frontalière de l’Afghanistan, et quatre autres leaders locaux également soupçonnés d’avoir apporté de l’aide aux combattants étrangers, sont amnistiés et libérés par Pervez Musharraf sans promettre de ne pas utiliser le sol pakistanais pour mener des attaques en Afghanistan, ni d’aider Islamabad à retrouver et enregistrer les combattants étrangers en leur offrant l’asile au Pakistan. « Il y a toujours des combattants étrangers là-bas. Ils sont Arabes, Tchétchènes, Ouzbeks (…), n’appartiennent pas aux tribus et continuent d’utiliser la région pour accomplir leurs objectifs terroristes », déclarait le général David Barno, commandant des forces américaines et de la coalition en Afghanistan, à la mi-mai 2004. « Il est très important que l’armée pakistanaise poursuive ses opérations, en particulier contre les combattants étrangers, qui à mon sens ne doivent faire l’objet d’aucune conciliation », poursuivait le général américain justifiant de la sorte la continuation des opérations transfrontalières au mépris de la souverainté du peuple pakistanais. Il est bon de noter que c’est également au mois de mai de cette année que le Pakistan a été réadmis au sein du Commonwealth [7], après y avoir été exclu en 1999 suite au renversement du régime de Nawaz Sharif par Pervez Musharraf dans les événements qui ont suivi le conflit de Kargil que nous aborderons plus loin. 

    Le puissant commandant Abdoullah Mehsud

    En juin 2004, après l’assassinat par un drone américain du seigneur de la guerre Nek Mohammed considéré comme un héros par beaucoup d’habitants du Waziristan, Abdoullah Mehsud, de son vrai nom Nour Alam, alors âgé de 30 ans et entré en conflit avec Baitullah Mehsud pour la direction de l’union des mouvements talibans devenue le TTP, devient l’incarnation de la lutte indépendantiste du Pachtounistan contre le régime de Pervez Musharraf dans tout le Waziristan. Le guerrier Abdoullah Mehsud qui avait répondu à l’appel de la guerre sainte lancé par des religieux pakistanais en octobre 2001, avait pris part très tôt au combat en Afghanistan aux côtés des Taliban longtemps après avoir combattu une première fois à leur côtés, en 1996, contre les troupes de l’Alliance du Nord du commandant Massoud. Il perdit une jambe en sautant sur une mine quelques jours après la prise de Kaboul par les Taliban. Lors du siège de Kunduz, du 11 au 23 novembre 2001, qui marqua un tournant décisif dans la guerre d’Afghanistan, Abdoullah Mehsud fut contraint de se rendre au général Abdoul Rachid Dostom de l’Alliance du Nord, le principal leader de la communauté ouzbek en Afghanistan et un des plus célèbres seigneurs de la guerre afghan. Remis par la suite à l’armée américaine, il fut envoyé à la base de Guantanamo où il y passa 25 mois avant d’être libéré et reconduit à Kaboul. 

    le commandant Abdoullah Mehsud

    En octobre 2004, le commandant Abdoullah Mehsud a été accusé de l’enlèvement de deux ingénieurs chinois travaillant à la construction d’un barrage. L’un des otages a été tué, dans des échanges de tirs, au cours d’une opération de sauvetage menée par les troupes d’élite de l’armée pakistanaise. Le mercredi 29 décembre 2004, un responsable politique pachtoune était assassiné. Le lendemain, Asmatôllah Gandapour, le représentant du gouvernement pakistanais dans le district du Sud-Waziristan, et son chauffeur furent blessés par l’explosion d’une bombe sur le bord d’une route du district de Tank, à proximité du camp de réfugiés de Dabara. Gandapour dirigeant des campagnes successives contre les militants étrangers et leurs soutiens locaux était considéré comme un ennemi de l’Islam pour le Talibanistan. La notoriété d’Abdoullah Mehsud s’accroit au fil de ses opérations dans le Sud-Waziristan. Le lundi 7 février 2005, des leaders tribaux du Sud-Waziristan signèrent une amnistie avec le gouvernement pakistanais. Ils recevèrent 540.000 $ à l’exception de Baitullah Mehsud, un Taliban discret prétendu être à la tête d’une dizaine de combattants à peine et réputé piètre négociateur bien qu’il était considéré par le gouvernement afghan comme l’un des lieutenants du mollah Omar, le chef suprême des Taliban tant afghans que pakistanais. Exclu de ces négociations pour son rôle présumé dans le kidnapping des deux chinois, Abdoullah Mehsud continua de consolider son pouvoir dans toute la région en poursuivant sa guerre sainte avec son lieutenant Qari Zainuddin Mehsud. « L’accord de paix entre Baitullah Mehsud et le gouvernement n’affectera pas ma lutte contre les forces de sécurité », déclarait-il à l’hebdomadaire The Friday Times. « Notre mouvement ne perdra pas de sa vigueur si deux ou trois de nos combattants se rallient au gouvernement », poursuivait-il. 

    Au printemps de l’année 2005, Abdoullah Mehsud fut une fois de plus suspecté, par Sherpao, d’être impliqué derrière la vague d’attentats-suicides à travers le Pakistan, que la cacophonie de la presse occidentale citait être prônés par Baitullah et dénoncés par Qari comme étant interdits par l’Islam. L’une des dernières attaques du commandant Mehsud avait justement visé le ministre de l’Intérieur, Aftab Ahmad Khan Sherpao, à son domicile dans le district Charsadda dans la province NWFP. Dans ces circonstances, un mandat d’arrestation contre Abdoullah Mehsud fut alors délivré par le gouvernement pakistanais mais n’a jamais été mis à exécution [8]. C’est le début de la cavale pour l’idéaliste pachtoune et figure montante du Talibanistan. D’après certaines sources peu fiables, depuis sa libération de Guantanamo, le commandant Mehsud se rendait souvent au Balouchistan, au sud-ouest du Pakistan, où il était également soupçonné de participer à la formation des nouveaux mouvements pakistanais qui auraient été fondés par Nek Mohammed en 2002 [9] dont le Joundallah (Soldats de Dieu) qui se fait appeler « Mouvement de Résistance Populaire d’Iran » et le Jaishul al-Qiba al-Jihadi al-Siri al-Alami (Armée Secrète du Djihad International) prétendue consacrer ses efforts dans l’entraînement et l’endoctrinement de la nouvelle génération de djihadistes. Au soir du lundi 23 juillet 2007 et après une traque depuis plus de deux ans, Abdoullah Mehsud est repéré par les services de renseignements dans une maison du district de Zhob, dans la province du Baloutchistan. Encerclé, il opposa une résistance farouche avant de choisir de se donner la mort. « Il s’est fait exploser lundi soir avec une grenade quand les forces de sécurité ont lancé l’assaut », expliquait le porte-parole du ministère de l’Intérieur, le général Javed Cheema. Dénoncé par des proches ou non, le puissant commandant Abdoullah Meshud a préféré la mort à la captivité. Dans ce concours de circonstances, Baitullah Mehsud s’empara du pouvoir dans le Waziristan et devint l’unique leader des factions réunies sous la bannière du Tehreek-e-Taliban Pakistan. 

    Qui dirige qui ?

    Après la relative  » trève  » nationale de 2006 et malgré plusieurs luttes de pouvoir internes très compliquées pour les non-initiés mais permettant au gouvernement pakistanais d’exploiter habilement les différends qui opposent les tribus, les mouvements et les ethnies baloutche, ouzbèke, pachtoune, penjabie et turkmène qui soutiennent ou ne soutiennent pas les militants étrangers comme les Arabes ou les Tchétchènes – je citerai par exemple, la nomination du mollah Nazir à la tête du commandement des Wazir, en dépit de la faiblesse de ses liens tribaux, qui a eu pour conséquence de mécontenter les Yargulkhel, qui a produit un grand nombre de commandants Taliban tel Nek Mohammed, car le mollah Nazir appartient au Kakahel, un autre obscur sous-clan des Zalikhel auquel est également rattaché les Yargulkhel, les Zalikhel contrôlant Wana et constituant la plus importante des neuf sous-tribus qui composent la tribu Wazir [10] -, les combats ont repris dans une nouvelle violente escalade très médiatisée. 

    le général Ashfaq Kayani

    La guerre du Waziristan recommence suite au siège meurtrier de la Mosquée rouge d’Islamabad, en juillet 2007, par le Military Intelligence, agence rivale de l’ISI, sur décision du président Pervez Musharraf. Une sombre affaire assez complexe, très médiatisée comme toujours en Occident dans ses grandes lignes habituelles « Taliban, Ben Laden, Al-Qaïda, attentats terroristes, etc », mais bien peu développée dans ses détails croustillants, je dirais, pour les personnes cataloguées conspirationnistes, en raison de certaines implications gouvernementales. Cette affaire suscita un grand intérêt avec la découverte surprenante, sous la Mosquée rouge, d’un centre de transmission secret aux fils directement reliés au quartier général de l’ISI voisin, appelé Point Zero et se situant dans le quartier du marché d’Aabpara [11] de la capitale pakistanaise. Manipulation politique des uns ou complot islamiste des autres, l’ISI a attisé un peu plus la méfiance de l’ancien général et président Pervez Musharraf. En parallèle à la purge du secteur antiterroriste de l’ISI, un peu plus de deux mois après l’assaut de la Mosquée rouge ayant entraîné la mort de plus d’une centaine de personnes, le 21 septembre 2007, Musharraf fit remplacé le chef de l’ISI, le général Ashfaq Kayani, par le général Nadeem Taj, un proche parent de sa femme jugé plus fiable. Ce dernier étant soupçonné, par les yankees, de collaborer avec les Taliban, depuis le 29 septembre 2008, c’est le lieutenant général Ahmed Shujaa Pasha, précédemment directeur des opérations militaires de l’état-major général dont dépendent l’ISI et le Military Intelligence, qui a repris les rennes de cette agence du renseignement pakistanais [12]. Toujours dans ce jeu de chaises musicales, aprés sa réélection d’octobre 2007, Musharraf abandonna l’uniforme et plaça à la tête du chef d’état-major des armées, le général Ashfaq Kayani qu’il avait limogé quelques semaines plus tôt. 

    le président Pervez Musharraf et le général Ashfaq Kayani

    Un peu comme la CIA, l’ISI est considérée comme un État dans l’État, sous la houlette de l’armée, qui dirige secrètement le Pakistan depuis plus de 60 ans et qui s’est fait mondialement connaître lors de l’opération Cyclone de la CIA pendant la guerre soviétique d’Afghanistan (1979-1989). En novembre 2008, après l’arrivée au pouvoir d’Asif Ali Zardari à la place de Pervez Musharraf, le lieutenant général Ahmed Shujaa Pasha ordonna le démantèlement de la branche politique de l’ISI dont la coopération est jugée vitale pour Londres et Washington dans leur lutte pittoresque de la menace fantômatique d’Al-Qaïda et l’insurrection des Taliban en Afghanistan. En s’aventurant sur ce terrain impénétrable que certaines personnes s’accorderont à cataloguer de conspirationnisme, une autre question à se poser, tout aussi intriguante que l’argent de l’opium afghan, est qui dirige réellement l’armée du Pakistan ? Est-ce Washington ? Londres ? Riyad ? Tel-Aviv ? 

