• Avis de tempête en Grèce

    par Dimitri Gianniodis

    Une nouvelle tempête souffle sur la Grèce. Cette tempête porte un nom, le peuple. Elle ne se limite plus aux anarchistes et jeunes universitaires de la « Génération 600 euros » qui ont fait couler beaucoup d’encre dans la presse alternative, en décembre 2008. Comme le témoignent les derniers événements survenus en ce mois de mars 2010, les honnêtes travailleurs grecs refusent de se plier au projet de loi intitulé « Mesures d’urgence pour faire face à la crise financière ». Dans ces conditions, qu’en sera-t-il dans les autres pays du PIIGS ? Est-ce que de nouvelles cellules tempétueuses vont s’y créer en provoquant le risque de recouvrir toute l’Union européenne ? Est-ce que pour sauver l’euro, le Portugal, l’Irlande, l’Italie, la Grèce et l’Espagne vont être contraints de « restaurer la souveraineté monétaire » ou l’humanité approche à grands pas d’un nouvel ordre économique mondial ? Nouvel épisode de la récession économique mondiale au berceau de la démocratie.

     
     

     

    Geórgios Papandréou, Premier ministre de la Grèce et président du Mouvement socialiste panhellénique (PASOK) et de l'Internationale socialiste (IS)

     

    Mesures de pillage du peuple grec

    Les mesures d’austérité du gouvernement socialiste grec, portent sur 4,8 milliards d’euros, dont la moitié proviennent d’une augmentation des recettes de l’Etat et l’autre moitié d’une réduction des dépenses.

    Dans le détail, les mesures concernant les recettes (hausse de 2,4 milliards d’euros) :

    1) Hausse de deux points du principal coefficient de la TVA de 19% à 21% (pour les autres coefficients de la TVA, de 4,5% à 5% et de 9% à 10%), ce qui doit rapporter 1,3 milliard d’euros, soit 0,55% du Produit intérieur brut (PIB).

    2) Hausse des taxes spéciales sur la consommation: alcool (+20%), tabac (+63% à 65%) et carburants (+8 centimes d’euro par litre d’essence et +3 centimes par litre de diesel), et nouvelles taxes sur des produits de luxe (i.e. voitures de plus de 35.000 euros, yacht, hélicoptères privés). La hausse des taxes spéciales sur la consommation doit rapporter 1,1 milliards d’euros, soit 0,45% du PIB.

    Celles concernant les dépenses (réduction de 2,4 milliards d’euros) :

    1) Réduction de 30% du 13e mois et de 60% du 14e mois de salaire touchés par les employés du secteur public.

    2) Réduction de 7% des revenus et des primes des entreprises publiques et organismes financés par l’Etat.

    3) Gel des retraites des salariés des secteurs public et privé.

    4) Réduction de 10% du financement par l’Etat des caisses de retraites de l’entreprise publique d’électricité (DEI) et de l’opérateur grec des télécoms (OTE).

    Ces quatre mesures représentent des économies de 1,7 milliard d’euros, soit 0,7% du PIB.

    5) Réduction de 5% du programme des investissements publics, soit 500 millions d’euros.

    6) Réduction de 200 millions d’euros du programme d’investissements et de nouveaux programmes prévus pour le ministère de l’Education.

    Rappel des faits pour ce deuxième jour de grève générale, jeudi 11 mars 2010

    Les mesures d’austérité imposées tacitement par l’Europe et proposées par le gouvernement socialiste du Pasok ont provoqué beaucoup de mouvements ces derniers jours.

    Manolis Glezos, membre de la résistance durant la Seconde Guerre Mondiale et activiste politique de la Coalition de la Gauche radicale (SYRIZA)

    La semaine dernière, lors d’une manifestation à Athènes, Manolis Glezos un activiste d’extrême gauche de 80 ans, celui-même qui avait décroché le drapeau nazi de l’Acropole en 41 a été gazé par les forces de police. Suite à un silence relativement long à ce sujet, un porte-parole de la police a maladroitement introduit l’intervention probable des forces de police européennes (qui jusqu’alors n’étaient jamais intervenues) si la situation venait à empirer…

    Hier, l’anarchiste Lampros Fountas a été abattu de deux balles dans le dos par ces mêmes forces de police dans la région de Dafni lors d’échanges de tirs. Cela ne facilite pas la communication, comme vous pouvez l’imaginez.

    Les groupes sur Facebook et les articles sur WordPress qui appellent à l’insurrection sont nombreux.

