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  • "Je raconte n'importe quoi, vraiment n'importe quoi, mais pas plus que les autres"

    Dieudonné


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  • (BRUXELLES2) L’aide logistique de certains alliés est mise en avant. Mais elle n’est pas gratuite. A l’envoi de C17 britanniques ou américains devrait succéder la facture ensuite, selon les informations reçues par B2. Les Américains ont ainsi prévenu les Français, l’heure de vol sera facturée. Les Français ont hurlé apparemment (*) Quant aux Britanniques, ils ont demandé en échange – dans le cadre du système Atares – de bénéficier d’heures en échange (1 heure de C17 valant environ 5 heures de C130), des heures calculées selon le mode de calcul (**). Effectivement à l’aune de cet engagement, il vaut mieux recourir à des appels d’offre ou prendre des avions russes ou ukrainiens — des Antonov 24 — qui ne coutent dans le système d’échange Salis que 4 heures de C130 et peuvent emporter deux fois plus d’emport… Qui dit mieux ?

    (*) (Maj) Finalement Washington a renoncé à ces prétentions selon le Wall Street journal

    (**) Effectivement selon les données en vigueur, une heure d’un C130 britannique vaut plus que celle d’un C130 français. Allez savoir pourquoi. Sans doute que les pilotes sont mieux payés dans la Royal Air Force que dans l’Armée de l’air


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  • <time datetime="2013-01-22T12:39:03+01:00" itemprop="datePublished">22 janvier 2013 à 12:39</time> (Mis à jour: <time datetime="2013-01-22T14:36:19+01:00" itemprop="dateModified">14:36</time>)
    20 janvier. Un soldat français porte un masque du jeu vidéo «Call of Duty» à Niono au Mali.
    20 janvier. Un soldat français porte un masque du jeu vidéo «Call of Duty» à Niono au Mali. (Photo Issouf Sanogo. AFP)

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  • « Le jugement éthique porté sur le mécanisme du crédit bancaire s’est profondément modifié au cours des siècles. (...) À l’origine, le principe du crédit reposait sur une couverture intégrale des dépôts. (...) Ce n’est que vers le XVIIe siècle, avec l’apparition des billets de banque, que les banques abandonnèrent progressivement ce principe. Mais ce fut dans le plus grand secret et à l’insu du public (...) En abandonnant au secteur bancaire le droit de créer de la monnaie, l’État s’est privé en moyenne d’un pouvoir d’achat annuel représentant environ 5,2 % du revenu national. »

     

    Maurice Allais, Prix Nobel d’économie 1988, La réforme monétaire 1976

     

    Les récentes déclarations de Michel Rocard au micro d’Europe 1, le 22 décembre 2012, ont relancé une nouvelle fois le débat sur la loi de réforme de la Banque de France de 1973. On ne peut que se réjouir du fait que les citoyens, disons plutôt le pays réel pour être taquin, se soit emparé de la question de la cause de la dette. Qu’en est-il alors réellement ? Cette loi est-elle vraiment la cause de notre dette ? La réponse à cette question est oui. Mais pas pour la raison habituellement invoquée sur ce sujet. Se focaliser sur les avances à taux zéro faites par la Banque de France était une erreur.

    Une thèse remarquable de clarté et de précision de Benjamin Lemoine, « Les valeurs de la dette », soutenue à l’École des mines de Paris le 21 décembre 2011, nous aide à comprendre le rôle de la loi de 1973 dans la politique de la dette française.

    Le financement du déficit lors de la reconstruction : le circuit

    Pour comprendre où la loi de 1973 nous a emmenés, il faut d’abord connaître et comprendre les instruments de financement du Trésor au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Contrairement aux idées reçues, le Trésor n’était pas uniquement financé grâce aux avances de la Banque de France. Ce levier n’en était qu’un parmi d’autres.

    Alors qu’il était en fonction, François Bloch-Lainé, directeur du Trésor de 1947 à 1952, conceptualisa l’idée de « circuit du Trésor ».

    Il s’agissait de construire une véritable « architecture institutionnelle bancaire et financière » pour sécuriser le financement du Trésor, notamment en cas d’insuffisance des avances de la Banque de France (p 73).

    Le « circuit » était donc un ensemble de mécanismes conduisant de nombreuses institutions à déposer au Trésor une partie, voire la totalité des ressources collectées. Les institutions concernées étaient appelées « les correspondants du Trésor ». Parmi elles, on trouve les banques nationalisées, la Caisse des dépôts, les Caisses d’épargne, les collectivités locales et les entreprises publiques et semi-publiques.

    Ce circuit alimentait le Trésor en liquidité par cinq grands leviers (p 76) :

    - La dette à vue : le Trésor pouvait se servir des dépôts qui n’étaient pas à lui, soit ceux de ses « correspondants » ;
    - Les avances de la Banque de France ;
    - Les bons auprès du système bancaire, dit aussi plancher de bon : les banques détentrices d’un compte courant de bons du trésor à la Banque de France, sont contraintes d’emprunter auprès de l’État à des taux d’intérêt fixés par l’État lui-même. Compte tenu de l’inflation de l’époque, le risque de contracter des prêts à intérêts négatifs était important. Pour dire les choses simplement, le « plancher » était une souscription obligatoire. Au terme du processus, les fonds transitaient du compte courant (à la Banque de France) de la banque prêteuse au compte courant du Trésor. La Banque de France jouait donc dans cette pratique un rôle majeure (p 83) ;
    - Les bons souscrits auprès du public ;
    - L’apport de la Caisse des dépôts et consignation.

    De la sorte, donc, le Trésor était continuellement irrigué et le crédit était largement contrôlé par le secteur public. Le déficit quant à lui, était rendu quasiment impossible.

    Par la politique du circuit, François Bloch-Lainé accepta de créer de l’inflation pour stimuler l’expansion économique de la France et, au passage, assurer sa reconstruction. C’est pourquoi deux économistes, Jean-Pierre Patat et Michel Lutfallah au sujet de la période 1946-1951 diront que la reconstruction fut « payée par la monnaie ».