    Depuis cet événement majeur, deux autres violents attentats ont secoués le Pakistan et sont entourés d’un épais voile de mystères malgré leur retentissement dans les médias de masse. Le premier, du 18 octobre 2007 à Karachi, qui a coûté la vie à 139 personnes, au soir même du retour d’exil de l’ex-Première ministre Benazir Bhutto. Et le second, du 27 décembre 2007 à Rawalpindi dans la banlieue sud d’Islamabad, où Bhutto fut assassinée avec 20 autres personnes dans des conditions très controversées. Aurait-elle été tuée suite à un choc à la tête lors de l’explosion de la ceinture d’explosifs du kamikaze ou à cause de ses blessures à la tête causées par une balle tirée, entrée par la nuque et sortie par le cou, par un second kamikaze sur les lieux ? Dans l’optique de la déstabilisation du Pakistan souhaitée par des étrangers non-eurasiens, d’autres sources avancèrent l’hypothèse d’un complot manigancé par un escadron de la mort américain, qui était commandé précédemment par le général McChrystal aujourd’hui à la tête de la coalition ISAF, ayant commis plusieurs centaines d’assassinats politiques dans le monde dont l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri, l’événement qui a déclenché la Révolution du Cèdre. Un escadron de la mort qui était placé sous l’autorité directe du vice-président Dick Cheney pendant l’administration Bush [13]. Selon le quotidien saoudien Al-Watan, l’ancien chef d’état-major de l’armée pakistanaise, le général Mirza Aslam Beik, a aussi accusé la société militaire privée Blackwater/Xe Services de l’assassinat de Bhutto et Hariri sur les ondes de la radio pakistanaise Wakt [14]. N’oublions pas que c’est dans la courte période entre ces deux attentats, que lors d’une interview accordée au journaliste David Frost d’Al-Jazira, le 2 novembre 2007, Bhutto affirma clairement que Oussama Ben Laden était mort tout en citant le nom de son meurtrier, Omar Sheikh, un agent de l’ISI. 

    Au récit de tous ces événements, j’insiste sur le fait qu’il est primordial de bien différencier un attentat visant une personnalité politique pakistanaise, des forces de sécurité que ce soit l’armée ou la police, ou encore une personne défendant des intérêts étrangers, et un attentat commis contre des civils. Dans ce cas-ci, les Taliban pakistanais savent avec pertinence qu’ils n’ont absolument rien à gagner en commettant de telles exactions. Par contre, cette terreur profite à Islamabad, et donc à Washington, pour à la fois discréditer l’idéal des Taliban et justifier leurs opérations militaires dans les zones tribales du Pakistan. Pour le Talibanistan, le soutien du gouvernement corrompu du Pakistan aux Etats-Unis, dans leur guerre contre le terrorisme en Afghanistan contre des Taliban et contre l’Islam, fait du régime pakistanais un ennemi de l’Islam à sévèrement punir. 

    Ainsi Swat-il !

    Suite à ces incidents sanglants, c’est principalement dans les deux districts du Waziristan (FATA), dans les districts de Malakand et de Swat (NWFP) mais aussi dans la région de Peshawar qu’ont eu lieu la majorité des opérations militaires de grande envergure comme l’opération Rah-e-Haq (en ourdou « chemin de la vérité ») ou la Première bataille de Swat, bien qu’il eut aussi des affrontements dans le district de Shangla, qui se déroula du 25 octobre au 8 décembre 2007. L’opération militaire opposa principalement le Frontier Corps (armée des Frontières) au TNSM 

    « le mollah Radio »

     conduit par l’ultra-radical maulana Qazi Fazlullah, dit « mollah Radio » pour avoir dirigé depuis 2006 une radio FM depuis la madrassa familiale et beau-fils de Sufi Mohammed, à la tête de 4.500 sympathisants, dont 2.000 étaient rassemblés au sein d’une organisation armée baptisée Shahin contrôlant 59 villages dans trois des sept vallées du district de Swat selon les autorités [15]. Après les batailles de Matta, Charbagh et Khwazakhela qui ont repoussé les Taliban, les affrontements devenus sporadiques se sont transformés, dans les mois qui suivèrent, en insurrection de faible intensité accompagnée de relatifs cessez-le-feu acceptés par les deux camps. 

    Le 23 avril 2008, le chef Baitullah Mehsud donna l’ordre à tous les militants du TTP de cesser leurs activités armées, alors que le gouvernement s’engageait dans un processus de paix avec les combattants des zones tribales. Après trois mois de captivité, Tarik Azizuddin, l’ambassadeur pakistanais en Afghanistan, kidnappé le 11 février 2008 par un groupe de bandits et cédé au TTP, est libéré le 18 mai 2008 en échange de la libération de 40 Taliban détenus dans les geôles pakistanaises. Dans l’espoir d’enfin ramener la stabilité dans la région de Malakand, Pervez Musharraf fait libérer le maulana Sufi Mohammed après 6 années de détention en échange de ses efforts pour rétablir la paix au Swat. Ce dernier, désigné par Islamabad comme étant un Taleb dit modéré pour plaire aux injonctions de Washington, dirigea les nouvelles négociations de paix entre le TNSM et les autorités du NWFP, qui n’aboutiront à une signature que le 16 février 2009. Le maulana Sufi Mohammed ne manqua pas de qualifier la constitution pakistanaise et le pouvoir judiciaire au grand complet de non-islamique et déclara que toute la démocratie était hérétique. « La démocratie est un système d’infidèles introduite en Asie par les impérialistes britanniques ! » affirmait Sufi. « Si vous ne vous opposez pas au système politique impie, Allah n’acceptera aucune de vos prières » rajoutait le fondateur du TNSM. « Les femmes ne doivent pas être autorisées à quitter leur maison, sauf pour se rendre au pèlerinage de la Mecque ! », proclamait le Taleb modéré. 

    le maulana Sufi Mohammed (à droite)

    Dans leur tentative de paraître bon et généreux, les illusions des politiques et de leur diplomatie quant aux Taliban dits modérés n’ont d’égales que le profesionnalisme des journalistes de la presse alignée. Ainsi, dans un nouvel exercice magistral de la cacophonie des mass médias occidentaux qui aiment plaire à la petite ménagère et au vétéran patriotique, la BBC à l’occasion de la sortie de prison de Sufi Mohammed écrivait : « Nos correspondants disent que la libération de Sufi Mohammed peut affaiblir la position du maulana Fazlullah qui dépend lourdement des supporters de Sufi Mohammed ». C’est à se demander deux choses, premièrement, si ces journalistes comprennent réellement quelque chose à la situation ambigue du Talibanistan, et deuxièmement, sont-ils vraiment des journalistes ou de vulgaires hauts-parleurs censés alimenter le règne de la peur ?


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  • Le Grand d’Échiquier d’Asie Centrale :

                                        partie 1 : la mosaïque afghane

    par Saïd Ahmiri

    Ce n’est un secret pour plus personne, l’Europe n’est plus au centre au globe. Cela fait depuis plusieurs années maintenant que la stratégie globale du nouveau monde multipolaire se joue dans un recoin de l’Eurasie, en Asie Centrale, entre la Chine et les États-Unis. Les politiques, et par corollaire le quatrième pouvoir, martèlent à longueur de journée qu’il est question d’une guerre contre le terrorisme. Mais est-ce vraiment le cas ? Bien sûr que non, ce n’est qu’une guerre de l’énergie. Afin de discerner l’extrême complexité géopolitique d’Afghanistan et du Pakistan, deux pions sur le Grand d’Échiquier, il est impératif de bien connaître le terrain sous divers angles. Balouchistan et Pachtounistan dans le viseur atlantiste, est-ce que la balkanisation est la solution aux problèmes actuels de l’Afghanistan et du Pakistan ou sera-t-elle la source de nouveaux problèmes ? Pour comprendre donc le présent et éventuellement essayer d’anticiper sur le futur malgré le caractère variable des données, des alliances et des partenariats en constante évolution, il est plus que nécessaire d’avoir des notions du passé.

    Qu’est-ce que la ligne Durand ?

    Pendant le Grand Jeu, la rivalité coloniale en Asie au XIXe siècle entre les empires russe et britannique qui a notamment conduit à la création de l’actuel Afghanistan, la ligne Durand est le nom donné à la frontière internationale séparant le territoire afghan du Pakistan. Elle a été établie le 12 novembre 1893 par un accord entre l’émir afghan Abdur Rahman Khan, choisi par les Britanniques pour occuper le trône de Kaboul, et sir Henry Durand-Mortimer, un administrateur colonial de l’Inde britannique. Dans la réalité des faits, ce sont les Britanniques et les Russes qui fixèrent les frontières afghanes sans vraiment s’occuper de l’avis des Afghans. Ce n’est seulement qu’en 1894-1895 que la frontière a été délimitée, Kaboul cédait ainsi une partie de ses zones pachtounes et baloutches à l’influence des Britanniques. Les accords de la ligne Durand ont par la suite été ratifiés par le roi Habiboullah en 1905 et par le roi Amanoullah en 1919. Le 2 juillet 1949, le parlement afghan, proclame l’annulation de tous les accords signés par les précédents gouvernants afghans avec les différents gouvernements coloniaux de l’Inde britannique, et notamment le traité de la ligne Durand. Depuis cette date, l’Afghanistan a constamment protesté contre la ligne Durand en affirmant que la frontière a été tracée aux dépens du peuple pachtoune. De son côté, le Pakistan affirme que la séparation est justifiée par la différence importante entre les tribus pachtounes de chaque côté de la ligne. La division territoriale prévue à l’origine pour un siècle par Durand-Mortimer devait cesser en 1993 mais le Pakistan a refusé de rétrocéder les territoires pachtounes occupés générant ainsi la source d’un autre conflit eurasien entre les deux nations de l’AfPak. 

    Longue de 2450 kilomètres, la ligne Durand s’étend, depuis le sud, de la frontière iranienne, divisant le Baloutchistan, puis le Pashtounistan en deux, jusqu’à la Chine à travers le massif du Pâmir, par le Corridor du Wakhan au nord-est de la Passe de Khyber. Les Pachtouns, qui sont appelés Pathans au Pakistan, des musulmans sunnites hanéfites, partagent la même organisation sociale tribale de chaque côté de la frontière ainsi que la même langue, le pashto, l’une des deux langues officielles avec le dâri (le persan afghan) dans un pays qui compte pas moins d’une centaine de dialectes, trente-deux langues et cinq langues nationales. 