    On peut lire des slogans comme « Le sang coule, il réclame vengeance ! » ou « ça sent le Décembre ! » en référence aux premières émeutes qui ont eu lieu en décembre 2008, en plus des traditionnels : « Condés, cochons, assassins ! » (ΜΠΑΤΣΟΙ ΓΟΥΡΟΥΝΙΑ ΔΟΛΟΦΟΝΟΙ)…

    Ci-dessous les premiers faits chronologiquement rapportés :

    Les grèves se sont principalement déroulées à Athènes et Thessalonique, bien que l’on compte 2000 personnes en Crète, 1500 à Giannena et quelques actions de moindre envergure dans les îles. Selon BBC, on dénombre plus de 40 000 manifestants sur l’ensemble du territoire.

    Les transports féroviaires, maritimes et aériens sont bloqués, une seule ligne de métro est en fonction à Athènes. La quasi-totalité des médias sont en grève, le pays est donc privé d’information. Les hopitaux tournent en effectifs réduits.

    A Thessalonique, la manifestation a commencé au centre ouvrier avec un nombre approximatif de 3000 personnes. Une trentaine de camarades ont entamé l’expropriation de deux supermarchés. Les denrées ont été partagées. A l’Atlantik, les responsables du magasin essayèrent de fermer les devantures mais les camarades les en empêchèrent et l’expropriation put avoir lieu normalement. A Egnatia, les biens appartenant au Mont Athos ont été brisés, les bâtiments Vodafone, Atm, banques et Goody’s (fast food) ont été saccagés. Les policiers ont comme par habitude répondu par des gaz lacrymogènes. La manifestation ne s’est pourtant pas dispersée. Elle a pris de l’ampleur jusqu’à former une masse de 6000 hommes et femmes… D’autres chiffres rapportent un nombre de 14 000 manifestants.

    A Athènes, les MAT (équivalent des CRS) ont tenté de séparer les différentes délégations de la manifestation par des gaz lacrymogènes avant même qu’elle ne se forme complètement. La raison de tout cela serait selon certains de laisser le libre passage à la délégation du plus grand syndicat de travailleurs en Grèce (ΓΣΕΕ, 1 million d’adhérents), dont le président s’est fait entarter il y a trois jours. Des explosions ont été entendues un peu partout, des vitrines de banques et autres magasins multinationaux ont été brisées. On dénombre un certain nombre de blessés, les policiers en moto ont percuté plusieurs manifestants, et ont procédé à une vingtaine d’arrestations , dont neuf à charge (une loi récente interdit le port de la cagoule).

    cocktail molotov sur son casque. 

    Bonne soirée à tous, et rappelez-vous que nous sommes tous Islandais , Grecs, espagnols, portuguais, italiens, dans cette histoire.


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  • Euro : Implosion ou sursaut ?
     
    par Jean Claude Werrebrouck
     
    9 février 2010

    Nous avons souvent comparé la monnaie unique à un lit de Procuste. D’une humeur sans doute plus débonnaire, l’économiste Jean Claude Werrebrouck choisit de filer la métaphore vestimentaire. En matière monétaire, nous sommes passés, écrit-il, de la haute couture à un prêt-à-porter gênant aux entournures les corpulences disparates des membres de l’Union. Mais loin d’inciter à une hypothétique convergence comportementale, cette cote mal taillée a au contraire incité les nations à rechercher des niches compatibles avec leurs dispositions, accroissant l’hétérogénéité au sein de l’Union. Cette crise prévisible d’une union monétaire « non optimale » comme la nomment les économistes, pourra-t-elle être surmontée ? Pour ce faire, M. Werrebrouck estime que les Etats devraient adopter une stratégie coopérative de « keynésisme inflationniste », qui seule permettrait « d’extirper l’Europe du double étau des taux de change trop élevés et des montagnes de dettes publiques produites par la gestion de la crise. »

    par Jean Claude Werrebrouck, 28 janvier 2010

    En lançant l’idée de monnaie unique, les entrepreneurs politiques européens sont passés de la haute couture au prêt à porter. Les monnaies nationales étaient jadis le reflet du vécu d’un peuple et d’une culture. L’histoire de ces monnaies avec leurs hauts et leurs bas, avec les variations de leurs qualités : niveau de convertibilité, espace de circulation, taux de l’intérêt, taux de change, inflation etc., était aussi l’histoire de leur peuple utilisateur. Le DM correspondait bien à l’histoire tumultueuse allemande. Le franc correspondait bien à l’histoire toute aussi tumultueuse de la France, etc. Bref la monnaie nationale était le vêtement haute couture d’un peuple ou d’une nation.