    Malgré son efficacité, ce système antidette ne durera pas longtemps. Il sera progressivement sabordé par une haute administration pantouflarde et une classe politique sous influence.

    La suppression progressive du circuit

    Comme on pouvait s’y attendre, l’oligarchie française ne percevait le circuit que comme une nécessité et un sacrifice conjoncturel qu’il fallait abandonner à la première occasion.

    Quatre personnes semblent avoir joué un rôle décisif dans la suppression du circuit : Georges Wormser (directeur de la Banque d’escomptes), Valérie Giscard d’’Estaing, Jean-Yves Haberer (haut fonctionnaire, futur directeur du Trésor) et Jacques Rueff (qui en 1959 plaida pour l’abandon du circuit afin de limiter l’inflation).

    Ces personnalités pesèrent de tout leur poids pour mettre un terme au circuit. Le cœur de leur bataille se porta sur l’abandon du plancher, qui, pour rappel, obligeait les banques à acheter des bons du Trésor dont les taux étaient fixés par l’État et non par le marché.

    L’entreprise des réformateurs fut cependant entravée pendant plusieurs années à cause d’un obstacle et non des moindres : Michel Pérouse, le directeur du Trésor de 1960 à 1967.

    Celui-ci pensait que le trésor serait mis en péril par l’adjudication (la mise sur le marché de la dette, en somme, les taux d’intérêts seraient décidés par le marché et non plus par l’État) car « cela provoquerait un renchérissement considérable pour le Trésor du coût de ses opérations et se traduirait du même coup, par un enrichissement sans cause pour les banques ». (p 94)

    À cette époque de monétarisme conquérant, où la lutte contre l’inflation devint l’objectif des gouvernements, le circuit ne pouvait avoir qu’’une faible espérance de vie.

    Dès 1963, l’adjudication fut testée pour les souscriptions volontaires des banques, c’est à dire qu’outre la souscription obligatoire de bons dont les taux étaient fixés par l’État, les banques pouvaient souscrire à des bons dont les taux étaient fixés par le marché.

    Dans l’histoire de la mise en place de la domination de l’oligarchie financière, cette méthode des petits pas ne nous est pas étrangère…

    En 1967, Michel Pérouse doit avaler la pilule : les planchers sont définitivement supprimés. Dorénavant, le marché peut fixer les taux d’intérêts des bons du Trésor. Nous sommes six ans avant la loi de 73. Néanmoins, cette mesure ne produit pas d’effets similaires à ceux de notre époque car les autres branches du circuit sont toujours là pour alimenter le Trésor et parce que sous les 30 Glorieuses, les déficits sont moindres que ceux d’aujourd’hui… quand les comptes ne sont pas tout simplement en équilibre.

    Jean-Yves Haberer, haut fonctionnaire, futur directeur du Trésor (pour service rendu ?), rapporte cet échange entre lui et Michel Pérouse, le jour de la suppression du plancher (p 99) :

    « Mais ma trésorerie, mais comment est-ce qu’on va financer le Trésor ?
    – Par les taux ! Vous paierez le taux qu’’il faut. »

    Appuyé notamment, par les banques et une partie de la haute administration, Haberer est clair dans ses intentions, il veut « démanteler le circuit » (p 99) : « c’est-à-dire tous ces mécanismes automatiques, qui faisaient que le Trésor sans bouger le petit doigt, était irrigué de liquidités qui lui arrivaient de tous les circuits financiers français. On va peu à peu l’obliger à vivre comme un emprunteur, c’est-à-dire à se poser les questions de l’emprunteur sur le coût de l’emprunt et le service de la dette. »

    Les ressources ne doivent plus aller au Trésor, le Trésor doit désormais aller les chercher.

    De tout ceci il ressort deux remarques :

    - Les réformateurs ont délibérément poussé le Trésor à emprunter avec des intérêts fixés par le marché ;
    - Les réformateurs savaient parfaitement que l’adjudication conduirait à un renchérissement de la dette.

    Les déclarations d’Haberer nous confirment bel et bien qu’il n’a pas fallu attendre le traité de Maastricht pour que l’’État aille se financer sur les marchés.

    Dès 1969, le Trésor connaît ses premières difficultés de trésorerie, si bien qu’on songe déjà sérieusement à réinstituer le plancher, mais l’administration n’ose pas ce retour en arrière.

    Le démantèlement du circuit est lancé, rien ne doit le stopper. En 1969, Maurice Couve de Murville, Premier ministre du général De Gaulle, commande un « rapport sur le marché monétaire et les conditions de crédit » (p 103). Les trois rédacteurs de ce rapport sont Olivier Wormser, Robert Marjolin (économiste) et Jean Sadrin (haut fonctionnaire). Ce rapport est pour les hauts fonctionnaires du Trésor une « révolution paradigmatique ».

    Leur conclusion est claire : il faut poursuivre la fermeture progressive du circuit. C’est-à-dire que « mise à part l’existence des avances de la Banque centrale, le Trésor ne disposerait plus que de moyens dits “normaux” ou “monétairement neutres” d’alimentation en liquidité, limités à l’émission de bons en comptes courants par adjudication sur le marché monétaire. »

    Ceci est le schéma exact de la future loi de 73. Nous y reviendrons. Notons pour le moment que ce qui gêne les réformateurs n’est pas les avances faites par la Banque de France au Trésor, mais la « dette à vue » et le plancher. Ces deux derniers leviers seront abandonnés de fait dans les années à venir.

    Les critiques (dont l’auteur de ces lignes fait partie, mea culpa) et défenseurs de la loi de 73 avaient tout faux sur l’angle d’attaque de la loi. Il était erroné de centrer le débat sur l’opposition avances à taux zéro de la Banque de France/prêts avec intérêt au marché. Le vrai débat était le financement du Trésor par le circuit ou sans le circuit.

    Cependant, le fond du problème, lui, était bien cerné, puisque était posée la question des conséquences des intérêts imposés par le marché.