    La mosaïque afghane

    En Afghanistan, les Pachtouns représentent l’ethnie majoritaire avec 15 millions d’habitants. Ce qui constitue plus de 42 % de la population totale du pays, essentiellement situés dans la moitié sud du pays, en arc de cercle, de Kaboul et Djalâlâbâd à Hérat en passant par Kandahar. Il est intéressant de noter que de l’autre côté de la ligne Durand, au Pakistan, les Pathans sont deux fois plus nombreux mais minoritaires, ils représentent près de 30 millions d’habitants sur les 181 millions que compte le pays. Les Pachtouns précédent ainsi les Tadjiks, appartennant à la famille des peuples iraniens, avec 27 % de la population totale afghane et habitant à l’ouest de Hérat ainsi qu’au nord-est de Kaboul. Zarathoustra, le célèbre sage de la Perse antique, désigne dans l’Avesta, l’Asie Centrale comme le berceau des « Aryens » (Airyanem Vaejah), et pour certains il pourrait désigner la région des environs du Tadjikistan. Le mot Taa-jyaan d’où vient le nom de Tadjik, est aussi mentionné dans l’Avesta. Viennent ensuite les Hazaras, avec 10 %, isolés au centre du pays au sud de la chaîne montagneuse du Koh-e Baba, d’origine turco-mongole et de confession chiite duodécimain à l’exception d’un petit groupe à l’ouest de Dochi qui se rattache à l’ismaélisme, un courant minoritaire du chiisme qui ne reconnait pas douze imams (duodécimain) mais sept imams (septimain). Puis enfin les Ouzbeks à hauteur de 9 % et essentiellement basés autour de Mazar-e-Charif, Kunduz et tout au long des frontières avec l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan. Dans cette mosaïque ethnique séparée par des frontières dessinées par des peuples étrangers, il existe également d’autres tribus minoritaires telles les Aïmaks (4 %) qui nomadisent autour de Hérat, les Turkmènes (3 %) tout au nord, les Baloutches (2 %) au sud-ouest et estimés à environ 100.000 habitants (environ 1,15 million vivent en Iran et 6,67 millions au Pakistan), ainsi que les Pashayis, les Kirghizes et les Nouristanis installés dans les magnifiques forêts montagneuses au nord-est de Djalâlâbâd. On peut retirer trois réalités transnationales, du nord au sud, un grand Tadjikistan, un grand Pashtounistan et un grand Balouchistan qui a de tout temps divisé l’Afghanistan. Deux de ces trois réalités sont des cibles potentielles d’une nouvelle balkanisation en micro-états plus facilement malléables par les puissances étrangères. 

    les groupes ethnolinguistiques d'Afghanistan

    C’est durant l’automne 1994 qu’une nouvelle faction rigoriste fait son apparition : les Taliban (pluriel de Taleb signifiant étudiant). Les Taliban sont originaires des 650 madrassas (école théologique islamique) pachtounes situées le long de la ligne Durand, sur le territoire pakistanais, et influencées par la pensée ultra traditionaliste sunnite soufiste déobandie – du nom de la ville Deoband dans l’état Uttar Pradesh du nord de l’Inde – en référence à l’imam iranien Abu Hanifa (699-767), théologien, législateur et fondateur de l’école hanéfite de droit musulman à Koufa, une ville d’Irak située à environ 170 km au sud de Bagdad. 

    Ahmad Shâh Durrani, le premier roi d'Afghanistan

    Scindés en deux confédérations rivales, les Dorrânî d’Hérat et les Ghilzaï de Kandahar, les Pachtouns sont les fondateurs de l’Afghanistan, en 1747, sous le règne du premier padishah Ahmad Shâh Durrani portant le titre de « Bâbâe Melat » qui, en pachto, signifie « père de la Nation ». Ahmad Shâh est le patriarche de la dynastie Durrani, une tribu afghane connue avant 1747 sous le nom des Abdâlî qui règna difficilement sur le royaume d’Afghanistan jusqu’au 1973. Les Pachtouns sont donc les Afghans de souche, le mot afghan est synonyme du mot pachtoune. Les Pachtouns sont organisés en plus de cinquante tribus, elles-mêmes divisées en sous-tribus, clans, et sous-clans. Les chefs des tribus nommés les Khans ont un pouvoir limité. La société afghane refuse toute domination extérieure directe et naturellement toute occupation étrangère physique de son sol. Elle accepte en revanche la domination indirecte, elle ne peut même s’en passer car aucun Khan ne peut s’imposer aux siens s’il n’est pas en mesure de distribuer à sa tribu des bakchish (don charitable) sous forme d’argent, d’armes, de nourriture ou de vêtements. Un chef tribal qui ne peut distribuer ces largesses est remplacé par son rival plus généreux. L’Afghanistan étant un pays pauvre, aucun Khan ne trouve de quoi redistribuer des largesses suffisantes à sa tribu sans subvention extérieure. 

    Toutes ces subdivisions ethniques et ces rivalités claniques expliquent pourquoi les Afghans sont parvenus à constamment tenir en échec tous leurs envahisseurs successifs qui, découragés, se retiraient. Mais la raison essentielle de l’extrême division des Afghans en clans rivaux, à l’intérieur des mêmes ethnies et des mêmes tribus, réside dans le problème de répartition des eaux. Hormis le conflit afghan, une autre guerre oppose les seigneurs tout puissants et riches propriétaires d’une rivière aux vrais maîtres du trafic de drogue qui n’hésitent pas à recourir aux seigneurs de la guerre pour menacer les paysans des oasis et des plaines fertiles. Des seigneurs de la guerre qui deviennent alors des despotes et sont supplantés à leur tour lors de nouvelles prises de contrôle du pouvoir tribal. Un mécanisme ancestral de la société afghane qui a été transplanté dans les secteurs les plus lucratifs de la vie économique d’Afghanistan. Avant l’invasion américaine de 2001, les Taliban étaient parvenus à mettre fin au trafic de drogue et par extension, à toute la corruption gouvernementale qui, aujourd’hui comme hier avant l’arrivée des Taliban, ferme les yeux sur l’immense business de la résine d’opium. La corruption étant littéralement un sport national, ce mécanisme n’est sans doute pas pour déplaire aux multinationales pharmaceutiques depuis le projet de légalisation de l’opium par le Baron Mark Malloch-Brown, un proche de George Soros étant surtout connu pour son financement des ONG générant des révolutions de couleur mais aussi pour être un grand partisan de la dépénalisation de la drogue [1]. 

    les routes d'exportation de l'opium afghan

    L’Afghanistan constitue ainsi un paradoxe assez incroyable car étant un des pays les plus pauvres du monde, qui se situe presque au bas de l’échelle de l’indice de développement humain de l’ONU (174e pays sur 178) et de l’indice de pauvreté humaine [2], il est de loin le plus grand exportateur des drogues illicites au monde, dont la valeur de revente est estimée à 60 milliards de dollars américains [3]. Une question intéressante à se poser est où va tout cet argent ? Plus curieux encore, qui donc en profite ? Cette seule économie ferait décoller l’Afghanistan et l’exploitation de ses minerais stratégiques – charbon, fer, cobalt, chrome, mica, bauxite, zinc, plomb, beryllium, lithium, or, rubis, saphir, émeraude et lapis-lazuli – propulserait l’Afghanistan au rang d’importante puissance exportatrice d’Asie Centrale. Des gisements dont l’étendue des ressources demeure incertaine mais qui attise la convoitise des grands pays industriels que sont les Etats-Unis, le Canada, le Brésil, la Russie, la Chine, l’Inde et le Japon [4].


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  • Etude de la conflictualité africaine

     


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  • Webster Tarpley: la Chine et le dilemme iranien (audio)

    La Chine va de Charybde en Scylla, elle est confrontée à ce choix cornélien : trahir l’Iran et perdre 12 % de son pétrole, ou laisser une crise armée générale dans le Golfe risquer de la priver de 40 % de ses ressources pétrolières.

    Webster Tarpley

    Première partie

    Deuxième partie

    Troisième partie


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  • Iran, ce grand "Satan"...

    par Le Kergoat mercredi 3 septembre 2008

    voir aussi :La communauté juive d'Iran

    Comme dans les films de Disney, l’administration américaine nous a désigné, de son propre chef, sans nous demander notre avis ! les Etats "méchants", aussi par eux appelés "l’Axe du Mal".

    Parmi ces pays - Iran, Birmanie, Zimbabwe, Corée du Nord, Cuba, Biélorussie - dont le seul point commun est l’hostilité aux Etats-Unis des pouvoirs locaux, un attire ici notre attention : l’Iran.

    Pourquoi l’Iran ? Parce que l’Iran, contrairement par exemple à la Corée du Nord, évoque chez nous des peurs irrationnelles, dont celle du choc des civilisations, avec en arrière-plan l’angoisse d’un islam conquérant qui n’est pas la moindre.

    Alors l’Iran est-il vraiment menaçant ? Après le péril jaune du début du XXe siècle, le "péril vert", celui d’un monde conquis par l’islam depuis l’Iran, a-t-il un sens ? Petit tour d’horizon, de la politique internationale du "Grand Satan".

    Le monde vu de l’Iran

    La politique internationale de l’Iran ne se lit pas depuis Washington, Paris ou Londres, elle se lit depuis l’Iran ! Et pour la comprendre, il faut voir le monde comme le voient les Iraniens.

    L’Iran est bordé au sud et à l’ouest par des pays arabes (rappelons évidemment que l’Iran n’est pas un pays arabe !), la Péninsule arabique au Sud, l’Iraq à l’ouest. Inutile de dire que, traditionnellement, les relations de l’Iran avec ces pays sont détestables. L’Arabie saoudite et les Emirats du golfe sont des alliés inconditionnels des Etats-Unis, quant à l’Irak, outre qu’il est occupé aujourd’hui par les Etats-Unis, les Iraniens n’ont pas oublié sa tentative de détruire la Révolution iranienne dans les années 80 !

    A l’ouest, la Turquie. La Turquie est un Etat sunnite - l’Iran est chiite - qui se prétend laïc, pro-américain, et rival historique traditionnel de l’Iran. Tout pour plaire !

    Au nord-est, l’Azerbaïdjan, peut-être le pays le plus dangereux pour l’Iran, parce que les Azeris représentent le quart de la population iranienne et occupent grosso-modo, le quart du sol iranien. Autrement dit, toutes proportions gardées, les Azeris peuvent être demain aux Iraniens ce que les Ukrainiens sont aujourd’hui aux Russes : d’anciens compatriotes nombreux et rumuants. Seul facteur d’apaisement, comme l’Iran, l’Azerbaïdjan est chiite.

    A l’Est, le Pakistan et l’Afghanistan, résolument hostiles à l’Iran.

