Après la Grèce, l'Espagne ? Le volume des capitaux retirés d'Espagne par les investisseurs pour être placés à l'étranger a atteint un niveau record au premier trimestre, atteignant 97 milliards d'euros, selon les chiffres publiés jeudi par la Banque d'Espagne qui reflètent l'inquiétude que suscite l'économie du pays.
Lire : Les banques grecques font face à des retraits massifs depuis deux ans
Ce chiffre marque un record depuis le début de la série statistique, lancée en 1990, et signifie qu'investisseurs espagnols et étrangers ont préféré se tourner vers l'extérieur pour placer leurs fonds. En comparaison, au premier trimestre 2011, l'Espagne avait enregistré un solde positif de 20,89 milliards d'euros de sa balance financière, qui n'inclut pas les placements de la Banque d'Espagne.
DAVANTAGE DE SORTIE DE CAPITAUX EN MARS
Pour le seul mois de mars, la sortie des capitaux s'est accentuée, l'Espagne enregistrant là aussi un record avec une fuite nette vers l'étranger de 66,2 milliards d'euros, contre un solde positif de 5,38 milliards en mars 2011.
Au premier trimestre, ce sont avant tout les opérations interbancaires qui plombent la balance financière. Ainsi, les investisseurs aussi bien étrangers qu'espagnols ont retiré 75,76 milliards, notamment en prêts et dépôts, pour les investir à l'étranger. Les investisseurs ont également retiré 34,38 milliards d'euros placés dans les portefeuilles, d'actions et de titres de dette du pays, pour les transférer à l'étranger.
INQUIÉTUDES AUTOUR DU SECTEUR BANCAIRE
L'inquiétude autour du secteur bancaire est alimentée par les incertitudes autour du plan de recapitalisation de la quatrième banque du pays, Bankia, à hauteur de 23,5 milliards d'euros. Madrid a indiqué avoir l'intention de recourir au Fonds de restructuration bancaire (FROB), mais la Commission européenne lui a demandé de préciser ses projets.
En outre, la majorité des banques espagnoles, soit 70 %, vont passer les tests de résistance menés par le Fonds monétaire international (FMI), a déclaré jeudi le ministre espagnol de l'économie, Luis de Guindos. Le résultat de ces tests indiquera comment ces établissements de crédit, confrontés à des prêts immobiliers toxiques en raison de l'éclatement de la bulle immobilière en 2008, vont se comporter si l'activité économique continue à se contracter.
Bankia représente "un gros pourcentage" de ces 30 % d'établisssements qui "ont le plus de difficultés", a reconnu le ministre de l'économie. La banque espagnole avait demandé vendredi dernier une aide publique de 19 milliards d'euros. En ajoutant la première injection d'argent frais déjà réalisée, le sauvetage atteint 23,5 milliards d'euros, un record historique en Espagne.
Le FMI a indiqué pour sa part n'avoir aucun projet d'assistance financière à l'Espagne et assure que ses équipes ne travaillent pas sur un tel scénario. L'institution précise que Mme Lagarde répondait ainsi à un article publié dans la journée par le Wall Street Journal affirmant que le département Europe du FMI avait "commencé à discuter de plans de secours en vue d'un prêt de sauvetage à l'Espagne dans le cas où le pays ne parviendrait pas à trouver les fonds nécessaires au sauvetage de Bankia".
INTERVENTION DE LA BANQUE MONDIALE
Ce vendredi, le président de la Banque Mondiale s'est exprimé en faveur d'un soutien à l'Espagne pour parer à toute aggravation brutale de la crise. Dans une tribune publiée vendredi dans le Financial Times (article payant), Robert Zoellick estime que "les leaders de la zone euro doivent être prêts. Il n'y aura pas le temps de réunir un sommet des ministres des Finances (...) Sur des marchés paniqués, les investisseurs fuient vers la sécurité en répandant les flammes".
L'importance du danger "devrait encourager les leaders de la zone euro à prendre des mesures de précaution - telles que mettre maintenant des capitaux du Mécanisme européen de solidarité (MES) dans les banques et tomber d'accord sur un mécanisme de financement à moyen terme de pays tels que l'Espagne", selon M. Zoellick, qui estime que ce mécanisme pourrait venir du MES ou se faire par d'éventuels euro-obligations, actuellement rejetés par l'Allemagne.