    La loi de 73 consacre en droit la fin du circuit

    Il faudra attendre quatre années, suite au rapport sur le marché monétaire et les conditions de crédit, pour qu’une loi consacre le système de financement du Trésor envisagé dans le rapport (adjudication + avances de la Banque de France). Cette lenteur est due à la mésentente entre Olivier Wormser, gouverneur de la Banque de France, et Valérie Giscard d’Estaing, alors ministre des finances. Comme espéré cependant, la disparition du circuit sera consacrée.

    Écoutons l’auteur de la thèse sur le rôle joué par la loi de 73 (p 104) :

    « En 1973, quelques années après l’échec du rapport Marjolin-Sadrin-Wormser une réforme des statuts de la Banque de France traduit dans le droit les transformations du fonctionnement de la trésorerie de l’État. » La loi de 1973 est « l’inscription dans le droit d’un changement des pratiques antérieures peu à peu naturalisées. » (p 107)

    Ce qu’il est important de bien comprendre, c’est que le vice de la loi de 73 n’est pas de mettre un terme aux avances à taux zéro, elle ne le fait pas, mais de mettre un terme au circuit, soit prioritairement au plancher et à la dette à vue. La focalisation sur les avances de la Banque de France était donc une erreur. On ne peut pas comprendre le changement que transpose la loi 73 si l’on ne considère que la question des avances de la Banque de France.

    « La loi de 1973, portant réforme des statuts de la Banque de France, reprend dans l’article 25 une pratique déjà réglée. L’interdiction à l’État de se financer directement, auprès de la Banque de France, en dehors des avances réglementées et rémunérées » (p 107).

    L’honnêteté intellectuelle oblige à dire que l’interdiction de la dette à vue et du plancher ne figure pas dans la lettre de la loi, qui ne parle que de l’’escompte.

    Mais Jean-Yves Haberer, lui, associe bel et bien l’article 25 à la fin de la planche à billets (p 109) : « On a fermé cette porte pour l’obliger à vivre plus dangereusement, en empruntant dehors. » La dette est définitivement détachée des mécanismes de création monétaire publics.

    Alors pourquoi l’article 25 qui ne parle que de l’escompte, est perçu par l’ancien directeur du Trésor comme la fin de la planche à billets ?

    Ici, l’auteur de l’article se risque à une hypothèse. Jean-Yves Haberer ne comprend pas l’usage du terme d’« escompte » dans l’article 25, qui est repris d’une loi de 1936 (p 112). Pour lui ce terme est désuet. L’escompte est de prime abord hors sujet vis-à-vis de l’objet de l’article 25 qui est l’interdiction des grands leviers du circuit.

    Ce que votre serviteur suppose, c’est que l’amendement, l’article 25, dont Haberer souhaitait d’ailleurs la suppression car il introduisait une ambiguïté sur les pratiques du Trésor, a été mal rédigé par le sénateur concerné, qui, comme l’étonnement d’Haberer le traduit, n’avait semble-t-il pas une connaissance technique suffisante des mécanismes de finance publique. Ça ne serait pas la première fois que le législateur se trompe.

    Très probablement, le sénateur a-t-il voulu interdire à la Banque de France de contribuer au financement du Trésor (hors convention d’avances), ou plus précisément, interdire au Trésor de bénéficier des transferts de fonds de compte courant à compte courant, de comptes de la Banque de France. Pour qualifier ces pratiques dans leur globalité, le sénateur n’a rien trouvé de mieux que le terme d’escompte.

    Quoi qu’il en soit, c’est ainsi que cet article a été perçu par la haute administration et la classe politique qui de toute manière, étaient chacune résolues à ne plus recourir au circuit, soit à un système de financement qui nous avait jusqu’alors prévenu de la dette.

    En tout état de cause, la classe politique a trahi

    On ne peut pas faire l’impasse sur le fait que la loi de 73, malgré tous ses défauts, conservait encore un levier de financement du déficit à taux zéro : les avances accordées par la Banque de France (article 19), au titre d’une convention conclue entre la Banque de France et le gouvernement. C’était, on peut dire, un levier du circuit qui était passé à travers les mailles du filet.

    Il semblerait que ces avances n’aient pas eu le rôle que les critiques de la loi de 73 leur ont attribué, et que leur importance ait été grossie au détriment de la dette à vue et du plancher. Cependant, il est indiscutable que les avances étaient un moyen de financement possible du déficit. Les gouvernements, d’ailleurs, ne s’en privèrent pas dans la limite des plafonds prévus par la convention.

    Après la loi de 73, nos gouvernements pouvaient encore user de ces avances et, avec l’accord de la Banque de France, le plafond de ces avances pouvait être augmenté.

    Force est de constater que si la convention de 1973 a été prorogée, son plafond n’a jamais été réhaussé. Le développement du marché obligataire fut préféré. Notre classe politique est donc d’autant plus coupable, car elle a laissé échapper un mal qu’elle pouvait juridiquement conjurer. Ce moyen juridique disparaîtra définitivement avec l’article 104 du traité de Maastricht, qui deviendra l’’article 123 du traité de Lisbonne.

    La boucle sera bouclée. Le circuit sera entièrement liquidé.

    La France avec ?

    Adrien Abauzit


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  • TopSecret1

     

    Docteur en science politique et essayiste.

    Dans notre article Printemps arabes : qui tire les ficelles ?, nous avons cité l’influence de différents protagonistes comme Bernard Lewis, Richard Perle ou encore Ralph Peters prônant la dislocation des pays arabes en une multitude d’entités ethniques et religieuses.

    Nous évoquions le texte d’Oded Yinon, extrait de la revue Confluences méditerranée (n°61, printemps 2007) sous le titre « Une stratégie persévérante de dislocation du monde arabe », acquis lui aussi à un émiettement généralisé de cet ensemble géographique. Pêle-mêle, l’auteur appelle, en 1982, à l’éclatement en trois zones de l’Irak (chiites, sunnites et kurdes) et à une balkanisation complète du Liban, de l’Égypte, du Soudan, de la Libye, de la péninsule arabique etc.

    Pour certains « naïfs », il est impossible qu’un « simple » journaliste israélien puisse élaborer un tel plan. Cependant, précisons qu’Oded Yinon a été rattaché au ministère des Affaires étrangères de l’État hébreu. Est-ce une coïncidence si son programme ressemble étrangement aux événements secouant les pays arabes depuis 2011 ?