    Il ne reste à l’Iran que deux voisins qui ne sont pas ses ennemis. Un petit pays au nord... l’Arménie et un autre grand pays au nord également, pas tout à fait voisin, mais presque via le Turkménistan qui est encore son satellite : la Russie.

    Autrement dit, et le tableau est quand même impressionnant, les deux seuls pays de la région avec lesquels l’Iran entretient de bons rapports sont des Etats... chrétiens !

    Avouez que, pour un pays décrit comme "un monstre musulman" qui va tout islamiser sur son passage, constater que les seuls pays avec lesquels il a de bonnes relations sont justement des Etats chrétiens, ça devrait amener à se poser des questions !

    Autre point important, l’Iran est chiite, l’immense majorité du monde musulman et tous les voisins de l’Iran à l’exception d’une partie de l’Irak et de l’Azerbaïdjan sont sunnites ! Ce qui signifie que l’Iran n’a plus de chance d’étendre dans le monde une quelconque Révolution musulmane, que le Vatican n’a de chance de propager le catholicisme intégriste au fin fond de la Russie orthodoxe !

    Quelles ambitions pour l’Iran ?

    Alors dans ce contexte qu’est la réalité internationale autour de l’Iran, quelle stratégie peut avoir ce pays, pour quelles ambitions ?

    La stratégie de l’Iran, clairement affichée par son président, Mahmoud Ahmadinejad, est de devenir une grande puissance régionale. Pour ce faire, l’Iran "met le paquet" non seulement sur le nucléaire, mais aussi sur les technologies spatiales où elle affiche des ambitions qui ne sont pas sans rappeler celle de l’URSS des années 60 !

    Elle étend sa puissance sur certaines parties du monde chiite comme au Liban par le biais de son bras armé, le Hezbollah, qui représente sa capacité à se projeter à l’extérieur de ses frontières. Les Soviétiques avaient les "Mouvements de libération", les Iraniens ont le Hezbollah où le chiisme remplace le communisme et qui est à même de tester cette puissance externe, ce qu’elle a fait avec succès au Liban.

    Raisonnablement, la cible stratégique de l’Iran peut être de devenir un Etat technologiquement moderne et qui domine "sa" civilisation, le monde chiite comme la Chine domine une partie de l’Asie ou la Russie une grande partie du monde orthodoxe.

    On est loin, très loin, du "Grand Satan" décrit par le Département d’Etat et qui, dans les fantasmes de certains, serait prêt à islamiser la planète en 48 heures chrono !


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  • Grèce : le joker venu de l'Est

    par Le Kergoat lundi 15 février 2010

    La crise grecque pourrait créer un précédent. Le départ de la Grèce de l’OTAN, puis de la zone euro, puis de l’Union Européenne.

    Aujourd’hui, la Russie a tout intérêt à sauver la Grèce. La Grèce a tout intérêt à accepter cette aide tombée du Ciel.

    Au delà, se renouera une très ancienne alliance entre deux pays de l’Autre Europe, une Europe Chrétienne Orthoxe séparé de l’Europe de l’Ouest depuis l’année 1054, date de la rupture des deux églises.

     2 avril 2012. Il est 20 heures. Flash spécial, la Grèce vient de quitter l’Union Européenne.

    Pendant une partie de la soirée, les analystes vont se succéder sur les écrans de télévision pour expliquer la décision d’Athènes.

    A Berlin, les Vingt-Six réunis en sommet extraordinaire viennent de publier une déclaration qui se veut rassurante. L’avenir de l’Union est assurée. Paraît-il...

    Demain, le Figaro titrera : « L’Europe orpheline. La Grèce s’en va ».

    En réalité, la décision était attendue depuis plusieurs semaines comme une fatalité après le départ de la Grèce, d’abord de l’OTAN puis de la zone euro.

    Dans quelques jours, la Grèce rejoindra l’OTSC, l’alliance militaire nouée entre Moscou et ses anciens satellites qui lui sont resté fidèles. La popularité du gouvernement d’Athènes atteint des sommets. A Thessalonique, l’homme de la rue se félicite que son pays ait abandonné une alliance avec la Turquie en rejoindre une englobant la Russie et l’Arménie.

    Scénario fiction, certes. Improbable pensez-vous ?

    Certainement pas. Plus que possible, ce scénario est, à mon avis, le plus plausible.

    Revenons au présent.

    Aujourd’hui, la Grèce est au bord de la faillite. Athènes a un problème immédiat : trouver de l’argent !

    Qui peut lui en donner ?

    Le FMI,

    L’Union Européenne,

    Les Etats-Unis,

    La Russie,

    La Chine.

    Le FMI ; Athènes n’en veut pas

    L’Union Européenne ? Peut-être... Mais l’Union est réticente, hésitante. Elle a de bonnes raisons. Après tout, la Grèce a triché pour entrer dans la zone euro. Pendant des années, elle a continué à tricher. La renflouer totalement aujourd’hui serait donner une prime au tricheur, affaiblir la crédibilité de la zone euro et donc de l’Union et renforcer encore le camp des eurosceptiques qui se porte déjà très bien. Alors probablement l’Union ne sera prête à donner que peu d’argent, en échange de beaucoup de sacrifices immédiats... pas de quoi faire sauter au plafond les responsables athéniens.

    Les Etats-Unis ? Pourquoi faire ? La Grèce fait déjà partie de l’OTAN. Enlisés en Afghanistan, en échec en Iraq, les Etats-Unis ont sûrement d’autres priorités que de venir au secours de ce petit état qui, au demeurant est déjà leur allié et donc n’a pas grand chose à offrir en échange d’un plan de secours.

    La Chine ? Trop loin ! Et géographiquement et politiquement. Pékin pourrait renflouer Athènes ; mais la Chine n’a pas aujourd’hui suffisamment d’influence en Grèce pour vraiment tirer un avantage politique réel de ce sauvetage intéressé.

    Reste...la Russie !

    L’Ours Russe a tout intérêt à venir au secours de la Belle Athéna ! Et il en a les moyens.

    Depuis 2006, la Fédération de Russie a remboursé quasiment l’ensemble de sa dette. Elle a de l’argent, elle a les mains libres.

    La dette grecque s’élève à 300 milliards d’euros. En 2008, le budget de la Fédération de Russie affichait 75 milliards d’euros d’excédents. Moscou a les moyens financiers de renflouer Athènes.

    Et il y des précédents, en 2009, la Russie annulé la dette du Kirghizistan en échange d’intérêts politiques. Hors de sa sphère traditionnelle d’influence, les mauvaises langues disent que Moscou a déjà accordé de larges crédits au Venezuela ou même à la lointaine île de Nauru, dans l’Océan Pacifique, en échange d’une bienveillante reconnaissance des ses deux bébés : l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie. Moscou a l’expérience de payer pour des avantages sur la Scène Internationale. La Russie a les moyens politiques de renflouer la Grèce.

    L’Ours Russe a intérêt à aider la Grèce. Parce que depuis l’origine, cette dernière quoique membre d’une organisation hostile à la Russie : l’OTAN, n’a de cesse que de promouvoir le dialogue avec Moscou. Elle se comporte en amie, voir en alliée de la Sainte Russie. Pour mémoire et à titre d’exemple, en 2003, quand les Etats-Unis attaquent l’Iraq, parmi les rares pays de la « Vieille Europe » qui soutinrent le couple franco-allemand contre Washington, il y avait...la Grèce. Ce n’est pas un hasard. Il n’y a pas de hasard sur la scène des Relations Internationales.

    En avançant leurs pions en Grèce, Poutine et Medvev jouent sur du velours.

    La Grèce n’a jamais été à l’aise dans l’OTAN. D’abord à cause de la présence de la Turquie dans cette organisation. Est-il besoin de mettre des liens ? Et aussi parce que, si les Tchèques n’ont pas oublié l’intervention des chars russes en 1968, les Grecs se souviennent du rôle de la CIA dans la sinistre dictature des colonels.

    Comme le Chili et beaucoup de pays d’Amérique du Sud, la Grèce présente pour les Etats-Unis et la Russie, l’image inversée de celle donnée en « l’Europe de l’Est ». Les Etats-Unis n’y sont pas les bienvenus, la Russie, si.

    Que pourront faire les Etats-Unis pour s’opposer à une sortie de la Grèce de l’OTAN ? Bombarder, comme en Iraq ou en Serbie ? Ça n’est guère crédible. Il est probable que les USA resteront sur leur objectif prioritaire : l’Afghanistan et ignorent en le minimisant ce départ de la Grèce.

    Aussi un accord « Renflouement financier contre retrait de l’OTAN » est possible.

    La Russie peut payer, la Russie sait payer pour de telles opérations. Le contexte grec la fait alors progresser en pays ami. Ça lui permettra, à l’avenir de renforcer son avantage, par exemple en faisant adhérer la Grèce à l’OTSC.

    Alors, hors de la zone euro, décrédibilisée en Europe, suspecte de servir les intérêts d’une Russie vue traditionnellement plus comme un ennemi que comme un partenaire du couple Union Européenne-USA ( souvenez-vous de la réaction dudit couple contre la Russie pendant la guerre d’Ossétie ), la Grèce « tombera » hors de l’Union Européenne comme un fruit mûr.

    Dans un contexte de Chocs de Civilisations, quel meilleur aimant, quel meilleur amant, pour la Belle Athéna, que le Nounours Russe !

    Et nous en arrivons au scénario ci-dessus.

    Dans l’immédiat les deux principaux acteurs concernés : le premier ministre grec Papandréou et le tandem Poutine-Medvedev ont tout à gagner à cette alliance.

    Papandréou sort à peu de frais ( immédiat ) la Grèce d’une crise qui paraissait inextricable, il ravit le contribuable grec qui aura moins à payer que prévu et électoralement, ça compte ! Poutine et Medvedev, en étendant la zone d’influence de la Russie de 2010 à une région d’où même l’URSS était absente, rentrent dans l’Histoire en couronnant ainsi le retour de la puissance russe.

    D’ailleurs, tout ce beau monde se rencontre très bientôt. A votre avis, de quoi vont-ils parler ?

    Alors, vous avez encore des doutes ?

    Moi pas.


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  • Les opérations false flag

     

    Les opérations false flag ( sous faux pavillon ou sous fausse bannière ) sont des actions menées par des états avec utilisation des marques de reconnaissance de l’ennemi, dans le cadre d’opérations spéciales.

     
    L’histoire récente est pleine d’exemples d’états qui ont organisé leur propre terrorisme à des fins de manipulation de l’opinion publique...
     
    Dans ce documentaire en trois parties, nous allons voir comment plusieurs états dits "démocratiques" ont organisé leur propre terrorisme au cours du siècle dernier afin de charger et de culpabiliser leurs ennemis aux yeux du peuple et de légitimer des guerres impérialistes.

