• Comment devenir hypercon...

    Comment devenir hypercon...

    i-Pad, c’est bien l’objet le plus con qui vient d’être présenté devant un parterre de journalistes éberlués par ce machin de haute technologie. Tout d’un coup, un vent de dévotion s’est répandu sur la planète, parvenant jusqu’au cerveau de Jacques Attali qui se fendit d’un article dithyrambique sur l’objet en question, allant même jusqu’à conseiller Steve Jobs de créer des vêtements spéciaux pour emporter ce précieux livre électronique censé livrer l’accès à l’hypermonde en lisant des hyperlivres, en partageant des hyperphotos, en exécutant des hyperdessins, bref, de quoi vivre des hyperexpériences sur cette planète habitée par les hypernomades et autres hypercitoyens… hyper, hyper, certes, mais au fait, trouvera-t-on l’hyperbook d’Apple dans les hypermarchés ? <o:p></o:p><o:p>
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    Le climat planétaire est propice pour adorer ce nouvel objet comme s’il s’agissait de la venue du Christ mais là, c’est du rapide, nul besoin de recherches théologiques et d’invention de rites et pratiques pour mettre au point l’eucharistie et communier avec le Fils qui est auprès du Père avec l’Esprit. Avec l’i-Pad, c’est l’eucharistique communicationnelle directe. L’extase textuelle instantané. Dieu n’est plus un fumeur de Havane mais l’Ecriveur suprême avec lequel chaque pèlerin sur terre entrera en osmose grâce à l’i-Pad, le Fils de l’Hyper-Ecriture mais qui contrairement aux anciens temps, n’est pas unique mais reproductible à l’infini. Je soupçonne Steve Jobs d’avoir copié une vieille légende. Les rois mages des médias ont annoncé depuis leur désert de New York la venue de l’i-Pad il y a trois mois à la faveur d’une fuite. Dans l’ancien temps, Gaspard, Melchior et Balthazar furent guidés par une étoile. En 2010, les journalistes ont été guidés par GPS vers San Francisco, nouvelle Jérusalem de la religion technologique, pour voir le divin i-Pad présenté par son concepteur. Quel couillon cet Attali, il n’a même pas mentionné cette caractéristique de l’objet qui, en économisant du papier, du carburant pour aller dans une librairie ou une bibliothèque, participe à la réduction de l’empreinte carbone du citoyen devenu hyper-lecteur. <o:p></o:p><o:p>
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    Le propre de toute religion est d’engendrer des hérétiques et des mécréants. Alors comme vous l’avez deviné, je me suis chargé de jouer le mécréant qui ne croit pas un instant en l’utilité de cet objet. Rappelez-vous, Moulinex libère la femme ! Ce slogan signifiait que grâce à l’usage des appareils ménagers, la femme gagnait du temps libre. Mais attention, il y avait sans doute une arnaque. Grâce à ce temps libre, la femme pouvait aller travailler pour participer aux revenus du ménage. Avec i-Pad, nul besoin de chercher l’arnaque. Vous êtes croyants ou mécréants. C’est simple, cet objet va servir à une chose, vous faire perdre du temps en rendant esclave votre cerveau, en détournant votre attention à chaque instant pour un zapping monumental vous ramenant à l’état d’un zombie actionnant machinalement le levier d’un bandit-manchot au Casino et remettant mécaniquement les pièces tombées pour continuer à jouer tout en se perdant dans l’anesthésie ludique. On notera que l’i-Pad est en phase avec notre président qui selon le titre d’un livre de Thomas Legrand est un hyperprésident qui nous fait perdre notre temps. Moulinex a libéré la femme, Apple a enfermé l’homme en le faisant domestique d’un objet magique qui lui bouffera son temps de cerveau. Comme l’aurait souligné notre ami spécialiste des leurres, la musique de Bob Dylan constituait un excellent leurre d’appel, Dylan qui selon un bon mot de Bruce Springsteen aurait libéré le cerveau de la jeunesse au temps du Viêt-Nam. Mais en 2010, au temps de l’Afghanistan, l’i-Pad enfermera votre cerveau où que vous ailliez, en vous accrochant à cette tablette qui ne se débite pas en morceaux qu’on mélange à du tabac pour fumer en écoutant du Bob Marley. <o:p></o:p><o:p>
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    La plupart des journaux vantent cet objet, notamment le NYT et Slate. Mais n’y voyez pas quelque conflits d’intérêts liés au fait que l’i-Pad, dans la mesure ou il peut être hyper-connecté à un compte bancaire pouvant être débité pour accéder au haut débit payant de la lecture de journaux en ligne et donc, permettre à ces médias en perte de vitesse de se refaire une santé. Non, ces journalistes sont parfaitement objectifs, comme Attali qui dresse une éloge à l’occasion de ce qu’il appelle un avènement. Attali a certainement téléphoné à son banquier pour lui dire à travers son i-Phone qu’il y a de l’i-Thune à se faire avec l’i-Pad. <o:p></o:p><o:p>
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    Ben voilà, c’est fait, j’ai descendu cet objet mais sans sacrifier mes convictions. C’est certain, je vais passez pour un méchant réac, pour un conservateur, pour un Joseph de Maistre vouant un culte à l’ancien régime du livre papier qui diffusait de la culture et non pas du texte. Car c’est bien là le problème de ce livre électronique. On n’est pas en contact avec une pensée qui se livre au fil des pages mais avec du texte du défile au gré des caprices du lecteur. Allez, Platon, c’est emmerdant, pourquoi s’emmerder à faire l’effort d’entrer dans ces dialogues ésotériques, je vais m’détendre, un coup de zappette exécuté avec ma main s’agitant sur l’écran tactile, et gagné, je peux accéder aux bonnes pages de ce chef d’œuvre littéraire, Moi Jean Sarkozy, mon scooter, mon fils, ma défense !

    Bernard Dugué

    la preuve en images : Ipad


  • Commentaires

    1
    sam95
    Dimanche 30 Mai 2010 à 10:36
    C'est la haine en vers cet objet qui est mystique.

    On peut le trouver sur un magazine papier ton article !
    Je suis prêt à prendre le parie, que d'ici un an au plus tard tu vas en avoir un d'ipad.
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