    C’est Israel Shahak (1933-2001), professeur de chimie et président de la ligue israélienne des droits de l’homme de 1970 à 1990, qui a levé le lièvre en traduisant en anglais le texte d’origine d’Oded Yinon paru en hébreu dans la revue « Kivunim ».

    Nous avons la chance de posséder un exemplaire de la traduction anglaise paru dans le cadre de « The Association of arab-american University Graduates » (AAUG) publié en juin 1982. Se présentant sous la forme d’un livret de 26 pages 1 – sans compter une présentation par l’AAUG de la politique sioniste et d’un avant-propos sous la plume d’Israel Shahak -, ce précieux document intitulé « The zionist plan for the Middle East » relate précisément la politique prônée par Oded Yinon dans le cadre de la stratégie sioniste.

    L’intérêt majeur de ce document est de souligner que le projet de balkanisation des États arabes est ancien. Israel Shahak, dans son avant-propos, cite le correspondant militaire du journal Ha’aretz, Zeev Schiff, qui, dans son édition du 2 juin 1982, affirmait que la meilleure chose qui pourrait arriver à Israël serait de voir la dislocation de l’État irakien en trois zones (chiites, sunnites et kurdes). Les événements actuels dans le monde arabe doivent réjouir certains du côté des rives du Jourdain.

    Cette politique de dislocation prône aussi, comme le souhaitaient les Pères du sionisme, un « grand Israël » comme le montre cette carte issue de ce document présentant les frontières de l’État hébreu allant du Nil à l’Euphrate. Une chose est sûre : une telle politique ne peut conduire les dirigeants sionistes et les dirigeants arabes qu’à un chaos complet. N’est-ce pas le prix à payer, pour certains, pour atteindre au-delà de ces événements douloureux un nouveau jardin d’Eden ?

    Pierre Hillard, le 21 janvier 2013
    1. Ce livret précise les références parues à l’origine en hébreu qui sont : « This essay originally appeared in hebrew in KIVUNIM (Directions), A journal for Judaism and Zionism ; Issue N°14 – Winter, 5742, February 1982. Editor : Yoram Beck. Editorial Committee : Eli Eyal, Yoram Beck, Amnon Hadari, Yohanan Manor, Elieser Schweid. Published by the Department of Publicity/The World Zionist Organization, Jerusalem. » ↩

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  • Mali Contamination à l'uranium Découvrez les... par marikabel

    Le Mali du nord est en proie aux terroristes islamistes, dont le danger justifie aujourd’hui l’intervention militaire de la France. La population malienne semble y être très favorable si l’on en croit tous les reportages télévisés, comme celui qui suit (ci-dessous), où un intervenant demande même à être recolonisé par la France !

    Mais la guerre actuelle ne doit pas masquer la révolte des Touaregs, en proie depuis des lustres à un autre fléau : l’exploitation de leur uranium par le géant français Areva, sans qu’ils ne voient jamais la couleur de l’argent qui coule à flot de leurs gisements... L’essentiel de la richesse est accaparée par la multinationale, une petite partie par le gouvernement, et presque rien ne va aux populations, qui doivent, en outre, subir les conséquences sanitaires effroyables de cette exploitation de leur sous-sol. 80.000 personnes seraient en danger de mort selon un documentariste français refoulé par les autorités, à cause des nappes phréatiques polluées...


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  • Publié par le 20 janvier 2013

    Crise du Mali, réalités géopolitiques : première partie, par Aymeric Chauprade

    L’intervention du Mali, comme toutes les interventions occidentales depuis la fin de la Guerre froide (de l’Irak jusqu’à la Libye en passant par l’ingérence en Syrie) ne saurait être analysée de manière angélique, sous prétexte qu’elle serait une opération française. Inversement, elle ne saurait être assimilée à toutes les autres opérations parce qu’elle admet en effet ses propres déterminants.

    La guerre au Mali est la confrontation d’une multiplicité d’acteurs :

    1. l’État central malien (Bamako)
    2. les Touaregs indépendantistes de l’Azawad
    3. les groupes jihadistes
    4. l’État français et sa compagnie pétrolière Total (qui est certes une multinationale sur le plan capitalistique mais dont l’action politique reste coordonnée à celle de la France),
    5. l’État algérien avec d’une part son État profond (le puissant DRS, la sécurité militaire, coeur du régime) d’autre part sa société pétrolière étatique Sonatrach
    6. les États-Unis d’Amérique et leur État profond (composé d’éléments de la CIA, du Pentagone, de l’armée)
    7. l’État qatarien et ses intérêts pétroliers et gaziers
    8. deux États voisins, la Mauritanie et la Libye qui ont toujours joué un rôle crucial dans la question touareg.

    Ce sont là les principaux protagonistes de l’affaire malienne. Au second plan, d’autres acteurs chargés d’apporter aux acteurs de premier plan une légitimité en terme de droit international : les autres États africains (la CEDEAO), l’Union européenne…

    Voyons les intérêts et les motivations des premiers rôles qui s’affrontent sur la scène malienne, et pas forcément de manière visible.

    Cette analyse étant longue, j’ai décidé de la découper en deux parties. La première partie tentera d’y voir clair sur les motivations de l’État malien, des Touaregs indépendantistes et des groupes islamistes.

    La seconde partie abordera la question complexe des enjeux pétroliers et gaziers dans la zone (avec notamment les intérêts pétroliers français, qataris et algériens).

    Nous pourrons alors proposer une lecture de la crise qui s’articulera autour d’un bras de fer entre Paris, Alger et Doha pour l’essentiel, avec bien entendu aussi les États-Unis en « embuscade » et qui montrera, une fois de plus, que le terrorisme islamiste est largement instrumentalisé pour consolider ou restaurer les intérêts des principaux acteurs.