     

     

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  • Le Turkménistan réserve ses fournitures de gaz à la Chine, la Russie et l’Iran
    La géopolitique des pipelines à un tournant capital
    par M. K. Bhadrakumar *

    Le 6 janvier 2010, l’Iran et le Turkménistan inauguraient le gazoduc Dovletabat-Sarakhs-Khangiran, un projet commun d’une ampleur exceptionnelle. Ce grand pas en avant pourrait véritablement bouleverser la donne dans le « Grand échiquier » pour le contrôle de l’énergie : les États-Unis sont mis hors-jeu par leurs concurrents sans que ces derniers ne provoquent les agressions et les effusions de sang dont les États-uniens s’étaient rendus responsables au cours des seules opérations de sécurisation des routes d’accès. Si l’avenir de l’énergie se trouve non pas dans le pétrole mais dans le gaz, alors le contrôle du Proche-Orient pourrait bien passer par celui du bassin de la mer Caspienne.


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  • Comprendre le Moyen-Orient : Les enjeux internationaux

    Le Moyen-Orient est au centre des enjeux. Première réserve de pétrole et de gaz cet amalgame de royaumes, républiques, états religieux ou sous tutelle est au cœur de l’attention de l’occident. Cet occident en manque d’énergie, soucieux de contrôler le robinet des ressources, a peur de ces pays « instables » à majorité arabe et musulmane.

    Je ne pouvais commencer une série sur le Moyen-Orient sans décrire les intérêts internationaux. Effectivement si l’Europe et les États-Unis ne faisait pas preuve d’ingérence dans la zone, la situation géopolitique serait sans aucun doute toute autre. En effet, chaque événement est orchestré en toile de fond par l’occident, et l’instabilité ou la stabilité, selon les points de vue est entretenue. De même que l’existence ou l’implantation d’une colonie occidentale au milieu des enjeux. Bien sûr il ne faut pas faire d’amalgame entre les enjeux d’hier et ceux d’aujourd’hui, ni entre les acteurs occidentaux d’hier et d’aujourd’hui.

    Depuis la chute de l’Union Soviétique, les États-Unis sont les seuls maitres au Moyen Orient. L’Europe ne joue qu’un second rôle avec quelques acteurs qui s’accrochent au terrain, comme la France. L’intérêt des USA est simple, avoir le contrôle des ressources. Comme l’objectif est simple les moyens d’y parvenir sont donc simples, voire simplistes. Ce pays impérialiste (comme d’autres) ne s’embarrasse pas de la prise en compte de détails tels que la volonté des peuples ou leur liberté. Je ne dis pas qu’ils sont seuls fautifs, au contraires, leurs manières sont suivies par les plupart des acteurs. La finesse de la diplomatie et de la stratégie arabe est ignorée, cette erreur est souvent la cause de bêtises évitables. Lorsque l’on admet que les objectifs occidentaux au Moyen-Orient ne sont jamais la démocratie ou une quelconque protection de liberté, mais toujours les ressources, il est plus facile d’appréhender sans tromperie la géopolitique de la région.

    Ainsi, depuis les années 70 et la preuve par l’OPEP de la capacité des pays arabes à se liguer pour obtenir ce qu’ils veulent, les États-Unis cherchent à diviser. Ainsi, les grandes puissances régionales sont achetées ou diabolisées si elles n’acceptent pas le prix proposé. Tel l’Arabie Saoudite et les émirats riches qui paient le prix de leur soutien aux américains, ou l’Iran qui ne veut pas. L’Égypte quant à elle, anciennement soutenue par les russes tente de garder son indépendance tout en s’accrochant à sa liberté. La situation de la Turquie, pourtant à la frontière de l’Europe, est tout aussi complexe. Les petits états ont été négligés et servent à la division, les américains ont provoqué l’anti-américanisme et les petits états servent de théâtre d’opération.

    Aujourd’hui la politique américaine du chaos au Moyen-Orient est coûteuse, surtout avec l’émergence ou la résurgence de certains « points chauds ». En effet la pression militaire américaine se renforce en Amérique Centrale autour des républiques enfin démocratiques de Chavez et des autres qui osent hausser le ton face à l’impérialisme destructeur du grand voisin. L’enlisement en Afghanistan et les pressions accrues au Pakistan (elles aussi en grande partie à cause de la politique de soutien total au gouvernement par les USA) obligent les troupes à rester en place. Enfin l’Arctique représente le nouveau défi avec ses réserves pétrolières. Par une démonstration de force digne de la guerre froide les États-Unis menace la Russie qui lorgne goulument sur les eaux territoriales de l’Alaska ou du Groenland (Danemark, donc Europe). Tout cela pour dire qu’en temps de difficulté financière les États-Unis paient le prix de leur politique de soutien à l’industrie militaire. Le déficit américain oblige une administration « va-t-en-guerre » à chercher des alternatives. Cependant, la division des pays arabes reste l’objectif, la paix n’est même pas envisagée car les USA ont trop peur d’une fermeture du robinet de l’OPEP. Donc puisque ils n’ont plus l’argent pour financer leurs guerres, les États-Unis se tournent vers leurs vieille alliée, l’Europe. Qui en dédommagement d’une protection efficace depuis le 6 juin 1944 contre les nazis ou les communistes se doit de faire les guerres des USA avec des armes américaines bien sûr.

    Le retour forcé sur le terrain d’une Europe constitutionnellement divisée ne simplifie pas la situation. La France s’atlantise et la Grande Bretagne se fait plus méfiante depuis la seconde guerre d’Irak. Ceux qui en souffrent sont toujours les mêmes, les populations locales.

    Malgré un changement de politique affiché entre l’ancien président Bush et Obama, les moyens d’intervenir des américains restent les même : les services « secrets » avec la CIA et l’armée ; en utilisant au maximum les ressources et les énergies des autres.


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  • Géopolitique du Yémen

       



    Le Yémen couvre l'un des itinéraires pétrolier les plus stratégiques, Bab el-Mandeb


          Début 2009, les pièces d’échec ont commencé à bouger sur l’échiquier du Yémen. Tariq al-Fadhli, un ancien leader du djihad originaire du Sud Yémen, a brisé une alliance de 15 ans avec le gouvernement du Président yéménite, Ali Abdullah Saleh, et a annoncé qu'il se joignait à la large coalition de l'opposition, connue sous le nom de Mouvement du Sud. Al-Fadhli avait été membre du mouvement Moudjahidin en Afghanistan à la fin des années 80. Sa séparation du gouvernement a été signalée dans les médias arabes et yéménites en avril 2009. La rupture d’Al-Fadhli avec la dictature du Yémen a donné une nouvelle énergie au Mouvement du Sud. Il est devenu une figure de proue de l'alliance.


          Le Yémen lui-même est un agglomérat artificiel, créé après la débâcle de l'Union soviétique en 1990, quand, au sud, la République démocratique populaire du Yémen (RDPY) a perdu son principal sponsor étranger. L’unification de l’État du Nord, la République arabe du Yémen, et de l’État du Sud, la RDPY, a donné lieu à un optimisme éphémère qui s'est terminé par une brève guerre civile en 1994, car des factions de l'armée du sud ont organisé une révolte contre le Président Ali Abdullah Saleh de l'Etat du Nord, qu'ils considéraient comme un dirigeant corrompu par le copinage. Le Président Saleh tenait un gouvernement personnel depuis 1978, d'abord comme Président du Nord Yémen (République arabe du Yémen), et depuis 1990 en tant que Président du nouveau Yémen unifié. La révolte armée du sud avait échoué car Saleh avait engagé Al-Fadhli et d’autres Yéménites salafistes, adeptes d'une interprétation conservatrice de l'Islam, et des djihadistes pour combattre les forces autrefois marxistes du Parti socialiste du Sud Yémen.


          Avant 1990, pour tenter de contrôler le Sud communiste (2), Washington et le Royaume Saoudien appuyaient et soutenaient Saleh et sa politique d'islamisation. Depuis lors, Saleh s'est appuyée sur un fort mouvement de djihad salafiste pour conserver son régime égocentrique dictatorial. La rupture d’Al-Fadhli avec Saleh et son ralliement au groupe d'opposition du sud, à ses anciens ennemis socialistes, a marqué une déconvenue majeure pour Saleh.


          Peu de temps après qu’Al-Fadhli ait rejoint la coalition du Mouvement du Sud, le 28 avril 2009, les manifestations se sont intensifiées dans les provinces du Sud Yémen, Lahj, Dalea et Hadramout. Il y a eu des manifestations de dizaines de milliers de militaires et d’employés civils qui réclamaient de meilleurs salaires et avantages sociaux, des manifestations qui se sont déroulées en nombre croissant depuis 2006. Les manifestations d'avril ont donné lieu pour la première fois à l’apparition publique d’Al-Fadhli. Sa venue a permis de transformer l’interminable mouvement du sud socialiste moribond en une plus vaste campagne nationaliste. Elle a aussi galvanisé le Président Saleh, qui a alors appelé à l'aide l'Arabie Saoudite et les autres États du Conseil de coopération du Golfe, en avertissant que la totalité de la Péninsule Arabique subiraient des conséquences.


          Pour compliquer la situation dans ce que certains appellent un État en déliquescence, Saleh a affronté dans le nord une rébellion chiite al-Houthi Zaydi [une ramification chiite, ndt]. Le 11 septembre 2009, dans une interview sur Al-Jazeera TV, Saleh a accusé Moqtada al-Sadr, le leader de l'opposition chiite en Iraq, et aussi l'Iran, de soutenir les rebelles chiites houthistes au Nord Yémen. Au Yémen, Saleh a déclaré : " Nous ne pouvons pas accuser le camp officiel iranien, mais des Iraniens nous contactent en disant qu'ils sont prêts à une médiation. Étant donné qu'ils veulent servir de médiateurs entre le gouvernement yéménite et eux [les Houthistes], cela veut dire que des Iraniens ont des contacts avec eux. Par ailleurs, à Nadjaf en Iraq, Muqtada al-Sadr demande d'être accepté comme médiateur. Cela signifie qu'ils ont un lien. " (3)


          Les autorités yéménites affirment avoir saisi des caches d'armes fabriquées en Iran, alors que les Houthistes affirment s’être emparés d’équipements yéménites, avec des marques saoudiennes, et accusent Sanaa (capitale du Yémen et site de l'ambassade des États-Unis) de se comporter en mandataire saoudien. L'Iran a rejeté les affirmations de découvertes d’armes iraniennes au Nord Yémen et qualifie de sans fondement les dires de soutien aux rebelles. (4)


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  • Le mystère du vol 253 (suite)

     

    AP | 03.01.2010 | 18:54

    Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont fermé leurs ambassades à Sanaa dimanche, invoquant des menaces de la branche locale d'Al-Qaïda au Yémen. Et ce juste après avoir annoncé le renforcement de leur coopération contre le mouvement terroriste ayant revendiqué l'attentat manqué de Noël.