    Haute couture et prêt à porter.

    Le passage à l’euro devait changer la donne puisqu’il s’agira de construire un vêtement acceptable par des peuples et nations fort dissemblables : Désormais le « grand mince » se devra de porter le même vêtement que le « petit un peu rond ». La haute couture disparait.

    C’est cette question fondamentale du vêtement commun qui va envahir la littérature économique sous la rubrique thématique de « zone monétaire optimale ». Et il est vrai que les différences entre le « grand mince » et le « petit un peu rond », s’énoncent en termes de régimes démographiques, de niveaux de développement, de fiscalité, de dépenses publiques, de structures industrielles, de poids des échanges extérieurs, d’inflation, de gains de productivité, de dépenses de recherche, de systèmes politiques, de caractéristiques culturelles, etc. Et évidemment la liste des spécificités n’est pas limitative....Encore plus de différences que celles séparant le « grand mince » du « petit un peu rond »

    Et puisque les entrepreneurs politiques ne disposaient pas d’une zone monétaire optimale lors de l’ouverture du chantier, le pari était que cette optimalité devait plus ou moins s’auto construire, auto construction résultant des bienfaits évidents de la monnaie unique. Avec le premier d’entre eux : une accélération de la croissance économique de la zone. Mais comment courir plus vite, avec un vêtement qui comprime le corps et les membres du « grand mince », et fait trébucher le « petit un peu rond » ?

    La suite est davantage connue : croissance durablement plus faible que partout dans le monde, et surtout maintien, mais davantage encore, aggravation de la plupart des hétérogénéités. Plus récemment, sous l’impulsion de la crise, le spread de taux sur la dette souveraine qui avait quasiment disparu est devenu fort problématique. Prés de 3% disions-nous dans un article du printemps dernier, plus de 3% aujourd’hui.

    Parce qu’il existe naturellement des « grands minces » et des « petits un peu ronds », il existe naturellement des taux d’intérêts - assez bons indices rassemblant toutes les disparités - qui sont eux mêmes différents. La monnaie unique, introduit la fin du taux sur mesure, pour introduire le prêt à porter : désormais existera un taux moyen, celui fixé par la BCE.

    Le « petit un peu rond » , déjà peu adapté à la course, se rattrapait- au moins partiellement- par la légèreté de sa monnaie qu’il dévaluait en permanence, ce qui permettait le maintien relatif de son industrie. La faiblesse des gains de productivité, était compensée par une monnaie fondante .Il restait pourtant moins performant que le « grand mince », car la monnaie fondante était naturellement associée à un taux d’intérêt plus élevé. Le « grand mince », bénéficiant de son adaptation à la course, pouvait maintenir un taux de change élevé associé à un taux d’intérêt bas. La gêne procurée par les dévaluations de ses partenaires, restant dans les limites du supportable.

    Avec un taux d’intérêt désormais unique- donc taux moyen qui est une baisse pour le « petit un peu rond », et une hausse pour le « grand mince »- et un taux de change qui n’est plus individuellement manipulable, les choses vont changer.

    Et tous devinrent passagers clandestins.

    Taux de l’intérêt plus faible, et taux de change bloqué, voila ce qui attend le « petit un peu rond » qui sera désormais victime croissante de sa sous- productivité. La balance commerciale, va rapidement se dégrader sous la poussée de l’une et de l’autre cause : le crédit peu cher, gonfle l’endettement et la consommation de produits importés eux-mêmes peu onéreux. Quant à l’investissement, ses flux sans doute croissants, se porteront plus volontiers sur l’immobilier à débouchés internes, que l’industrie, à débouchés externes limités par la sous -productivité et le taux de change devenu inadapté. Bref, le « petit un peu rond » s’offre une véritable monnaie de réserve à l’américaine : il peut dépenser sans compter, c’est-à-dire sans la menace de la dévaluation de jadis...