    1) L’État malien

    Crise du Mali, réalités géopolitiques : première partie, par Aymeric ChaupradeAfin de présenter l’État malien dans ses caractéristiques géopolitiques je m’appuie sur l’article « Mali » du Dictionnaire de géopolitique (Chauprade/ Thual) lequel date de 1999 dans sa deuxième édition. L’exercice consistant à revenir à ses anciens textes est peu pratiqué en France, et pour cause : s’il l’était, il abîmerait fortement la légitimité de la quasi-totalité de nos commentateurs médiatiques, surtout Olivier Roy, le génial visionnaire de la « fin de l’islam politique » (titre de son essai de 1992) lequel fanfaronnait encore sur les plateaux au début des printemps arabes, en 2011, en expliquant que sa thèse de la disparition de l’islamisme était la bonne et que la masse arabe ne rêvait que de démocratie occidentale… Cela fait penser à Francis Fukuyama s’excusant que la Fin de l’Histoire soit autant retardée depuis 1990 et nous demandant de patienter encore un peu (pour avoir raison)…

    La réalité, qu’elle nous plaise ou non, est qu’une partie importante des Arabes (mais pas forcément majoritaire) veut refonder la politique de leur pays sur les bases de l’islam politique tout simplement parce qu’elle refuse le mouvement global d’occidentalisation des valeurs; et que par ailleurs il convient, par simple honnêteté intellectuelle (et même si à titre personnel nous n’avons aucune sympathie particulière pour ce type de mouvance) de distinguer l’action terroriste jihadique et les partis politiques islamistes (type Frères musulmans). Si nous ne le faisons pas, nous ne comprendrons jamais pourquoi certains États peuvent avoir intérêt à créer des groupes ultra-radicaux se revendiquant de l’islam dans le seul but de décrédibiliser la masse d’un islam politique que je ne qualifierais pas de modéré (parce que cela ne veut rien dire) mais qui pour autant n’emploie pas forcément la violence terroriste comme moyen d’action politique.

    Fermons la parenthèse.

    Cet article « Mali » du Dictionnaire de géopolitique permet de rappeler deux idées essentielles :

    - premièrement la trace de l’action coloniale au Mali : les soldats français de l’opération « Serval » disposent en effet comme référence des « grands anciens de la colonisation » et d’une littérature militaire coloniale de qualité.

    - deuxièmement la coupure raciale qui caractérise le Mali.

    « Le territoire du Mali correspond à l’ancien Soudan de l’Afrique occidentale française (A.O.F.). Ce territoire avait été conquis au XIXe siècle (Faidherbe puis Gallieni, 1880-1895) dans le cadre de la course au Niger menée par les autorités coloniales françaises (…). Sa base territoriale est formée par le bassin du Haut Niger et la boucle du fleuve Niger. Le territoire a subi de nombreuses mutations, à commencer par l’incorporation temporaire de la Haute-Volta (actuel Burkina-Faso) qui sera de nouveau détachée en 1919, puis la rétrocession à la Mauritanie de territoires du Nord-Ouest.

    À l’indépendance en 1958, le Soudan devenu Mali (du nom d’un prestigieux empire mandingue au XIVe siècle) fusionna un temps avec le Sénégal.

    Le Mali est formé d’une partie sahélienne et d’une partie saharienne qui s’articulent sur un bassin fluvial autour duquel irradient d’anciennes routes commerciales. Cette division géographique est aussi à l’origine de la division géopolitique du pays entre une masse de populations négro-africaines sédentarisées et une minorité de nomades qui vivent au Nord et qui occupent une grande superficie. Ces nomades, Touaregs ou Maures, sont entrés en rébellion dans les années 1990. Plusieurs mouvements se sont créés qui ont tous un but commun : la création de l’Azawad. En dépit des différentes tentatives de règlement, la césure sociale et ethnique demeure profonde. Elle s’insère dans les conflits qui secouent la bande sahélienne, de la Mauritanie au Tchad. Les différents mouvements en faveur de la libération de l’Azawad bénéficient du soutien discret de la Libye ou de la Mauritanie (…)

    La parcellisation des mouvements de libération de l’Azawad ne doit pas masquer la profondeur de leur opposition au gouvernement central. La faiblesse de l’unité intérieure du Mali constitue sans doute la caractéristique géopolitique majeure de ce pays« .

    13 ans après que ces lignes aient été écrites, et donc en janvier 2012, revenant de Libye après la chute de Kadhafi (avec lequel ils étaient alliés), les Touaregs du MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad) défont l’armée malienne et proclament l’indépendance de l’Azawad. Mais la lutte séparatiste ancienne menée par le MNLA est très vite débordée par une autre lutte, celle du jihad (lutte qui, en Afrique occidentale, n’a rien de nouveau, bien au contraire : je renvoie à ce propos à mon ouvrage Géopolitique, Constantes et changements dans l’histoire, Ellipses, 2007, p314 à 325 : l’islamisation de l’Afrique noire).

    Trois groupes principaux mènent ce jihad dans la région : Ansar Dine fondé par un leader historique du mouvement touareg, passé à la lutte islamiste ; le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest – MUJAO – et enfin Al Qaïda au Maghreb islamique – AQMI groupe historiquement beaucoup plus algérien puisqu’il est l’héritier du GSPC lui-même héritier des GIA de la guerre civile algérienne.

    Début avril 2012, le MNLA et ces groupes islamistes prennent le contrôle des capitales des 3 régions du Nord-Mali : Kidal, Gao et Tombouctou. Le 6 avril, le MNLA proclame l’indépendance de l’Azawad, ce qui était son but historique. Mais voilà que ce qui était prévisible se produit : l’islamisme submerge le nationalisme touareg, d’autant que le premier est susceptible de trouver bien davantage de soutiens extérieurs que le second. Fin juin 2012, le trio AQMI/MUJAO/Ansar Dine écrase le MNLA à Gao puis à Tombouctou. Commence la triste destruction de mausolées de saints musulmans à Tombouctou (représailles à la décision de l’Unesco de classer la ville patrimoine mondial en péril).