    La lutte contre Al-Qaïda dans la péninsule arabique au Yémen a donc pris un tour nouveau et semble aujourd'hui devenue prioritaire pour Washington. Les Etats-Unis accusent cette "franchise" locale de l'organisation d'Oussama ben Laden d'avoir entraîné et armé le jeune Nigérian ayant tenté, le 25 décembre, de déclencher une explosion à bord du vol 253 de la Northwest Airlines assurant la liaison entre Amsterdam et Detroit.

    "Des éléments indiquent qu'Al-Qaïda projette de perpétrer un attentat contre une cible dans Sanaa, peut-être notre ambassade", a expliqué lors d'une émission télévisée dominicale John Brennan, conseiller de Barack Obama pour la lutte anti-terroriste. La veille, le président des Etats-Unis avait clairement mis en cause la branche d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique dans l'attentat avorté du jour de Noël.

    "Nous n'allons prendre aucun risque", a ajouté John Brennan, sans préciser la durée de fermeture de l'ambassade, qui avait déjà été attaquée à plusieurs reprises, dont deux fois en 2008. Un double attentat à la voiture piégée et un assaut donné par des hommes armés avait fait 19 morts en septembre 2008, sans blesser de diplomates américains ou d'employés. Une opération revendiquée par Al-Qaïda.

    Quelques heures après la décision américaine, le gouvernement britannique annonçait à Londres avoir pris une mesure similaire.

    La Grande-Bretagne entend s'associer aux Etats-Unis pour financer une unité de police anti-terroriste au Yémen et a également décidé d'organiser une réunion internationale, le 28 janvier, pour discuter des moyens de lutter la radicalisation du Yémen.

    "Nous sommes déterminés à détruire Al-Qaïda, que ce soit au Pakistan, en Afghanistan ou au Yémen et nous y parviendrons", a ajouté John Brennan. Tout en excluant cependant qu'il s'agisse de l'ouverture d'un nouveau front.

    Reste que cela y ressemble de plus en plus et en tous cas que les Etats-Unis s'y impliquent: Washington vient d'annoncer le doublement l'aide fournie à Sanaa pour 2009. Et samedi, le général David Petraeus, chef du Central Command et à ce titre gestionnaire des guerres d'Irak et d'Afghanistan, a rencontré le président yéménite Ali Abdullah Saleh pour discuter coordination de la lutte contre Al-Qaïda.

    Sanaa a pour sa part annoncé l'envoi de centaines d'hommes en renforts dans deux provinces à l'est de Sanaa, celles de Marib et Jouf, connues pour héberger de nombreux membres d'Al-Qaïda.

    Washington a aidé le gouvernement yéménite à mener le mois dernier deux attaques visant des bases d'Al-Qaïda, et au cours de l'année écoulée, les Etats-Unis lui ont fourni de plus en plus d'aide en matière de renseignement, surveillance et entraînement. Une coopération qui devrait se renforcer encore avec des drones sans pilote, voire le financement d'hélicoptères et autres matériels. Mais il n'y a officiellement en revanche pas de troupes américaines sur le terrain, ni d'avions de combat.

    Autre point noir de la région ayant des liens avec le Yémen, la Somalie, de l'autre côté du Golfe d'Aden, où le mouvement islamiste Al-Shabab a annoncé sa volonté de venir à la rescousse d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique. Du coup, selon la presse yéménite, les patrouilles côtières ont été renforcées.

    L'implantation d'Al-Qaïda au Yémen, terre d'origine de la famille d'Oussama Ben Laden, semble s'être considérablement renforcée au cours de l'année écoulée, jusqu'à se transformer en véritable bastion.

    Le régime de Sanaa collabore avec Washington contre Al-Qaïda depuis des années et l'attentat de 2000 contre l'USS Cole, dans le port d'Aden, au Sud-Yémen. Mais le groupe terroriste annonçait en janvier 2009 la naissance d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique, née de la fusion entre les branches yéménite et saoudienne du mouvement. Le groupe, dirigé par un Yéménite, Naser Abdel Karim al-Wahishi, ancien proche de Ben Laden, a bénéficié du renfort de deux Saoudiens libérés de Guantanamo: Said al-Shihri, devenu numéro deux, et Ibrahim Suleiman al-Rubaish, considéré comme le conseiller religieux.

    Al-Qaïda a tiré profit de la situation d'un pays où les tribus restent très insoumises au pouvoir central, lequel n'a aucun contrôle sur de vastes régions du Yémen. Le régime de Sanaa est en outre occupé à combattre deux insurrections intérieures, l'une au nord, et l'autre dans le sud du pays toujours rebelle à l'autorité du pouvoir des "nordistes" de Sanaa. Une situation générale de plus en plus chaotique, qui a déjà provoqué l'intervention militaire de l'Arabie saoudite, le voisin du Nord. AP

    voir ici carte du Yemen et son intérêt géostratégique  carte Yemen


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  •  Prendre le contrôle du Moyen-Orient : mode d'emploi

     


    Le réveil des communautés chiites du Proche-Orient depuis trente ans est un événement majeur de la géopolitique de cette région. Nombre d'observateurs et d'officiels, qu'ils soient américains ou irakiens, ne l'ont tout simplement pas vu venir.

    La stratégie iranienne consiste à prendre le pouvoir non pas par les armes -- elle n'en a de toute façon pas les moyens -- mais par la prise des postes économiques et religieux afin d'accéder légalement, par les urnes, aux postes politiques clé. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que c'est terriblement efficace !

    Cette stratégie, déjà appliquée avec succès au Liban, a été d'une redoutable efficacité. Le Hezbollah chiite libanais, construit et téléguidé depuis l'Iran, menace aujourd'hui de devenir majoritaire au Parlement ! Ce qu'il faut craindre aujourd'hui ? La "libanisation" de tout le Proche-Orient. Ni plus, ni moins.

    Comme vous pouvez le voir sur la carte ci-dessus, les chiites sont largement représentés en Irak.

    Avant même la fin de la guerre en Irak, Washington s'inquiétait de la facilité qu'avaient les chiites iraniens à passer la frontière. Ils se faisaient tout simplement passer pour des irakiens et pouvaient ainsi prendre les commandes des bras armés irakiens.

    Certains occupaient des postes dans les milices de sécurité des quartiers chiites de Bagdad en attendant des ordres venus d'Iran. D'autres ont pris la direction des mosquées, réclamant qu'on leur rende Nadjaf, la ville de pèlerinage la plus sacrée pour les chiites.

    Au final on trouve des chiites iraniens un peu partout dans la société irakienne : des mosquées aux commerces en passant par les universités ou les hôpitaux -- qui travaillent activement à la reconstruction du pays.

    Cette infiltration s'est révélée si efficace qu'on a commencé à parler dès 2004 d'un "croissant chiite". Cette expression, initialement lancée par le roi Abdallah II de Jordanie est tout de même à prendre avec des pincettes...

    Parler de croissant chiite, c'est assimiler les chiites à un bloc homogène et solidaire qui échapperait au contrôle de leurs Etats respectifs et qui serait téléguidé par l'Iran.

    La réalité est certes plus complexe et les chiites très hétérogènes, mais il est indéniable que l'Iran utilise toutes les cordes de son arc -- et notamment la corde fondamentaliste -- pour instrumentaliser les communautés chiites à des fins politiques.

    L'objectif : asseoir une hégémonie de l'Iran sur la scène régionale. Prenons un exemple :

    A Bassorah (Basra), grande ville du sud de l'Irak, qui est le seul accès maritime du pays et principale voie d'exportation de son pétrole.

    Cette ville, qui constitue donc le "coeur de l'économie irakienne" ne fait plus réellement partie de l'Irak : à Bassorah aujourd'hui, la monnaie de référence est le toman iranien...

    Evidemment dans toutes les provinces périphériques, police... services secrets... hôpitaux... universités et organisations sociales ne répondent pas aux autorités de Bagdad, mais aux partis politiques et autres groupes chiites soutenus par l'Iran.

    Cet exemple pour vous montrer la finesse stratégique de l'Iran qui s'empare avant tout de la base, de la population... puis des postes clés politiques, économiques et religieux.

    Une fois la population du pays fédérée autour d'une nouvelle organisation à dominante chiites, les "représentants" iraniens présents en Irak et téléguidés par les ayatollahs n'ont plus qu'à se présenter aux urnes pour prendre le contrôle de manière tout à fait légale.

    Et cette hégémonie passe bien sûr par le contrôle des ressources et des voies d'approvisionnement du pétrole et du gaz de la région.

    Aujourd'hui, le "croissant chiite" a les moyens de contrôler une très grande partie des ressources en hydrocarbures (gaz, pétrole) ainsi que leur évacuation vers les pays consommateurs. Réel ou fantasmatique, il est en position de force aussi bien au Moyen-Orient que vis-à-vis de l'Occident.

    "L'Iran est prêt à prendre part activement à la direction des affaires mondiales et à établir la sécurité et la justice en différentes parties du monde" -- Ahmadinejad, avril 2009.

    Et en ayant le contrôle sur cette région qui regorge de pétrole, ils peuvent tenir la dragée haute aux Occidentaux et en premier lieu aux Etats-Unis -- premiers consommateurs de pétrole de la planète...

     

    Réserves pétrolières et voies d'acheminement à portée de main du pouvoir iranien

    Source : BP

    Comme vous pouvez le voir sur l'illustration ci-dessus, la distribution de pétrole dans le monde provient à plus de 60% du Moyen-Orient.

    Pour faire simple, on pourrait dire que les principaux pays détenant assez de réserves dans leur sous-sol pour satisfaire la demande grandissante de pétrole du monde sont l'Arabie Saoudite, l'Iran et l'Irak.

    Cette situation, ajoutée au fait que les autres régions de production auront totalement épuisé leurs réserves conventionnelles dans une vingtaine d'années, fait que notre dépendance pétrolière à l'égard du golfe "arabo-persique" ne peut que croître.

    N'importe quel producteur de pétrole dans le monde profiterait de cette situation. Voilà déjà une excellente raison pour vous d'avoir quelques valeurs pétrolières en portefeuille. Mais ce n'est pas la seule...

    "Nous espérons porter la production à 10 à 12 millions de barils par jour, qui fera de l'Irak l'égal des plus grands producteurs", Hussein Chahristani, ministre du Pétrole.

    La guerre énergétique est impitoyable. En plus de détenir le sacro-saint pétrole dont nos sociétés occidentales sont si dépendantes, il reste encore à avoir le contrôle des réseaux d'approvisionnement, les célèbres pipelines ou encore les pétroliers...

