• Pour un observatoire du DSK

    Pour un observatoire du DSK

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    Dominique Strauss-Kahn est partout: dans les magazines, dans les conversations. Mais personne ne fait trop attention à ce qu'il dit réellement. Antibobards lance donc aujourd'hui L'Observatoire du DSK, afin de bien comprendre ce qui nous attend (ou pas...). Premier exercice avec les deux discours les plus récents.

     
     
    Dominique Strauss-Kahn, c’est le furet du bois-joli. Il est passé par ici, il repassera par là. On n’arrête pas de parler de lui. Lorsque Ségolène Royal se déclare candidate aux primaires du PS, c’est parce qu’elle se dit persuadée qu’il ne le sera pas. Si, au contraire, Martine Aubry se tait, les commentateurs disent : « elle prépare l’arrivée de DSK ». Mais lui, personne ne l’attrape. Comme le furet. Dernier exercice de style : notre confrère du Nouvel Observateur, lui consacre sa Une et une dizaine de pages. François Bazin dit « rien n’est sûr, mais on va vers une candidature Strauss-Kahn ».  Mais l’animal si désiré reste insaisissable. Pour une raison simple : il ne voit pas (ou presque pas) les journalistes (1). Ceux-ci sont réduits à interroger l’entourage. « Comment va-t-il ce matin ? » , « a-t-il mangé sucré ? Salé ? » On invoque son épouse Anne Sinclair. « elle serait pour » (notez le conditionnel…). Au passage, les mêmes qui trouvent injuste le placard d’Audrey Pulvar, ne sont pas en reste pour ausculter le couple français le plus célèbre de Washington.
    Au fait Dominique Strauss-Kahn est-il réellement muet ? Non. il parle même beaucoup. Es fonction, puisque le Directeur général du FMI fait le tour de la planète pour parler d’économie, de la crise mondiale, de la gouvernance. Mais l’économie, la crise, la gouvernance, cela ne parle pas aux journalistes « politiques ». Alors, en France, on ne parle pas de ce qu’a réellement dit DSK.  Pour tenter de remédier à cette lacune dommageable au débat public, je propose donc de lancer ici un « observatoire du DSK », dont le but est de rapporter les propos publics du DG du FMI, es qualité ou non. Et d’analyser les éventuelles  implications de ces déclarations pour nous, pauvres petits Français qui devront voter en 2012…  Premier exercice de l'Observatoire du DSK avec deux récents discours.

     

    Le discours sur l’Europe du 19 novembre à Francfort. J’en avais parlé (ici).  DSK y préconise d’allonger la durée du travail, ce qui est déjà étonnant pour un candidat  socialiste à la présidence de la République in petto… Parmi les idées lancées sur la table, on trouve aussi « la création d'une autorité budgétaire centralisée, aussi indépendante politiquement que la Banque centrale européenne (BCE). L'autorité fixerait les orientations budgétaires de chaque pays membre et allouerait les ressources provenant du budget central pour mieux atteindre le double objectif de stabilité et de croissance. ». 
     

    Ensuite on remarque l’idée de confier au niveau européen, la gestion et l’unification du marché du travail et de sa fiscalité : « la zone euro ne peut réaliser son vrai potentiel avec cet ahurissant patchwork de marchés du travail segmentés (...) il est temps de créer des conditions égales pour les travailleurs européens, en particulier dans le domaine de la fiscalité du travail, systèmes de prestations sociales et la portabilité des prestations, et de la législation de protection de l'emploi. »
     

    Enfin, l’ouverture à l’immigration : « La croissance à long terme bénéficierait également d'un coup de pouce par une approche moins restrictive sur l'immigration. L'Europe semble mener une bataille démographique perdue d'avance, sa population active devant diminuer sensiblement dans les prochaines décennies. Cela fait sens de miser sur l'immigration pour remédier aux pénuries de main d 'oeuvre, comme cela a été fait en Amérique du Nord. Cela pourrait aussi rendre le modèle social plus durable. Aussi intéressant cela puisse paraître d'un point de vue politique de court terme, l'Europe ne peut pas résoudre ses problèmes en verrouillant ses portes.  »
     

    Si DSK était candidat, on trouverait donc dans ses « 110 propositions » :
     

    a- Retour aux 39 heures, b- référendum sur un nouveau traité européen, c-transfert du ministère du Travail au niveau de la Commission d- Régularisation des sans-papiers. Décoiffant, vous dis-je. Mais un tel programme pourrait avoir du mal à rassembler la gauche ! Il serait plus facile de s’accorder avec Bayrou qu’avec Mélanchon…A moins que, comme il le reconnaît lui-même, ces orientations un peu utopiques dans le paysage politique européen actuel, soient justement avancées pour …ne pas être candidat. DSK pourrait alors dire aux socialistes réticents: vous ne voulez pas de mon programme ? Alors je reste au FMI.  En 1995, Jacques Delors avait prétexté en1995 l’impossibilité de rassembler une  majorité sur ses positions personnelles, divergentes de celles du PS, pour refuser de se présenter à la présidentielle…
     

    Pour tester l'adhésion éventuelle de la gauche politique à ces idées, j’ai soumis le texte de Francfort à un de ses anciens conseillers, il m’a répondu : « c’est ambitieux, mais la proposition d’une autorité budgétaire indépendante, c’est bizarre ». Si déjà ça flotte dans le centre de la Strauss-kahnie !
     