    Mais revenons à Bamako. Le but premier de l’État malien est de reprendre le contrôle du Nord et de se venger des Touaregs en s’appuyant sur la puissance française. C’est évidemment un but politiquement dangereux pour la France. Pour Paris, chasser les groupes islamistes du Nord du Mali ne doit pas pour autant déboucher sur une épuration ethnique anti-Touareg. À mesure que l’armée française va s’approcher de ses objectifs (faire reculer son ennemi) elle va se rendre compte que l’armée malienne qu’elle traîne dans son sillage s’emploiera à se venger sur les populations touaregs et cela risque de devenir un vrai problème à gérer pour Paris.

    Incapable militairement de résister face aux guerriers du désert, l’armée négro-africaine malienne, même aidée par d’autres troupes noires (CEDEAO) se trouve dans l’incapacité de restaurer l’unité du Mali (unité ô combien artificielle, comme nous l’avons vu auparavant) sans l’action militaire de la France.

    2) Les Touaregs indépendantistes du MNLA

    Les Touaregs sont 1,5 millions de nomades du Sahara (origine berbère mais métissage avec des Noirs et des Arabes) vivant sur plus de 2 millions de km2 (Niger, Mali, Algérie, Libye, Burkina Faso), souvent en marge de leur État d’appartenance.

    Au Mali, dans la région de l’Azawad, ils seraient environ 500 000 sur une population de malienne de 6 millions (au Niger les Touaregs sont 850 000 sur une population quasiment identique à celle du Mali soit 16 millions). Ce qui revient à souligner qu’une minorité d’un demi-million est en train d’écraser l’armée représentant la sécurité et les intérêts de 15,5 millions de citoyens maliens noirs ! Qui pourra contester à la France qu’elle se bat bien aux côtés de l’écrasante majorité de la population, laquelle, et c’est un fait établi et difficilement contestable, est attachée à son islam trempé de traditions africaines et refuse le modèle salafiste importé ? Affirmer cela ne signifie pas pour autant nier ou cacher le fait que la France a ses propres intérêts. Hollande dit que la France ne défend pas d’intérêt au Mali, c’est évidemment une plaisanterie (dictée par la sacro-saint principe d’hypocrisie droits-de-l’hommiste), plaisanterie sur laquelle nous reviendrons. Bien au contraire, je serais tenté de dire, de manière un peu provocante, que cela fait bien longtemps que la France mène une guerre pour ses intérêts propres et non pour des profits américains. La France a le droit d’avoir ses intérêts, comme n’importe quel autre État, et de les défendre, du moment que la défense de ses intérêts reste compatible avec la volonté majoritaire des populations concernées et que nous ne sommes pas en train de tout détruire pour nous emparer du pétrole, comme les Américains l’ont fait en Irak en 2003 et comme nous tentons malheureusement de le faire en Syrie, aux côtés des Américains, des Anglais et des Qataris.

    Dans le passé les Touaregs étaient loin d’avoir une position défavorable. Avant la colonisation française, ils étaient même les seuls, avec les Ethiopiens, à disposer de leur propre écriture et ils contrôlaient le commerce caravanier et d’immenses troupeaux. Avant la colonisation française – je renvoie encore à Géopolitique, constantes et changements dans l’Histoire ouvrage dans lequel j’analyse les mécanismes par lesquels la colonisation a abouti à l’inversion des rapports de force entre les ethnies traditionnellement dominantes et celles qui étaient dominées-, ce sont les Touaregs qui razziaient les Noirs d’Afrique et les Maliens redécouvrent aujourd’hui cette vérité. La vérité est que la colonisation a souvent été un cadre pacificateur (on parlait d’ailleurs de pacification) et protecteur pour les ethnies dominées d’Afrique noire. Elle a en revanche été une catastrophe et une perte de puissance pour les ethnies anciennement dominantes. En refusant, par exemple, l’école française de la colonisation, les Touaregs ont créé eux-mêmes, au moment des indépendances, les conditions de leur marginalisation au profit des Noirs.

    Lorsque s’effondre ce cadre de la Guerre froide qui avait gelé tant de conflits identitaires dans les États, les Touaregs relèvent la tête et entrent en rébellion au Niger et au Mali. Finalement en 2009, des accords de paix aboutissent théoriquement à un décentralisation des régions touaregs assortie d’une large autonomie de gestion. Comme ces accords ne sont pas appliqués, plusieurs ex-leaders touaregs qui avaient été intégrés dans l’armée maliennes désertent. Le problème est d’autant plus grave que les Américains (je reviendrai sur ce point capital), dans le cadre de leur coopération militaire anti-terroriste avec le Mali et avec de nombreux autres États de la zone (la Pan Sahel Initiative qui deviendra la TSCI), ont souvent choisi de s’appuyer sur des officiers touaregs – avaient-ils une idée machiavélienne derrière la tête ou agissaient-ils ainsi de manière pragmatique parce qu’ils constataient que les Touaregs sont les meilleurs combattants?

    Dans cette affaire la chute de Kadhafi, voulue et provoquée, faut-il le rappeler, par la présidence de Nicolas Sarkozy en accord avec les Américains et les Anglais, est directement à l’origine de ce qui se passe aujourd’hui au Nord-Mali. Lorsque les forces kadhafistes s’effondrent, les centaines de Touaregs du MNLA qui combattaient à leurs côtés rentrent précipitamment au pays lourdement armés et rallument la flamme combattante du séparatisme. En janvier 2012, la rébellion touareg, dont la composante essentielle est le MNLA, demande explicitement l’indépendance du Nord-Mali et passe à l’offensive.

    Depuis, le MNLA a été dépassé militairement par les trois groupes islamistes (Ansar Dine, Mujao et AQMI) mais il conserve pourtant le gros des effectifs car seule une petite fraction de ses membres a rallié Ansar Dine.

    Aucune sortie durable de la crise n’est en réalité possible sans le MNLA. Une entente doit se faire entre Bamako/Paris d’un côté, le MNLA de l’autre, afin de régler la question islamiste dans la zone. Paris est en position de force car Bamako ne peut plus rien sans les troupes françaises et par conséquent les militaires français doivent s’allier avec le MNLA, composante séparatiste mais non jihadiste des Touaregs, pour chasser les islamistes de la zone. S’ils l’armée française ne sous-traite pas aux Touaregs le « nettoyage » de cet immense espace à la fois désertique et montagneux, elle entrera dans un tunnel sans fin et sans doute plus coûteux financièrement que meurtrier (car militairement l’opération restera beaucoup plus maîtrisable que l’Afghanistan). Ensuite, la France doit se placer en position de médiation entre le MNLA et Bamako. L’affaire est cependant plus complexe qu’il n’y paraît. Il n’existe pas un, mais trois Azawad : le Sud (Songhay et Peuls), le long du Niger, le Nord territoire des Touaregs et l’Ouest saharien arabe.

