• Grèce : le joker venu de l'Est

    Grèce : le joker venu de l'Est

    par Le Kergoat lundi 15 février 2010

    La crise grecque pourrait créer un précédent. Le départ de la Grèce de l’OTAN, puis de la zone euro, puis de l’Union Européenne.

    Aujourd’hui, la Russie a tout intérêt à sauver la Grèce. La Grèce a tout intérêt à accepter cette aide tombée du Ciel.

    Au delà, se renouera une très ancienne alliance entre deux pays de l’Autre Europe, une Europe Chrétienne Orthoxe séparé de l’Europe de l’Ouest depuis l’année 1054, date de la rupture des deux églises.

     2 avril 2012. Il est 20 heures. Flash spécial, la Grèce vient de quitter l’Union Européenne.

    Pendant une partie de la soirée, les analystes vont se succéder sur les écrans de télévision pour expliquer la décision d’Athènes.

    A Berlin, les Vingt-Six réunis en sommet extraordinaire viennent de publier une déclaration qui se veut rassurante. L’avenir de l’Union est assurée. Paraît-il...

    Demain, le Figaro titrera : « L’Europe orpheline. La Grèce s’en va ».

    En réalité, la décision était attendue depuis plusieurs semaines comme une fatalité après le départ de la Grèce, d’abord de l’OTAN puis de la zone euro.

    Dans quelques jours, la Grèce rejoindra l’OTSC, l’alliance militaire nouée entre Moscou et ses anciens satellites qui lui sont resté fidèles. La popularité du gouvernement d’Athènes atteint des sommets. A Thessalonique, l’homme de la rue se félicite que son pays ait abandonné une alliance avec la Turquie en rejoindre une englobant la Russie et l’Arménie.

    Scénario fiction, certes. Improbable pensez-vous ?

    Certainement pas. Plus que possible, ce scénario est, à mon avis, le plus plausible.

    Revenons au présent.

    Aujourd’hui, la Grèce est au bord de la faillite. Athènes a un problème immédiat : trouver de l’argent !

    Qui peut lui en donner ?

    Le FMI,

    L’Union Européenne,

    Les Etats-Unis,

    La Russie,

    La Chine.

    Le FMI ; Athènes n’en veut pas

    L’Union Européenne ? Peut-être... Mais l’Union est réticente, hésitante. Elle a de bonnes raisons. Après tout, la Grèce a triché pour entrer dans la zone euro. Pendant des années, elle a continué à tricher. La renflouer totalement aujourd’hui serait donner une prime au tricheur, affaiblir la crédibilité de la zone euro et donc de l’Union et renforcer encore le camp des eurosceptiques qui se porte déjà très bien. Alors probablement l’Union ne sera prête à donner que peu d’argent, en échange de beaucoup de sacrifices immédiats... pas de quoi faire sauter au plafond les responsables athéniens.

    Les Etats-Unis ? Pourquoi faire ? La Grèce fait déjà partie de l’OTAN. Enlisés en Afghanistan, en échec en Iraq, les Etats-Unis ont sûrement d’autres priorités que de venir au secours de ce petit état qui, au demeurant est déjà leur allié et donc n’a pas grand chose à offrir en échange d’un plan de secours.

    La Chine ? Trop loin ! Et géographiquement et politiquement. Pékin pourrait renflouer Athènes ; mais la Chine n’a pas aujourd’hui suffisamment d’influence en Grèce pour vraiment tirer un avantage politique réel de ce sauvetage intéressé.

    Reste...la Russie !

    L’Ours Russe a tout intérêt à venir au secours de la Belle Athéna ! Et il en a les moyens.

    Depuis 2006, la Fédération de Russie a remboursé quasiment l’ensemble de sa dette. Elle a de l’argent, elle a les mains libres.

    La dette grecque s’élève à 300 milliards d’euros. En 2008, le budget de la Fédération de Russie affichait 75 milliards d’euros d’excédents. Moscou a les moyens financiers de renflouer Athènes.