    Dans le contexte ultra-tendu que connaît le Moyen-Orient, les attaques contre les voies d'approvisionnement en pétrole ou en gaz sont légion. Il est donc tout à fait nécessaire, en tant qu'investisseur, de surveiller ces axes stratégiques...

    Prenons l'exemple du détroit d'Ormuz, qui à lui seul voit passer plus du tiers du pétrole produit au Moyen-Orient... soit 20% du pétrole consommé chaque jour dans le monde.

     

    Le golfe Persique est le coeur énergétique du monde ;
    le détroit d'Ormuz son artère principale !

    Parmi les milliards de barils de pétrole qui transitent quotidiennement au Moyent-Orient, le détroit d'Ormuz concentre pas moins de 40% du commerce mondial de pétrole. 17,4 millions de barils y transitent chaque jour. Presque l'équivalent de la consommation journalière de brut des Etats-Unis. C'est considérable.

    Et ce n'est qu'un début : l'EIA (Enery Information Administration) prévoit que les exportations de pétrole via le détroit d'Ormuz devraient doubler d'ici 2020.

    Le problème stratégique de ce passage clé des pétroliers, situé à plus de 10 000 km à vol d'oiseau des côtés américaines... est évident.

    "Le fait de l'existence de menaces sur le détroit aura un impact psychologique important... voire, une simple allusion sur une éventuelle restriction provoquera une flambée des prix du pétrole" -- Michael Clarke, directeur de l'Institut royal des Services unis.

    Bien que disposant de bases militaires sur les routes stratégiques de ses pétroliers, l'occident a une épée de Damoclès au-dessus de la tête. En effet, il suffirait d'un ordre de Téhéran pour que les voies d'acheminement du pétrole et du gaz soient immédiatement prises d'assaut et maitrisées.

    Imaginez un instant l'impact sur le marché du pétrole ! Instantanément tous les détenteurs d'actions pétrolières verraient leur portefeuille prendre des dizaines de pourcents...

    Le risque est bien réel : il suffit de voir la hausse vertigineuse du coût d'assurance d'un pétrolier, qui est passé de 150 000 $ à plus de 450 000 $ par voyage, pour s'en convaincre -- sans compter l'assurance sur la cargaison elle-même qui fait l'objet d'une autre police d'assurance.

    Pour mettre à bien ces menaces, l'Iran a disposé de redoutables Silkworms (voire photo ci-dessus), -- missiles sol-sol montés sur camion -- tout le long de la côte Nord du détroit d'Ormuz et du golfe persique, sur les îles Abu Musa, Qeshm et Sirri.

    Et comme si cela ne suffisait pas, l'Iran a aménagé des batteries côtières de missiles anti-navire. Souvenez-vous en 2006, au large des côtes libanaises, la frégate israélienne SAAR-V Hanit en avait fait les frais.

    Silkworm C-802

    Silkworm C-802

    Ce missile subsonique transporte une charge de 165 kg à 120 km avec une altitude de vol comprise entre 5 et 7 mètres. Il est doté de capacité antibrouillage et peut être lancé depuis la terre, depuis un avion ou depuis un bateau.

    Une usine d'assemblage de missile C802 est installée à Bandar Abbas ce qui montre bien que l'Iran ne connaîtra pas de pénurie sur ce type de matériel !

    Ainsi la "défense" des Iraniens est on ne peut plus claire. A la moindre menace, le détroit d'Ormuz s'embraserait. Des officiers du Pentagone ont confié qu'il faudrait -- au bas mot -- trois jours de bombardements ininterrompus pour venir à bout de ces missiles.

    "Naturellement tout pays attaqué par un ennemi utilise toutes ses capacités et opportunités pour faire face à cet ennemi". "Concernant la route principale pour faire sortir le pétrole, l'Iran agira pour imposer un contrôle sur le golfe Persique et le Détroit d'Ormuz" -- Mohammad Ali Jafari, commandant du Corps des gardiens de la Révolution.

    Que se passerait-il si les Iraniens décidaient de bloquer le détroit d'Ormuz ?

    C'est bien simple : le cours du baril passerait à 250 $ dans les jours qui suivent. Wall Street décroche comme jamais depuis 20 ans. Le Dow Jones tombe à 800 pts.

    Compte tenu de la géographie du détroit, l'Iran pourrait aisément mettre sa menace à exécution, et propulser en quelques secondes le prix du pétrole à plus de 150 $ !

    Une aubaine pour les majors du secteur, un calvaire pour des milliers d'investisseurs et la fortune pour qui se sera préparé à une telle éventualité.

    "Le pétrole pourrait atteindre un prix se situant entre 150 $ et 200 $ le baril à cause des réserves connues qui déclinent.  Les relations internationales, particulièrement celles entre les Etats-Unis et l'Iran, aideront à guider le baril de pétrole vers cette fourchette de prix." -- Jim Rogers, 2009.

     

     

     

    Les 3 scénarios qui pourraient faire passer le baril
    de 80 à 200 $ en quelques jours seulement !

    1- La théorie de l'alliance "Chine, Russie, Iran"

    Pendant que l'occident ronge son frein contre l'Iran et son président, de l'autre côté de la planète les poignées de main et connivences vont bon train.

    Depuis 2001, bien avant les attaques du 11 septembre, quelques pays comme la Chine et la Russie se sont inquiétés de voir les Américains lorgner sur les réserves énergétiques du Moyen-Orient.

    Désireux de garantir les approvisionnements énergétiques en provenance de leurs voisins, ils ont créé en juin 2001 l'Organisation de Coopération de Shanghaï (OCS).

    Il faut préciser que cette organisation a pour objectif officiel la lutte contre le terrorisme... Toutefois, pas d'Américains parmi ses membres ; elle privilégie au contraire les participants opposés au Nouvel Ordre Mondial tel que le conçoivent les Occidentaux !

    L'OCS est tout simplement un contre-pouvoir ultra-puissant ! Les membres de l'OCS regroupent 20% des ressources mondiales de pétrole, 38% du gaz naturel, 40% du charbon, et 50% de l'uranium !

    Et en 2005, devinez qui s'est rallié à la cause de l'OCS en tant qu'observateur ? L'Iran bien-sûr... Pas plus tard qu'en juin 2009, le président Ahmadinejad rencontrait son homologue Hu Jintao en Russie...

    Cette rencontre avec la diplomatie russe et chinoise est une aubaine pour l'Iran. La voilà entourée de deux géants émergents et parachutée dans les hautes sphères de la diplomatie internationale.

    Cette alliance lui donne en plus un regain de crédibilité dans le monde et une sécurité renforcée.

    Le président iranien peut compter sur ses homologues russes et chinois pour prendre des décisions concertées et peser davantage dans les décisions sur les dossiers sensibles...

    L'OCS est une alliance récente mais qui pourrait prendre un poids de plus en plus important dans les années à venir, surtout si des accords énergétiques se concrétisaient, au nez et à la barbe des Américains.

    Ces pays sont tous liés par une haine farouche de l'impérialisme américain. Ils multiplient les exercices et manoeuvres militaires coordonnés.

    A elle seule l'OCS pourrait faire basculer le monde dans une crise énergétique monumentale... elle pourrait affaiblir les mesures internationales prises contre le projet d'un Iran disposant de la bombe atomique...

    ... elle pourrait enfin défendre les intérêts de l'Iran en cas de conflit ouvert avec Israël... scénario qui n'a jamais été aussi près de se concrétiser qu'aujourd'hui !

     

    2- L'hypothèse de la Troisième Guerre Mondiale

    Ce scénario, bien que redouté par tous, ne doit pas être pris à la légère.

    Voilà des années qu'Israël trépigne à l'idée de bombarder l'Iran en réponse aux sempiternels propos antisémites et négationnistes du président iranien.

    "Ce que l'Iran essaie de faire maintenant n'est pas du tout éloigné de ce que Hitler avait fait avec le peuple juif il y a 65 ans" -- Silvan Shalom avril 2009.

    Il semblerait jusqu'à présent que ce soit l'administration Obama qui tente de réfréner les passions israéliennes --ces derniers voient en Ahmadinejad une réplique d'Hitler, capable de mener une guerre fratricide au Moyen-Orient au nom d'un grand empire Persan.

    C'est pourquoi le monde entier a les yeux braqués sur l'Iran depuis quelques mois. Aussi bien les investisseurs, les industriels que les politiques et les militaires. Si l'Iran cachait une base nucléaire prête à l'assemblage d'une bombe, la face du monde pourrait bien changer du jour au lendemain.

    La question du nucléaire n'est toujours pas réglées à l'heure où j'écris ces lignes -- la communauté internationale estime que l'Iran mettra encore plusieurs mois pour se procurer suffisamment d'uranium enrichi et lancer une attaque nucléaire -- si tel était le scénario choisi par Téhéran.

    L'inquiétude demeure.

    Encore faut-il qu'Israël ne lance pas les hostilités la première. Là aussi, toutes les supputations sont admises...

    "Nous ne permettrons pas à ceux qui nient la Shoah d'en commettre une deuxième." -- vice-premier ministre israélien.

    Israël a déjà mis ce genre de menace à exécution : une première fois en 1981, avec la destruction de la centrale irakienne d'Osirak ; puis une seconde en 2007, lorsque l'armée de l'air israélienne détruisit un site syrien supposé abriter une centrale nucléaire livrée par la Corée du Nord.

    Mais avec l'Iran, la donne n'est pas la même. Le terrain iranien n'est ouvert comme en Irak ou en Syrie. La destruction des sites nucléaires iraniens nécessiteraient de nombreux passages sur le territoire et pourraient facilement mener au fiasco.

    Cependant, si Israël décidait de "frappes chirurgicales", la guerre ferait exploser les prix du pétrole. L'Iran pourrait alors en quelques minutes provoquer la fermeture du détroit d'Ormuz : l'explosion des prix du pétrole serait alors fatale pour l'économie mondiale.

    L'Iran sait taper "là où ça fait mal" et n'hésitera pas en cas de conflit direct avec Israël à mettre les Etats-Unis et par-là même le reste du monde en bien mauvaise posture...

    A moins que ce ne soit d'en-haut que viennent les problèmes...

     

    3- L'imminence de l'Apocalypse

    Bien que cela puisse sembler étrange pour nombre d'occidentaux, croyants ou non, l'imminence de l'Apocalypse est quasiment un thème de campagne pour certains dirigeants iraniens.

    Il faut savoir que l'apocalypse est un moment important dans de nombreux textes religieux. On la retrouve dans la Bible, le Coran ou encore la Torah.

    Seulement voilà, comme dans toutes les religions, la bataille des interprétations fait rage -- Ahmadinejad l'a très bien compris.

    Il utilise métaphores et double langage jusque devant les représentants de l'ONU. Et on a parfois du mal à faire le distingo entre l'un et l'autre.

