• Le scandaleux silence au sujet de Fukushima

    Le scandaleux silence au sujet de Fukushima

    Très mauvaise nouvelle. Pour le moment et compte tenu des technologies aujourd'hui disponibles, l'objectif d'empècher l'explosion nucléaire de l'ensemble du site de Fukushima paraît hors de portée alors que le processus cataclysmique ne cesse de prendre de l'ampleur.

    par Jean-Paul Baquiast et Christophe Jacquemin - 19/06/2011

    Il y a quelques jours, des images virtuelles d'un éventuel sarcophage que Tepco pourrait installer au dessus des réacteurs en perdition de Fukushima circulaient sur les télévisions. Mais assez curieusement, il s'agissait apparemment de structures assez fragiles, quasiment en matière plastique, très éloignées des milliers de tonnes d'acier et de ciment envisagés pour remplacer l'actuel sarcophage en place à Tchernobyl. On ne voit pas comment de telles structures pourraient contenir une explosion majeure sur le site de Fukushima. Tout au plus pourraient-elles empêcher la diffusion de gaz radioactifs sous basse pression. De toutes façons, Tepco annonce que la mise en place de ces protections ne sera pas possible avant longtemps, compte tenu du niveau de contamination actuel du site.

    En fait, les priorités devraient être toutes autres. Il devrait être indispensable d'empêcher dans les jours, semaines ou mois qui viennent la contamination d'une partie du Japon par les cœurs en fusion des réacteurs touchés par le tsunami. Or, très mauvaise nouvelle, pour le moment et compte tenu des technologies aujourd'hui disponibles, cet objectif paraît hors de portée alors que le processus cataclysmique ne cesse de prendre de l'ampleur. Une toute aussi mauvaise nouvelle est que, désormais, le monde entier fait silence sur le désastre mondial qui se prépare. Les conspirationnistes ne devraient pas être les seuls à s'interroger sur les raisons de ce silence.

    Si l'on en croit l'industriel Tepco, le gouvernement japonais qui l'a toujours soutenu y compris dans ses décisions les plus hasardeuses et les industriels américains du nucléaire qui ont depuis les origines partie liée avec le Japon pour la gestion de son parc nucléaire, la situation à Fukushima serait potentiellement pire qu'elle ne le fut à Tchernobyl. Selon ces sources cependant, il n'y aurait pas de danger immédiat, tant du moins que l'on continuera à pomper de l'eau et qu'un nouveau fort tremblement de terre ne se produira pas. Pas de danger immédiat sans doute, mais pas de solutions fiables avant quelques années au mieux. En attendant, selon ces sources, il n'y aurait pas de raisons de s'inquiéter. Curieuse préconisation.

    Pour d'autres experts au contraire, la situation n'a jamais cessé depuis le début de s'aggraver. Aujourd'hui il y aurait de forte probabilités (certains disent 50/50) pour que le pire se produise. Un article récent de Aljazeera.net cité ci-dessous vient de faire un bilan assez terrifiant de la situation. On pourrait suspecter la neutralité de Aljazeera mais la chaîne se borne à reprendre les diagnostics de deux experts confirmés du nucléaire, l'américain Arnorld Gundersen (photo) et le japonais Shoji Sawada. L'un et l'autre, à première vue semblent parfaitement objectifs et bien informés. Certes ils sont tous les deux devenus des whistle-blowers alertant sur les dangers du nucléaire. Le site Fairewinds auquel participe Arnorld Gundersen est un leurs représentants les plus influents aux Etats-Unis. Mais cela ne devrait pas être une raison pour disqualifier leurs analyses.

    Pour Arnold Gundersen, notamment, la fusion des réacteurs touchés constitue désormais un processus sans doute impossible à empêcher, compte tenu encore une fois des connaissances scientifiques et technologiques du moment. Le refroidissement par eau ne pourra que le retarder de quelques temps, tout en noyant la région et la mer environnante sous des milliers de tonnes d'eau fortement contaminées. Une fois les nappes phréatiques ou les couches terrestres profondes atteintes, ce ne serait pas seulement une large périphérie autour de Fukushima qui deviendrait inhabitable, mais sans doute la ville de Tokyo elle-même. Dans l'hypothèse la plus grave, celui de l'explosion des centaines de tonnes de combustibles nucléaires présents sur le site, le Japon tout entier puis très vite des zones étendues de l'hémisphère nord pourraient être interdits à la vie humaine.