    3) Les groupes jihadistes

    Il est rapporté que 3 groupes islamistes se trouvent impliqués dans l’affaire du Nord-Mali. Deux groupes qui présentent un caractère identitaire local : Ansar Dine, émanation islamiste radicale du MNLA, le mouvement historique de combat des Touaregs et dont la base originelle est Kidal ; le Mujao (base Gao) ; AQMI qui lui est un ensemble de groupe beaucoup plus algérien et qui s’inscrit dans la filiation GIA/GSPC.

    Mon analyse sur l’islamisme radical et terroriste est bien connue. Pour chaque mouvement identifié et analysé il convient de se poser deux questions :

    1. Quelle est la part locale et la part globale (le lien avec une « internationale » islamiste) ?
    2. Quelle est la part authentique (combattants authentiquement islamistes) et la part infiltrée/fabriquée (groupe infiltré par des services étatiques et dont les actions orientées obéissent à une stratégie de la tension de la part d’un ou plusieurs États) ?

    Nous n’avons pas le temps de refaire ici l’histoire du terrorisme islamiste et celle-ci a d’ailleurs été abondamment traitée. Pour dire les choses simplement, deux lectures s’opposent. Une première lecture, dominante, médiatique est celle qu’Al Qaïda, et plus globalement le « terrorisme international », sont des forces autonomes, obéissant à leur propre agenda, et qui mènent une guerre contre l’Occident. La deuxième lecture (qui est la mienne) considère le terrorisme islamiste comme la combinaison d’un combat authentique (des jihadistes mènent réellement une guerre terroriste contre « l’Occident impie ») et d’une instrumentalisation/manipulation de la part de services étatiques.

    Or, on ne peut comprendre cette deuxième lecture si l’on occulte la dimension mafieuse du phénomène jihado-terroriste. Cette dimension mafieuse est admise dans les deux lectures. Les médias officiels ne manquent pas de souligner en effet qu’AQMI (Al Qaïda du Maghreb islamique) travaille main dans la main avec les cartels colombien et venezuelien pour faciliter l’acheminement par voie aérienne de cargaisons de drogue vers le désert saharien, laquelle drogue repartirait ensuite vers l’Europe. Ils parlent de « Mister Malboro » à propos du terroriste Mokhtar Ben Mokhtar ceci afin de bien souligner son implication dans des trafics de cigarettes. Mais trafics de drogue, cigarettes, et même immigrés clandestins, autant que prises otages sont les diverses facettes d’une économie du crime que contrôlent ces groupes sahariens, dans la droite ligne de la contrebande saharienne la plus ancienne. Rien de neuf sous le soleil saharien.

    En insistant d’ailleurs tellement sur cette dimension mafieuse (laquelle, je le répète, n’est contestée par personne), les médias finissent par nous amener à nous demander ce qui compte le plus pour ces terroristes : l’argent (le trafic) ou le jihad? L’argent mafieux sert-il à financer le jihad ou bien le jihad n’est-il qu’un alibi pour couvrir le trafic? Difficile de répondre mais ce qui est certain est que la confusion entre argent sale et idéologie montre que ces groupes peuvent accueillir en leur sein (et même à leur tête) des infiltrés n’ayant d’autres but que de mettre l’action terroriste en conformité avec l’agenda du service d’État qu’ils servent.

    Ce que je crois, c’est qu’Al Qaïda est un instrument de l’État profond américain qui justifie, depuis la fin de la Guerre froide, une bonne partie de la projection de puissance américaine, et qu’AQMI est le faux-nez maghrébin de cet instrument occulte, mais avec une différence notable avec les autres composantes régionales d’Al Qaïda (Afghanistan, Irak, Yémen…) : l’État profond américain ne contrôle pas directement AQMI. C’est en effet très probablement le DRS algérien, la sécurité militaire algérienne, qui contrôle AQMI. Là encore la démonstration serait longue à donner mais elle existe et elle a été donnée depuis longtemps par des auteurs suisses, britanniques ou allemands mais hélas pas français car en France tout le monde craint l’Algérie et ses coups tordus. J’en profite pour dire que sur ce sujet je suis ouvert au débat mais certainement pas avec les disciples de Glucksmann ou Lévy qui d’un côté ne cessent d’accuser Moscou de terrorisme occulte et de l’autre traitent de complotistes ceux qui ont compris que le premier de tous les « États profonds » était américain!

    À propos du DRS, je renvoie ici notamment aux travaux du britannique Jeremy Keenan, ou bien à l’étude extrêmement pointue « Al Qaïda au Maghreb ou l’étrange histoire du GSPC algérien » par François Gèze et Sallima Mellah (Septembre 2007). Il ne fait aucun doute que les GIA ont été créés durant la guerre civile algérienne, en tant qu’organisation contre-insurrectionnelle, dans le but premier de discréditer, par des crimes atroces perpétrés contre la population, le combat armé d’un Front Islamique du Salut (pour lequel, je tiens à le préciser, je n’ai aucune sympathie, bien au contraire) qui avait gagné les élections. Il ne fait guère de doutes non plus que ces GIA se sont transformés en GSPC après la guerre civile et sont montés en puissance après le 11 septembre 2001, lorsque l’État profond algérien a compris, non seulement que l’État profond américain était derrière Al-Qaïda, mais que si Alger ne voulait pas subir l’agenda américain dans le Sahara, il fallait devancer celui-ci. Le GSPC est né du « magnifique » esprit d’initiative algérien lequel a su offrir aux Américains l’ennemi qu’ils attendaient (jusqu’à prendre en 2007 le nom d’Al Qaïda du Maghreb islamique) pour justifier leur implantation dans le Sahara (implantation au service d’autres intérêts plus classiquement géostratégiques, pétroliers et gaziers, dont nous parlerons après). Au fond, les Abdelrrazak El Para et autres Mokhtar Ben Mokhtar, ces personnages qui ont dirigé actions terroristes et prises d’otages occidentaux, sans jamais se faire prendre et en laissant leurs acolytes se faire tuer à leur place, présentent le même profil qu’Oussama Ben Laden mystérieusement porté disparu en mer. Ils ont d’abord travaillé pour l’État profond de l’État qu’ils se sont mis ensuite officiellement à combattre. Ben Laden fut membre de la CIÀ et quasiment tous les chefs des katibas islamistes du GSPC puis d’AQMI sont d’anciens officiers de l’armée algérienne. Bien formés ces officiers, après avoir infiltré (peut-être créé dans certains cas) les cellules combattantes ont pu en prendre aisément le commandement.