    "Le droit de l'Iran à la technologie nucléaire est une des solutions qui préparent le retour de l'Imam" -- Ahmadinejad.

    Et c'est ce qui inquiète les autorités internationales avec le dossier de la bombe nucléaire iranienne -- elle pourrait devenir un moyen pour Ahmadinejad de précipiter "l'Apocalypse".

    L'affirmation répétée de "rayer Israël de la carte" s'inscrit dans le scénario et dans le langage de "l'apocalypse" -- le président iranien utilisant à des fins politiques la prophétie de l'Imam, successeur du prophète Mohamed et Sauveur de l'Islam -- qui doit descendre sur terre à la fin des temps pour restaurer la justice et la paix.

    Si cette rhétorique provocatrice semble avoir un certain écho auprès d'une minorité, il semblerait qu'Ahmadinejad soit plus un politicien qu'un illuminé -- il utiliserait une certaine interprétation des textes sacrés afin de rallier un maximum de fidèles à sa cause...

    "Ahmadinejad est un cavalier de l'Apocalypse, qui ne songe qu'au retour du douzième imam", expliquait récemment le fils du chah d'Iran Reza Pahlavi dans L'Express.


    Les trois scénarios que nous venons de décrire sont très difficiles à anticiper : on ne sait ni quand ni si la menace éclatera... on sait juste que les conséquences seront gigantesques.


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  • Pour 50 milliards de dollars de plus...l'ogre chinois nous dévore
    Thomas Chaize

    Six milliards... pour 50 milliards
    La "news" du jour dans le monde du pétrole est que des compagnies pétrolières chinoises sont en pourparlers pour acheter six milliards de barils de pétrole au Nigéria pour 50 milliards de dollars dont une partie sont des champs off-shore inutilisés par des compagnies occidentales.

    Pour vous donner un ordre de grandeur, six milliards de barils cela équivaut à la moitié des réserves de Total ou presque le double des réserves de pétrole de la compagnie italienne Eni.

    Sécurisation des approvisionnements à tout va
    Depuis le début de la crise, les compagnies pétrolières chinoises ont signé des contrats avec le Brésil (10 milliards de dollars), le Kazakhstan (10 milliards de dollars), l'Angola (1,3 milliard de dollars), l'Equateur (un milliard de dollars), l'Iran (4,7 milliards de dollars), le Tchad (0,9 milliard de dollars), la Russie (25 milliards de dollars), l'Argentine (17 milliards de dollars), Singapour, le Pérou et la Birmanie.

    Graphique des approvisionnements pétroliers de la Chine

    Elles ont aussi acheté deux compagnies pétrolières canadiennes (499 millions et 7,2 milliards de dollars) qui ont des actifs au Nigéria, Gabon, Irak, Libye, et pris des participations dans des grands projets, dans le gaz en Australie (41 milliards) et les sables bitumineux au Canada.

    Un nouveau Rockefeller, puissance 10
    Pendant que l'Europe et l'Amérique du Nord gardaient sous perfusion le secteur bancaire, la Chine achetait en solde tout ce qui était disponible en pétrole...


    La Chine agit un peu comme Rockefeller au début du pétrole, quand les autres doutent, elle achète : "Croyez au pétrole, toute chute n'est pas une raison d'angoisse mais une occasion d'acheter" -- John Davison Rockefeller.

    Une politique hautement cohérente
    La Chine n'a pas que l'obsession du pétrole, elle achète aussi des mines de charbon, d'uranium et elle investit massivement dans les énergies renouvelables. La politique énergétique de la Chine est très, très cohérente.


    Soutenue par deux moteurs puissants
    Oui. La Chine agit ainsi pour subvenir aux besoins de sa future croissance et y trouve un moyen très pratique de convertir sa montagne de billets verts.


    Mais si on regarde un peu plus loin, je pense que les Chinois agissent avec autant de cohérence et de détermination parce qu'ils sont convaincus de l'imminence du pic pétrolier...


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  • Thierry Meyssan : Géopolitique de l'Empire

     

    Initiateur de l’enquête sur les véritables auteurs des attentats du 11 septembre 2001, le journaliste et écrivain Thierry Meyssan, expatrié depuis l’arrivée au pouvoir de Sarkozy, nous donne une lecture des tensions internationales actuelles et une explication inédite des origines du sionisme. Cet entretien s’inscrit dans nos mises en ligne d’inédits de personnalités censurées par les médias officiels. Voir à ce sujet aussi nos documentaires « Etat de guerre » et « Après l’hégémonie : propositions pour un monde multipolaire ».

     

     


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  • FAO: les multinationales accusées de chasser les paysans de leurs terres

    De Anne-Sophie LEGGE (AFP) – Il y a 3 heures

    ROME — Plusieurs ONG ont accusé les multinationales de l'alimentaire de chercher à s'emparer de millions d'hectares de terres de bonne qualité appartenant aux petits paysans du tiers monde, lors du sommet de la FAO sur la sécurité alimentaire à Rome.

    Lundi devant le siège de l'organisation onusienne, une vingtaine d'agriculteurs africains et sud-américains en tenue traditionnelle, ont mené une action symbolique pour dénoncer des "rachats massifs de terrains" par les firmes agro-alimentaires avec, selon eux, la complicité de la FAO et de certains gouvernements.

    Ils ont fait semblant de travailler un arpent de terre, d'où ils étaient chassés par des figurants incarnant des émissaires de multinationales.

    "Environ 80% des personnes ayant faim vivent dans des zones rurales. Mais la politique de la FAO soutient les multinationales, qui accaparent les terres des petits producteurs en Asie, en Afrique et en Amérique latine", a lancé Henry Saragih, coordinateur du mouvement altermondialiste La Via Campesina.

    Ce dernier est l'un des 400 délégués venus de 70 pays qui participent à un forum sur "la souveraineté alimentaire des peuples maintenant", parallèle au sommet de la FAO.

    Selon les ONG Grain et La Via Campesina, "certains gouvernements comme l'Arabie saoudite et la Corée du sud font pression dans cette direction (ndlr, l'acquisition de terres) comme nouvelle stratégie pour nourrir leurs populations sans recourir au commerce international".

    "Plus de 100 milliards de dollars sont sur la table, et 40 millions d'hectares ont déjà été acquis de l'Ethiopie jusqu'à l'Indonésie", ont-elles affirmé.

    Le leader libyen Mouammar Kadhafi a lui aussi dénoncé à la tribune de la FAO contre ce "nouveau féodalisme" en Afrique, où "des investisseurs étrangers achètent les terrains agricoles, se transformant ainsi en nouveaux propriétaires latifundiaires contre lesquels nous devons lutter".

    Pour le ministre brésilien de l'Agriculture Guillerme Cassel, "il faut tenir compte de la réalité de chaque pays". "Il y a un mois, le président Lula da Silva a promulgué un décret limitant l'achat de terres par les étrangers", a-t-il indiqué.

    Pour la FAO au contraire, le secteur privé est "un partenaire clé pour affronter le problème" de la production alimentaire, "non seulement en terme d'investissement mais aussi de savoir-faire, d'expertise", selon les termes de son directeur général Jacques Diouf.

    De leur côté, les ONG ont fustigé des firmes comme le géant américain de l'agro-chimie Monsanto et les nouvelles technologies comme les OGM et les biocarburants promues par les multinationales. "Avec leur huile de palme, ils nourrissent leurs voitures mais pas les gens", a estimé M. Saragih.

    Selon Renée Vellve, chercheuse aux Philippines pour Grain, le sommet de Rome qui réunit une soixantaine de dirigeants du monde, va aborder la question mais ne pourra pas apporter de solution viable.

    "Les chefs d'Etat disent chercher à favoriser à la fois les petits paysans et les multinationales mais c'est illusoire. Le contrôle des terres par ces dernières, associé à une logique de production de masse destinée à l'exportation, nuit toujours aux producteurs locaux", a-t-elle estimé.


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  • Ukraine: comment payer la facture russe à l'aide d'une épidémie ?

    (AFP) – Il y a 4 jours

    MOSCOU — Le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, a averti dimanche l'Union européenne que ses approvisionnements en gaz russe via l'Ukraine allaient être perturbés si Kiev ne s'acquitte pas de sa facture gazière.

    Lors d'une conversation téléphonique avec son homologue suédois Fredrik Reinfeldt, président en exercice de l'UE, M. Poutine "a attiré l'attention sur les signaux, y compris de canaux officiels à Kiev, concernant de possibles problèmes de paiement des livraisons de gaz russe", a indiqué un de ses porte-parole cité par les agences russes.

    En conséquence, "des problèmes pourraient survenir dans le transit de gaz russe via le territoire ukrainien à destination des consommateurs européens", a-t-il ajouté.

    Vladimir Poutine a informé son homologue suédois conformément aux engagements de la Russie et de l'Union européenne de s'informer mutuellement des problèmes en cours, notamment en matière énergétique, a fait valoir son service de presse.

    Vendredi, le Premier ministre russe avait déjà tiré la sonnette d'alarme, accusant le président ukrainien Viktor Iouchtchenko d'empêcher le transfert d'argent vers Moscou pour le paiement de la facture gazière de son pays.

    "Selon le Premier ministre ukrainien (Ioulia Timochenko, ndlr), Iouchtchenko fait obstacle à la coopération entre la banque centrale et le gouvernement ukrainien et bloque le transfert des fonds", avait-il déclaré.

    Toute menace de conflit gazier russo-ukrainien attise à chaque fois les inquiétudes de l'Europe, où un quart du gaz consommé provient de Russie, ce gaz transitant pour 80% par l'Ukraine.

    Début janvier, les Européens ont ainsi subi une longue interruption des livraisons russes au beau milieu de l'hiver en raison d'un contentieux financier entre Kiev et Moscou.

    Les Européens "n'ont pas à souffrir" d'un conflit gazier entre la Russie et l'Ukraine et à se laisser "entraîner dans la campagne électorale" en Ukraine, a commenté samedi un porte-parole européen sous le couvert de l'anonymat.

    Mme Timochenko est l'un des candidats favoris pour la présidentielle du 17 janvier, avec l'ex-Premier ministre pro-russe Viktor Ianoukovitch.

    M. Iouchtchenko, partisan de l'intégration de l'Ukraine à l'Otan, est depuis des années la bête noire du Kremlin. Il est aussi en conflit ouvert avec son Premier ministre et ex-alliée de la Révolution orange.

    Avec à peine 5% d'intentions de vote, il a par ailleurs peu de chances d'être réélu.

    Vendredi, M. Poutine a estimé que l'Ukraine disposait des fonds nécessaires pour payer son gaz grâce au crédit accordé par le Fonds monétaire international (FMI), soit 10,6 milliards de dollars à ce jour.

    Il a aussi montré du doigt l'UE, notant qu'elle n'avait toujours pas "versé un centime" à l'Ukraine, malgré l'aide financière promise.


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