    Ce qui attend le « grand mince » est fort différent. Son taux de l’intérêt est plus élevé, ce qui ne facilitera ni la consommation ni l’investissement : il risque de courir moins vite. Sauf qu’il reste très compétitif par ses gains de productivité. Il peut, par conséquent, bénéficier pleinement de la croissance du marché mondial impulsée par celle des émergents. Les profits normalement diminués de la rente de l’intérêt sur les marchés nationaux, seront moins pénalisés à l’exportation : la croissance des exportations, est plus rapide que la croissance domestique. A l’interne, moins de crédits à la consommation et moins de spéculation immobilière. Le prix du logement évolue peu. Le vrai gain du « grand mince » -que la nature n’avait pourtant pas mal doté- est surtout la garantie qu’il a maintenant, de ne plus être gêné par les « petits un peu ronds » qui avaient la mauvaise habitude de compenser leurs inefficacités par des dévaluations peu coopératives.

    Le nouveau vêtement monétaire est inadapté pour tous les partenaires.... qui pourtant ne vont pas s’en trouver plus mal en temps de non- crise : si le vêtement n’est pas adapté au corps, les corps vont s’adapter au vêtement. Le « petit un peu rond » se désindustrialise, s’endette, se trouve livré à la spéculation immobilière, mais encore une fois, il vit le rêve de la monnaie de réserve à l’Américaine.

    Le « grand mince » ne se désindustrialise pas, développe son hyper-compétitivité -d’autant plus vite que « les petits un peu ronds » ne peuvent plus opposer la barrière de la dévaluation- et connait un environnement immobilier non spéculatif.

    Tout ceci revient à dire que la monnaie unique-le vêtement unique -ne rapproche pas les acteurs, mais les éloigne dans des postures creusant les différences. Depuis 10 années, les spécialistes scrutateurs des signes de convergences économiques, constatent et répètent que de nouveaux efforts doivent être consentis, pour aboutir à ce qui ferait de la zone euro une « zone monétaire optimale ». Convergence impossible puisqu’aussi bien, le « grand mince » et le « petit un peu rond » se sont faits passagers clandestins de la zone. Le « petit un peu rond » aime le navire en ce qu’il voit dans l’euro une drogue bien douce. Le « grand mince » aime le navire qui confirme chaque jour une hyper- compétitivité qui n’est plus menacée par les risques monétaires : les exportations dans la zone sont garanties. Les deux sont sur le même navire, ne se disent rien- les économistes parlent de stratégies non coopératives- en ce qu’ils sont tous passagers clandestins. Le pari de l’euro était de construire une zone modèle. En exacerbant les différences, on affirme, voire on crée, et on enkyste des différences : modèle Rhénan pour l’Allemagne ; modèle anglo saxon pour l’Irlande ou l’Espagne, etc.

    Lorsque la crise financière devient crise économique, et que les Etats s’épuisent à maintenir les demandes globales en creusant de façon historique les déficits publics, c’est le navire tout entier qui est menacé par l’élargissement des spreads de taux. Le taux moyen était celui fixé administrativement par la BCE. Les taux d’intérêt sur les dettes souveraines sont, elles, fixées par le marché . Là où il y avait bulle spéculative, notamment immobilière, les choses seront plus graves que là où les bulles étaient relativement inexistantes : la crise sera plus grave chez le « petit un peu rond », relativement moins grave chez le « grand mince ». Le premier verra son déficit public augmenter beaucoup plus rapidement que le second. D’où les écarts qui mesurent l’inégalité des soutenabilités de la dette.

    La suite de l’histoire qui s’écrit présentement, ne peut toutefois être comprise sans la compréhension préalable des mécanismes qui ont engendré l’euro.

    Passagers clandestins ou entrepreneurs politiques ?

    On ne rappellera pas ici que les groupes, exigeant la libération complète des échanges et du mouvement des capitaux, se sont partout manifestés très tôt, vis-à-vis des entrepreneurs politiques nationaux. A peine de marginalisation sinon de non- reconduction au pouvoir, les entrepreneurs politiques français furent amenés- dès la fin de la période de reconstruction- à libéraliser et à entrer dans la mondialisation. Il est même possible de dater l’entrée officielle de la France dans cette dernière, puisque c’est le 15 mars 1983 qu’est décidé le maintien du franc dans le « serpent » et le renoncement par le groupe au pouvoir, à toute autonomisation du pays vis-à-vis des forces du marché. Nous avons également vu, que ce renoncement était aussi un renoncement monétaire (cf : La crise, scénario pour 2010)