     
     

    2- Le débat sur la gouvernance mondiale à Genève le 8 décembre. Il s’agit d’une rencontre avec Pascal Lamy, autre directeur général mais de l’OMC.  Remercions la Télévision suisse romande de bien faire son travail… Quelle chaîne en France a suivi ce débat ? C'est dommage. Quelles belles images d'une ambiance détendue, voire complice. Lors de l'échange de « vœux », on apprend que DSK est favorable à un saut de plus dans la mondialisation, par la conclusion du « cycle de Doha » sur les échanges mondiaux. Il faut donc ajouter au programme futur et éventuel de DSK une proposition « pour une ouverture supplémentaire des frontières ; »
     

    Auparavant, DSK explique pourquoi il est toujours entièrement de gauche. Réponse argumlntée, et calculée au millimètre pour être compatible avec le FMI... Pascal Lamy souhaite que « en 2011, Dominique prenne la bonne décision au bon moment »  Clin d’œil appuyé à une candidature. DSK ne répond pas, comme à son habitude. Mais que dit-il dans son discours écrit, consacré à « L’impact de la crise financière sur la gouvernance économique mondiale »   dont on dit qu’il s’agit d’un texte « personnel ». Il y dresse un bilan de l’action du Fonds monétaire international depuis le début de la crise. Il y  a beaucoup d’autocongratulation, évidemment. Mais politiquement on sent la volonté de dire que le FMI est en passe de devenir le centre du monde.  Voici la fin  :
     

    « Alors que nous cherchons à mettre en place un nouveau cadre de coopération mondiale, nous devons nous rappeler qu’il ne s’agit pas seulement de réaliser une croissance plus élevée et plus soutenable : il s’agit d’œuvrer en faveur de la démocratie et, en fin de compte, de garantir la paix. Lorsque les pères fondateurs du FMI se sont réunis à Bretton Woods en 1944, la paix était leur principal sujet de préoccupation. Ils avaient vu les conflits économiques de l’entre-deux-guerres dégénérer en batailles militaires de la Seconde Guerre mondiale avec des coûts humains jamais atteints dans l'histoire de l'humanité. Ils ont donc créé un système d’institutions, parmi lesquelles le FMI, qu’ils ont chargé de trouver des solutions fondées sur la coopération aux problèmes économiques mondiaux.
    C'est un défi analogue que nous devons relever maintenant. Aujourd'hui comme hier, les difficultés économiques et financières lorsqu'elles s'aggravent portent atteinte à l'équilibre social, ruinent les fondements de la démocratie, font douter des institutions et peuvent dégénérer en guerre civile ou étrangère.
    En rénovant la gouvernance économique mondiale, en la rendant plus efficace et plus légitime, plus efficace parce que plus légitime, nous renouons avec notre mission et nous travaillons pour la paix.
    En conclusion, le choix est clair. A un moment où nul de sait de quoi l’avenir sera fait, à un moment où les déséquilibres budgétaires de certains pays menacent tout l’équilibre mondial, à un moment où l’accumulation de surplus extérieurs chez les uns et de déficits chez les autres crée les conditions de nouveaux affrontements, la communauté internationale doit choisir : elle peut œuvrer pour mettre en place un nouveau modèle de croissance pour un monde nouveau, ou choisir l'immobilisme, le repli sur des positions nationales et au bout du compte risquer des années d'instabilité qui seront le terreau d'une nouvelle crise. Un nouveau modèle de croissance exige un nouveau modèle de gouvernance. C'est là l'enseignement réel et durable de la crise. Nous devons veiller à en tenir compte. Telle est notre mission. »
    On ne peut à ce stade tirer qu’une hypothèse : une « mission » aussi historique que celle définie ci-dessus ne saurait être achevée en 2011 ! 
    Résumons :  dans deux interventions, le directeur général a distillé des arguments qui pourraient un jour justifier son désistement. Et dans ces mêmes interventions, il a esquissé un programme politique très personnel, qui augure d’alliances politiques renouvelées vers le centre gauche.
     

    C’était le premier volet de L’Observatoire du DSK. Il y en aura bien d’autres, d’ici juin 2011. J’invite les amis d’Antibobards à participer au jeu. Recherchez les déclarations officielles, rapportez les, discutons en. L’observatoire du DSK est ouvert !


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