• Alain Jakubowicz : hélas, le racisme anti-blanc existe!

    Alain Jakubowicz : hélas, le racisme anti-blanc existe!

    C'est l'actualité non identifiée de la semaine : un incroyable sondage commandité par la Banque centrale européenne pour la reconstruction et le développement, demandant aux Européens de dire s'ils sont davantage gênés par la présence d'un voisin homosexuel ou gitan.


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    Il y a toujours l’embarras du choix pour revenir sur ces « ANI » que s’efforce de traquer Marianne2 - ces « Actualités non identifiées  », informations non négligeables qui, sitôt annoncées, passent à la trappe dans des « trous noirs » du champ médiatique quand d’autres, bien moins consistantes, sont ressassées et mises en scène jusqu’à plus soif.

    Un exemple d’ANI très pure nous a été offert récemment avec l’annonce (à bonne heure d’écoute) par France Inter d’un sondage au cours duquel il était notamment demandé aux sondés à quelle « ethnie » ils estiment appartenir et qui ils « n’aimeraient pas avoir comme voisin » : « homosexuels, malades du sida, drogués, pédophiles, personnes d’ethnies différentes, gitans, juifs, roms, handicapés, travailleurs immigrés, etc ». Cette étrange reconstruction de la société en « ethnies » aussi diverses n’a suscité ni reprises ni commentaires dans les autres médias. L’information qui avait retenu l’attention de France Inter semblait pourtant notable compte tenu du sérieux de  l’entreprise organisant ce sondage (la branche anglaise d’IPSOS), de l’ampleur de l’opération (26 pays européens concernés) et de l’importance du commanditaire (la Banque centrale européenne pour la reconstruction et le développement).
     
    Le silence qui a suivi cette annonce s’explique peut-être par la réaction approbatrice du président de la LICRA (Ligue contre le racisme et l’antisémitisme), Alain Jakubowicz, sollicité à l’antenne par France-Inter. Approbation qui a un peu surpris et sur laquelle il a accepté de revenir pour Marianne2.
       « Le combat antiraciste doit s’adapter à l’évolution profonde qu’a connue notre société, qui est allée à rebours de notre rêve de la voir expurgée des discriminations, explique Alain Jakubowicz. Ce rêve nous a conduit à la cécité, on n’a pas voulu voir la montée du racisme intercommunautaire, entre arabes et noirs, entre arabes et asiatiques. Et je n’aurais jamais imaginé, il y a encore quelques années, que l’on puisse faire un jour le constat d’un racisme anti-blanc. C’est terrible. Certains estiment qu’il ne faut pas en parler sous prétexte que cela fait le jeu du Front national qui exploite, c’est vrai, cela de manière honteuse, mais en même temps il faut dire les choses car on a culpabilisé à outrance trop de nos concitoyens ».
     
      Cette réalité a conduit depuis plusieurs mois la LICRA à réfléchir à une nouvelle approche de la question. « Comment bien connaître ces réalités inquiétantes ? poursuit Alain Jakubowicz . Toute l’histoire de la Licra nous conduit à être opposés aux statistiques ethniques, mais il faut faire des choix entre les maux et les mots, c’est pourquoi je crois possible de passer par des sondages pour faire la part entre le sentiment communautaire, privé et culturel, qui a toujours été acceptable en France et le vrai communautarisme, que l’on ne doit pas accepter, qui commence quand la loi du groupe supplante la loi de la République. Je ne sous-estime pas le danger de ce genre de sondages, mais ils peuvent permettent de mesurer selon les milieux l’importance réelle des opinions inquiétantes ».
     
    On peut comprendre le souci de la Licra, préoccupée par la montée des clivages et des expressions de haine dans certains milieux. Mais on peut s’interroger aussi sur la légitimité de ce genre de questionnement demandant aux personnes interrogées de se classer par « ethnies ». Les sondeurs ne mesurent pas seulement l’opinion publique : ils participent à sa mise en forme, au même titre que les journalistes et les hommes politiques auxquels on ne pardonne aucun écart de langage. Les sondages ne s’apparentent pas à des mesures physiques ou météorologiques : tout étudiant en sciences humaines apprend à s’interroger sur les effets pervers de l’observation et du questionnement sociologique. Instrument massif d’auto connaissance, les sondages modifient les données observées, intervenant dans les représentations sociales qu’il prétend mesurer. En l’occurrence, la sollicitation et l’incitation à voir dans la société la coexistence pas très pacifique d’« ethnies » ont des effets de légitimation pour  ceux qui partagent cette vision.

    D’où une question qui n’a pas été posée à la suite de l’annonce de ce problématique sondage : pourquoi les sondeurs auraient-il le droit d’user de formulations qui valent à d’autres acteurs publics d’être l’objet de polémiques voire de poursuites pénales ? On ne peut à la fois s’indigner comme analystes politiques que l’extrême droite oeuvre pour que des délits proscrits par la loi obtiennent le statut d’opinions et offrir comme sondeur ce même statut d’opinions à ces mêmes délits dans des questionnaires de sondages…

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