    Lorsque tout fût libéralisé (début des années 80), les entrepreneurs politiques français ont pris conscience des risques potentiels liés au retour de la Grande Allemagne. Jusque là, les déficits budgétaires, qui représentaient le coût de l’achat des voix sur le marché politique, s’évaporaient facilement par l’inflation, ce que nous appelions la répudiation douce de la dette dans l’article précité. Libéraliser était un moyen d’acheter des voix, mais les conséquences de la libéralisation et d’une Allemagne réunifiée et sur- puissante sur le marché des changes et le taux de l’intérêt, voient le coût de cet achat augmenter dangereusement. La répudiation douce (inflation), se trouve combattue par des taux d’intérêts « durs », que l’on ne peut plus maitriser comme par le passé en raison de la perte de contrôle monétaire. La dépréciation traditionnelle du taux de change, difficile à évaluer en termes de gains et de pertes de voix sur les marchés politiques, est compensée par des taux d’intérêt qui accroissent considérablement le coût de la dette souveraine. Le DM, en devenant la monnaie phare de l’Europe, va gêner la pérennisation du modèle keynésien inflationniste de cette variante du « petit un peu rond » qu’est la France. Plus clairement encore, l’achat de voix par déficit budgétaire devient une opération qui n’est plus sans contre partie.

    L’euro est donc une construction politique, ou un navire pour passagers clandestins. L’euro, en offrant un taux de l’intérêt autrement plus faible, permet de pérenniser les déficits budgétaires à coût réduit pour les entrepreneurs politiques. Sans doute les voix achetées sur les marché politiques ne sont- elles pas semblables, les entrepreneurs dits de « droite » achetant plutôt avec une monnaie appelée « mesures fiscales », et ceux dits de « gauche » avec une monnaie appelée « avantages sociaux » ; elles correspondent néanmoins à un déficit budgétaire. Cette donnée fondamentale explique qu’il y a eu historiquement, cartellisation des grandes entreprises politiques françaises vantant d’une même voix les mérites de l’Euro. Cartellisation d’un côté, et barrières à l’entrée très élevées sur le marché politique, devaient assurer le succès de la construction.

    Bien évidemment, les entrepreneurs politiques allemands, n’ont pu accepter l’euro que sur des bases ne mettant pas en cause le consensus politique du moment. D’où les fameux critères de Mastricht qui théoriquement annulent les avantages de l’euro pour les entreprises politiques françaises. Les marchés politiques étant de court terme, la dépréciation du futur y est forte. Les « petits un peu ronds », et leurs entrepreneurs politiques, ont bien perçu les avantages immédiats ...tout en se disant que les inconvénients des critères de convergence, pourraient être un jour renégociés, voire oubliés. Et effectivement, l’histoire devait montrer que les fameux critères deviendront vite un objectif éloigné, avec des contrevenants qui seront rapidement majoritaires à l’intérieur de la zone.

    Sans doute ce « grand mince » qu’est l’Allemagne, connaitra-il l’inconvénient d’un taux de l’intérêt sur l’euro plus élevé - parce que pollué par les « petits un peu ronds »-que le taux sur lequel rayonnait le DM, mais offrir une monnaie de réserve à l’américaine, à des clients importateurs avides, n’est pas dénué d’avantages.

    Les entrepreneurs politiques peuvent-ils quitter le navire ?

    Il est inutile de revenir sur l’élargissement des spreads qui résultent des coups de boutoir de la crise. Globalement les « petits un peu ronds » sont très malmenés, et plus encore les variantes les plus consommatrices des bienfaits de la monnaie de réserve à l’Américaine, ceux qu’on appelle parfois les pays du « club med ». Les spreads lourds qui frappent ces « petits un peu ronds » signifient la relative disparition de la rente monétaire : La monnaie de réserve n’est plus ce qu’elle était, et les taux qui s’élèvent sont le fantôme de la monnaie nationale qui bien que disparue rôde encore. Plus clairement : la valeur électorale de l’euro diminue. Et il devient de plus en plus difficile d’acheter des voix avec des déficits accrus.

    Les entrepreneurs politiques au pouvoir en Grèce, présentent des plans d’assainissement qui ne jouissent d’aucune crédibilité : passer d’un déficit public de 12,7% du PIB en 2009 à 3% en 2012, compte tenu des effets récessifs de la diminution de la dépense publique, de la hausse de la fiscalité, de la sous compétitivité industrielle, de la faiblesse de la croissance des économies partenaires, et surtout de l’envolée extrême du coût de la dette, est rigoureusement impossible. Sans changement des règles du jeu, la Grèce, mais aussi sans doute nombre de « petits un peu ronds », sont définitivement plongés dans la trappe à dettes. Cela signifie par conséquent, que l’actuel bon fonctionnement du marché de la dette souveraine grecque, repose sur l’hypothèse de l’aléa moral. Par exemple l’apport potentiel de garanties par les autres pays de la zone, ou l’hypothèse de centralisation de la gestion de la dette, au niveau de l’ensemble de la zone, voire l’intervention du FMI.