    D'ores et déjà, deux experts de santé publique américains estiment avoir observé une augmentation anormale de la morbidité des nouveaux nés dans une dizaine de villes de la cote ouest des Etats-Unis situés approximativement sous le vent de Fukushima (voir ci dessous le rapport Sherman-Mangano). On s'étonne que, devant une observation aussi troublante, des inquiétudes beaucoup plus nombreuses ne se soient pas encore manifestées, notamment aux Etats-Unis, si soucieux en général de la santé publique.

    La situation paraît en voie de devenir si grave que le silence des autorités nationales et internationales est véritablement inexplicable. Même si peu de remèdes ne paraissent pour le moment disponibles, il conviendrait néanmoins que les scientifiques du monde entier y réfléchissent et travaillent à la mise au point de solutions. L'inaction actuelle donne beaucoup d'arguments à ceux dénonçant une conspiration du silence de la part des gouvernements et des industriels impliqués, non seulement au Japon mais aux Etats-Unis. La complicité objective entre Barack Obama et l'Exelon Corporation, le plus gros fournisseur d'énergie nucléaire et un des plus importants contributeurs de sa campagne, est dénoncée.

    Rien cependant n'y fait. L'attitude généralement affichée par l'ensemble des décideurs et des médias est particulièrement à courte vue, mais elle n'indigne encore personne. Le message général s'apparente au suivant : "le magma monte dans la cheminée du volcan. Une explosion destructrice se produira bientôt. Mais qu'importe, dormez tranquilles au bord du cratère...pour le moment".

    Précisons à l'attention de ceux qui militent pour l'abandon de l'énergie nucléaire que ce dernier objectif de l'abandon, à supposer qu'il soit décidé, ne pourra pas être mis en oeuvre avant 25 ou 30 ans. Au Japon le monde se trouve confronté à une échéance beaucoup plus immédiate et à des risques beaucoup plus graves : un Tchernobyl de magnitude 10 pouvant se produire dans quelques mois. La réaction de prévention devrait être toute différente.

     

    Sources
    * Article d'Aljazeera : http://english.aljazeera.net/indepth/features/2011/06/201161664828302638.html
    * Fairewinds : http://www.fairewinds.com/home
    * Arnold Gundersen : http://en.wikipedia.org/wiki/Arnold_Gundersen
    * Paul Jorion : http://www.pauljorion.com/blog/?p=24334
    * Rapport Sherman Mangano : http://www.counterpunch.org/sherman06102011.html
    " The recent CDC Morbidity and Mortality Weekly Report indicates that eight cities in the northwest U.S. (Boise ID, Seattle WA, Portland OR, plus the northern California cities of Santa Cruz, Sacramento, San Francisco, San Jose, and Berkeley) reported the following data on deaths among those younger than one year of age :
    4 weeks ending March 19, 2011 - 37 deaths (avg. 9.25 per week)
    10 weeks ending May 28, 2011 - 125 deaths (avg.12.50 per week)

    * Exelon Corporation : http://www.exeloncorp.com/Pages/home.aspx

     

    par Automates Intelligents (JP Baquiast) (son site) lundi 20 juin 2011


  • Commentaires

    1
    Rikiai
    Lundi 20 Juin 2011 à 22:58
    Salut Mr WebR
    Il s'agit du même silence que pour la catastrophe de BP dans le Golfe du Mexique, oubliée celle-là, jusqu'à que Français et Anglais la récoltent sur leurs côres !
    2
    webrunner Profil de webrunner
    Mardi 21 Juin 2011 à 07:25
    ça ne donne pas envie de se lever le matin
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    3
    logosky
    Jeudi 23 Juin 2011 à 01:27
    j'ai suivi les analyses de m. Gundersen depuis le début de la catastrophe, et je peux dire qu'il est resté pertinent. En se basant sur les % des composants relevés autour des centrales, il expliquait à quelle étape elles étaient dans leur progression! Si vous dites qu'il prédit le pire, cela n'est pas rassurant du tout. A l'étape où nous sommes, selon les normes atomiques françaises, la ville de Fukushima comportant 300 000 habitants devrait être évacuée!!! j'ai fait un peu de contrôle de soudures à la centrale nucléaire de Cattenom en France, et nous manipulions des pièces radioactives de 50 curies pour le photographies de soudure. Déjà avec de telles pièces, nous prenions des précautions incroyables!!! 50 curies n'a rien de comparable avec ce qui est en jeu dans les dites centrales, en plus au nombre de 4!!! Je n'arrête pas de prier pour le Japon...
    4
    webrunner Profil de webrunner
    Jeudi 23 Juin 2011 à 08:19
    merci pour votre témoignage. Je crois aussi que le compte à rebours est commencé.
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