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Laurence Parisot donne un coup de pouce à Marine Le Pen
Le MEDEF donne un coup de pouce à Marine Le Pen
Pour le Medef, Marine Le Pen, en prônant la sortie de l’euro, fait preuve de « populisme » et « démagogie ». Devenir la cible du patronat avantage, Marine Le Pen dans son combat contre contre Bruno Gollnish. Mais la prise de position du patronat pourrit le débat sur la politique économique.
Marine Le Pen fait peur au Medef. Ou plutôt la propagande de Marine Le Pen sur l’euro effraie le grand patronat français. Comment sinon interpréter le geste politique inhabituel de la présidente, Laurence Parisot, ce matin, qui a pris près de 10 minutes pour critiquer violemment les positions de la candidate à la présidence du Front national ?
Prenant la parole au nom du conseil exécutif de son mouvement réuni lundi 13 décembre, elle s’est livrée à une longue diatribe contre « toutes les formes de démagogies économiques », visant explicitement « Marine Le Pen ». « Nous sommes à 48 heures d’un événement majeur, le conseil européen des chefs d’Etats et de gouvernement qui doit prendre des décisions très importantes pour l’Europe. Nous ne pouvons laisser dire qu’une sortie de l’euro serait bénéfique pour le pays. Nous, le Medef, devons mettre en garde contre les programmes populistes (...) de véritables utopies démagogiques, qui laissant penser que tout est possible. (…) Toute sortie de l’Euro ne pourrait qu’appauvrir notre pays en faisant chuter notre niveau de vie de manière terrifiante», a notamment déclaré la présidente du Medef.
Les dirigeants du Medef ont été, de l’aveu même de Laurence Parisot, impressionnés par la prestation télévisée de Marine Le Pen, la semaine dernière. Interrogée par Marianne : « ne craignez-vous pas de faire monter Marine Le Pen dans les sondages ? », la patronne de l’IFOP a répondu : « La question se pose. Mais à partir du moment où la représentante du FN fait un tabac dans les médias, et donne l’illusion de la cohérence, prend l’aspect rassurant du bon sens, il faut dire qu’un tel programme est une illusion, une utopie démagogique ».
On peut tirer trois conclusions de la sortie de Laurence Parisot :
1) A l’évidence, le Medef donne un coup de pouce involontaire mais magistral à Marine Le Pen dans son combat contre Bruno Gollnish pour conquérir la présidence du Front national. En effet, pour être reconnu chez les militants du FN comme la « candidate anti-établissement », et donc reprendre le flambeau de Jean-Marie Le Pen, rien n’est meilleur qu’un brevet « antiMedef » conféré par le Medef lui-même. C’est vrai même au FN, dont les racines idéologiques sont ultralibérales en matière économique (ce fut longtemps le seul parti à réclamer la suppression de l’impôt sur le revenu…).
2) A l’évidence, la sortie du Medef est le signe d’une grande inquiétude chez les « dominants » de la vie politique et sociale française devant la tournure du débat politique français à dix-huit mois de la présidentielle.
3) A l’évidence, le Medef vient de pourrir le débat sur l’Euro. Car le FN est, loin de là, le seul lieu d’où vient la critique de la monnaie unique. Alain Cotta, professeur d’économie est-il au FN ? Non, bien sûr. Nicolas Dupont Aignan, lui, anime République debout ! Christian Saint-Etienne qui s’exprime pour « deux euros » dans toute la presse , y compris à Marianne, est un centriste revendiqué (il a été proche de François Bayrou jusqu’en 2007). Le Mpep est un club de la gauche de la gauche. Cette courte liste est loin d’être exhaustive. Aucun d’entre eux ne peut être qualifié de « populiste » (le sens du mot, en plus, est contestable), ni de « démagogue ».
Il existe aussi des économistes et des personnalités, qui tout en voulant conserver l’euro, recherchent des solutions à la crise, comme la nécessaire renégociation des dettes publiques insupportables. Enfermer le débat entre pro-euros et anti-euros dans un affrontement du seul Front national et du grand patronat casserait par avance l’indispensable délibération citoyenne sur le bien fondé des politiques économiques européennes et françaises. Il est bien évident, que , pour sa part, Marianne refuse cet étouffoir, et continuera à écrire et à publier sur la crise de l’Euro, sur celle de l’Europe (lire l’article de Jacques Julliard dans Marianne cette semaine) et aussi sur celle du « modèle français », en gardant l’esprit, les yeux et les oreilles grands ouverts.
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