    Une réalité indicible dans nos médias, du fait de l’ampleur des intérêts économiques français en Algérie, de la collusion aussi des élites politiques françaises avec le régime algérien (il fallait voir encore récemment le ministre Valls louer l’efficacité des forces spéciales algériennes…)… mais une vérité pourtant depuis longtemps évidente en dehors de France: AQMI/Polisario, DRS algérien le trafic de drogue saharien sont une seule et même organisation du crime dont le but est double : l’enrichissement personnel des généraux algériens bien sûr lesquels supervisent le trafic de drogue réalisé par les chefs terroristes ; mais aussi la survie du régime (laquelle va de paire avec le premier but) en faisant de celui-ci l’incontournable rempart contre le fondamentalisme, un rempart que la vague de révolutions arabes ne saurait attendre, et qu’elle n’atteindra d’autant moins que les Occidentaux (en premier lieu Américains et Français comprendront qu’il n’y a d’autre alternative crédible que le maintien du régime algérien). Or ce régime est une calamité pour la jeunesse algérienne, privée d’avenir, au chômage à 40%, volée par son « élite » de ses richesses fabuleuses (rente gazière et pétrolière), et par voie de conséquence une calamité pour la rive nord de la Méditerranée (Europe) qui, inéluctablement, verra fondre sur elle des candidats à l’immigration de plus en plus nombreux. Une politique de courte vue de plus de la part des dirigeants européens!

    Grâce au GSPC et à AQMI, l’État algérien a pu apparaître depuis 2001, aux yeux des États-Unis et de la France (pour le grand public du moins, car dans les structures de pouvoir personne n’est dupe) comme un rempart contre l’islamisme radical dans la région. Et la stratégie a fonctionné, jusqu’aux révolutions arabes qui ont emporté les uns après les autres (Tunisie, Egypte, Yémen) tous les régimes autoritaires « laïcisants » (terme à prendre avec extrême précaution s’agissant de pays musulmans), avant que l’Occident ne s’en prenne ensuite directement à ceux qui ne tombaient pas d’eux-mêmes (Libye, Syrie). Donc pour le DRS cela ne faisait pas l’ombre d’un doute, l’Algérie était la suivante sur la liste, à moins d’écarter l’Occident du sillage des islamistes politiques (ceux qui allaient devenir majoritaires dans de nombreux pays à la suite de l’écroulement des régimes forts) et de le ramener à la « grande époque » de la guerre contre le terrorisme international.

    Parmi ces trois groupes islamistes agissant au Mali, si l’on me demandait « qui contrôle qui », je répondrais que le DRS contrôle d’abord AQMI tandis que le Qatar finance et a de l’influence sur les deux autres mouvements (MUJAO et Ansar Dine) avec des buts radicalement différents de l’Algérie comme nous le verrons dans la deuxième partie.

    Un autre élément qui n’est pas souligné est qu’au moins deux de ces groupes (le MUJAO c’est certain, AQMI c’est probable) ont des contacts forts avec le POLISARIO, mouvement séparatiste sahraouï soutenu basé dans les camps de Tindouf (territoire algérien). Il est quasiment avéré en effet que le groupe de terroristes qui s’est emparé du site gazier d’In Amenas en Algérie venait des camps de Tindouf, autrement dit qu’il est bien parti du territoire algérien (et ceci bien que l’Algérie ait pointé du doigt la Libye). Là encore il s’agit d’une réalité sur laquelle je tente d’alerter au moins depuis 2005, à travers les différentes interventions que j’ai faites à la tribune de l’ONU, en tant qu’expert mandaté par la partie marocaine, rôle que j’assume pleinement tant je crois au bien fondé historique de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental – mais une souveraineté « intelligente » dans un cadre d’autonomie élargie.

    Le glissement progressif (comparable à celui du MNLA) du mouvement Polisario non seulement vers la criminalité (trafics en tous genres) mais aussi vers le fondamentalisme religieux devrait être une source de préoccupation pour les pays occidentaux. Nombreux sont les événéments, depuis 2005, dans cette sous-région du Sahara, qui montrent des liens entre certains éléments du Polisario et Aqmi/Mujao. C’est le moment de rappeler d’ailleurs que les problèmes non résolus de séparatismes (Sahara occidental et Touaregs) finissent malheureusement par dégénérer en problèmes d’islamisme radical.

    Seule une solution équilibrée consistant à défendre la souveraineté des États (Mali, Maroc, Niger…) mais en aménageant des autonomies réelles pour les minorités nomades pourra permettre de ramener la stabilité dans la région.

    Pour comprendre les motivations des autres acteurs, il convient aussi de parler des enjeux de ressources (pétrole, gaz, uranium). Autant les États-Unis en effet, que la France, le Qatar ou l’Algérie ont des visées pétrolières et gazières importantes dans le Sahara. Chacun de ces États a intérêt à favoriser la situation géopolitique la plus à même de le placer en position de force dans les discussions relatives au partage des richesses.

    Nous analyserons dans la deuxième partie ces enjeux pétroliers et gaziers et affinerons notre analyse des intérêts français, algériens, qataris, américains, mauritaniens et libyens dans la crise actuelle.

    Fin de la première partie

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