    Et il y des précédents, en 2009, la Russie annulé la dette du Kirghizistan en échange d’intérêts politiques. Hors de sa sphère traditionnelle d’influence, les mauvaises langues disent que Moscou a déjà accordé de larges crédits au Venezuela ou même à la lointaine île de Nauru, dans l’Océan Pacifique, en échange d’une bienveillante reconnaissance des ses deux bébés : l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie. Moscou a l’expérience de payer pour des avantages sur la Scène Internationale. La Russie a les moyens politiques de renflouer la Grèce.

    L’Ours Russe a intérêt à aider la Grèce. Parce que depuis l’origine, cette dernière quoique membre d’une organisation hostile à la Russie : l’OTAN, n’a de cesse que de promouvoir le dialogue avec Moscou. Elle se comporte en amie, voir en alliée de la Sainte Russie. Pour mémoire et à titre d’exemple, en 2003, quand les Etats-Unis attaquent l’Iraq, parmi les rares pays de la « Vieille Europe » qui soutinrent le couple franco-allemand contre Washington, il y avait...la Grèce. Ce n’est pas un hasard. Il n’y a pas de hasard sur la scène des Relations Internationales.

    En avançant leurs pions en Grèce, Poutine et Medvev jouent sur du velours.

    La Grèce n’a jamais été à l’aise dans l’OTAN. D’abord à cause de la présence de la Turquie dans cette organisation. Est-il besoin de mettre des liens ? Et aussi parce que, si les Tchèques n’ont pas oublié l’intervention des chars russes en 1968, les Grecs se souviennent du rôle de la CIA dans la sinistre dictature des colonels.

    Comme le Chili et beaucoup de pays d’Amérique du Sud, la Grèce présente pour les Etats-Unis et la Russie, l’image inversée de celle donnée en « l’Europe de l’Est ». Les Etats-Unis n’y sont pas les bienvenus, la Russie, si.

    Que pourront faire les Etats-Unis pour s’opposer à une sortie de la Grèce de l’OTAN ? Bombarder, comme en Iraq ou en Serbie ? Ça n’est guère crédible. Il est probable que les USA resteront sur leur objectif prioritaire : l’Afghanistan et ignorent en le minimisant ce départ de la Grèce.

    Aussi un accord « Renflouement financier contre retrait de l’OTAN » est possible.

    La Russie peut payer, la Russie sait payer pour de telles opérations. Le contexte grec la fait alors progresser en pays ami. Ça lui permettra, à l’avenir de renforcer son avantage, par exemple en faisant adhérer la Grèce à l’OTSC.

    Alors, hors de la zone euro, décrédibilisée en Europe, suspecte de servir les intérêts d’une Russie vue traditionnellement plus comme un ennemi que comme un partenaire du couple Union Européenne-USA ( souvenez-vous de la réaction dudit couple contre la Russie pendant la guerre d’Ossétie ), la Grèce « tombera » hors de l’Union Européenne comme un fruit mûr.

    Dans un contexte de Chocs de Civilisations, quel meilleur aimant, quel meilleur amant, pour la Belle Athéna, que le Nounours Russe !

    Et nous en arrivons au scénario ci-dessus.

    Dans l’immédiat les deux principaux acteurs concernés : le premier ministre grec Papandréou et le tandem Poutine-Medvedev ont tout à gagner à cette alliance.

    Papandréou sort à peu de frais ( immédiat ) la Grèce d’une crise qui paraissait inextricable, il ravit le contribuable grec qui aura moins à payer que prévu et électoralement, ça compte ! Poutine et Medvedev, en étendant la zone d’influence de la Russie de 2010 à une région d’où même l’URSS était absente, rentrent dans l’Histoire en couronnant ainsi le retour de la puissance russe.

    D’ailleurs, tout ce beau monde se rencontre très bientôt. A votre avis, de quoi vont-ils parler ?

    Alors, vous avez encore des doutes ?

    Moi pas.


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