• Femmes libérées et enchainées

    Femmes libérées et enchainées

    J’ai regardé avant-hier les deux parties du film sur Françoise Sagan, assez académique mais finalement assez passionnant dans ce que cette vie sous-entend et les malentendus qu’elle a créés par sa liberté. Ce que l’on reproche et que l’on fait payer à Sagan toute sa vie c’est finalement de ne pas respecter les convenances exprimées ou non dont celle-ci, amasser un magot pour la retraite, vivre une vie bien tranquille, certes souvent paisible mais qui ressemble plus à de la survie qu’autre chose, ne pas embêter les voisins, ne pas gêner les autres, laisser sa sensibilité au vestiaire. A lire cet texte au premier degré, certains, (certaines ?), seront confortés dans leur opinion à mon sujet, non seulement c’est un crapaud à burettes mais en plus c’est un immonde phallocrate. J’avoue que cela ne me déplait pas de déplaire à une ou deux petites-filles ou filles de « soissantuitards ». Ce n’est pas la première fois que j’écris ce genre de textes en plus, je récidive, car j’avais déjà répondu sur le même ton à Maïa Mazaurette, auteure d’un bouquin décrivant un peu comme Joy Sorman, ou Lolita Pille, de pauvres petites filles riches tentant désespérément de sortir de leur néant et finissant ou seule ou maquée avec le premier venu, ou la première venue (soyons modernes) après avoir fait chauffer la carte bancaire de PapaMaman. On tolère aussi d’un écrivain homme ou femme qu’il ait du succès s’il avoue que c’est pour gagner beaucoup d’argent, or cela Sagan s’en fout, elle écrit pour trois ou quatre personnes, et ce qu’elle gagne lui permet de faire plaisir à son entourage. Aujourd’hui, de moins en moins, certains écrivains en première ligne, surtout français, et la plupart des éditeurs qui veulent surtout faire du pognon, peu comprenne vraiment la gratuité de l’acte d’écrire. Quasiment toute sa vie, elle aura réuni autour d’elle tous ceux qu’elle aimait et à qui elle donnait tout. Son intelligence ne l’empêche pas de sombrer dans des déséquilibres parfois mortifères et de se bercer d’illusions. Elle veut tenter un « beau » mariage mais son mari s’avère être volage et froid. Les déséquilibres ne sont pas le plus grave, et même lorsque l’on va au fond de l’abîme il en est qui espère toujours, parfois en Dieu, contrairement à l’opinion venant d’un croyant chrétien que j’ai pu lire qui veut que vivre comme Sagan ou d’autres c’est faire le choix délibéré du mal. ally-mcbeal-billy-284142.jpgLe malentendu est que beaucoup de femmes ont cru que ces déséquilibres de Sagan, entre autres, était l’expression ultime de la liberté pour toutes les femmes, qui ne sont pas toutes dotées de la même sensibilité ni du même talent. Depuis, elles font des bébés toutes seules, couchent à droite à gauche, pensent qu’elles maitrisent et leur vie et leur carrière alors que ce dont elles rêvent presque toutes c’est d’un prince charmant selon leurs vœux et d’avoir des enfants. On me dira, la réciproque est tout à fait vraie aussi, les hommes découvrant souvent tardivement que les femmes ne sont pas toutes des princesses de contes de fée. Quand elle s’aperçoivent que le prince charmant est un homme ordinaire, elles déchantent, elles en changent parfois, ou elles alternent. Elles n’ont pas souvent le courage de partir sans se retourner comme le fait justement Sagan. Elles restent sous la coupe d’un sale type, elles confondent la plupart du temps la saloperie du sale type avec une forme de rébellion, qui varient ainsi les plaisirs et leur promet qu’il va divorcer ou quitter sa légitime. On les voit parfois à la terrasse des cafés chics, le sale type pérorant, elle buvant ses paroles sans oser ouvrir la bouche, répondant de loin en loin presque avec crainte. Le problème est aussi qu’elles pensent avoir le temps pour commencer à mûrir, et que quand elles croient le moment venu, il est beaucoup trop tard. Trop de rides, trop d’UV et plus du tout d’amour. Alors elles font comme tout le monde, elles prennent un gigolpince quand elles ont les moyens. Elles recherchent aussi leurs amours perdues sur Internet, espérant renouer des liens qui malheureusement sont souvent complètement désintégrés, à cause de leur égoïsme, de leur profond égocentrisme. Sinon elles se justifient, c’est à la faute à la société, à la religion, à leur famille, à leur Oedipe, au monde entier. Elles, elles étaient nées pour être libres. Elles rejettent le mâle, souvent elles finissent chefaillones de services castratrices (elles ont souvent un assistant qui est souvent un garçon sensible et maniéré qui adore les dragons femelles, ça lui rappelle sa mère). Cette affirmation à la liberté de certaines pauvres petites filles riches fait peine à voir quand on pense que la plupart suivent sans aucuns problèmes les diktats de la mode qui leur impose une minceur extrême ou d’avoir le corps qu’elles avaient à douze ans. Si encore toutes avaient le même talent que Yourcenar qui finit avec un jeune homme « beau comme Antinoos » et violent comme n’importe quel plouc de bas étage, ou Sagan elle-même prisonnière chez elle de celle qui prétendait l’aimer et lui rendre service. Ce qui fait qu’on leur pardonne cependant est que les emmerdeuses, les chieuses ont beaucoup de charme...

    par Amaury Watremez (son site) lundi 30 août 2010

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