    C’est qu’il sera très difficile aux entrepreneurs politiques de prendre la décision de quitter le navire, même si la valeur électorale de l’euro est en très forte baisse. Tout d’abord pour les entrepreneurs politiques grecs, qui ne peuvent répudier activement la dette, par exemple en donnant un ordre impossible à la banque centrale grecque, d’acheter des titres publics en euros. Ou en donnant un ordre impossible aux autres banques, de se substituer à la banque centrale. Il y aurait là une rupture de contrat avec l’ensemble de la zone, et des risques majeurs d’essaimage. Cette forme de répudiation serait aussi une imposture puisque le pays en question fabriquerait une monnaie, l’euro, qui n’est plus la sienne.

    Une autre possibilité, serait le « sauve- qui- peut » des entrepreneurs politiques grecs renouant avec la Drachme. Là aussi, situation très difficile, car comment rembourser les dettes antérieures libellées en Euros ? Que deviennent les actifs internationaux incorporant de la dette souveraine grecque ? par exemple, que devient l’assurance vie d’un épargnant français dont le fonds obligataire support, est lourdement chargé en dette Grecque ? Là aussi, risque majeur d’essaimage à tout le moins gigantesque et hautement dangereux. Comme quoi, l’association du libéralisme financier et du constructivisme politique, est potentiellement un mélange détonnant.

    Quitter le navire, pour les entrepreneurs politiques grecs, n’est donc a priori pensable que sous la pression d’une crise sociale, devenue incontrôlable par les entreprises politiques traditionnelles. Perspective peu réjouissante. Un raisonnement semblable peut évidemment s’appliquer aux autres « petits un peu ronds ». C’est dire que les marchés politiques, ne vont pas facilement se retourner contre l’euro, et la cartellisation, même fissurée, risque de tenir. Et ce d’autant que l’extrême jeunesse de l’euro, ferait que ce serait les mêmes entrepreneurs qui au cours de leur carrière, auraient d’abord vendu sur les marchés politiques les vertus de la monnaie unique, pour- 15 années plus tard - en exposer les insurmontables inconvénients. Les entrepreneurs politiques peuvent-ils se décrédibiliser à ce point ? Vendre de l’équilibre budgétaire- au moins en tant que promesse- est peut-être aujourd’hui électoralement plus rentable.

    Cela signifie t-il pour autant que, si naguère, en résultante des abandons monétaires, les marchés politiques se sont assez spontanément dirigés vers la création d’une zone monétaire largement artificielle, ils vont à la faveur de la crise, poursuivre la construction européenne et arrimer la monnaie à un grand Etat européen ?

    Sur le papier des croyants du constructivisme, les choses sont simples : il n’y a plus de « grands minces » ni de « petits un peu ronds ». Il existe désormais un seul Etat, sans doute hétérogène, mais disposant d’une monnaie souveraine. Cet Etat serait donc monétairement armé selon la grande tradition des Etats. Peut-être même « Etat non édenté » pour reprendre une expression de l’article précité. Il n’y a plus de dettes souveraines au pluriel mais une dette souveraine au singulier. L’idée de haute couture peut enfin renaitre.

    Cela signifie que les passagers clandestins prennent conscience, qu’en temps de crise majeure, la clandestinité, désormais électoralement démonétisée, est moins avantageuse que les stratégies coopératives : Le navire euro ne peut plus être peuplé de passagers clandestins.

    La stratégie coopérative, est plutôt celle du modèle keynésien inflationniste, permettant d’extirper l’Europe du double étau des taux de change trop élevés, et des montagnes de dettes publiques produites par la gestion de la crise. Cela renvoie à un problème classique de théorie des jeux. Question dont la difficulté est lisible dans le très laborieux fonctionnement quotidien de l’Eurogroupe aujourd’hui.

    C’est que le modèle keynésien inflationniste au niveau d’un grand Etat suppose désormais une politique économique supranationale, avec en particulier des ressources budgétaires importantes, donc une fiscalité dénationalisée. Or l’arme fiscale et les dépenses correspondantes sont la combinaison productive qui assure l’existence des entreprises politiques nationales.

    Le couple monnaie unique/ grand Etat suppose donc d’énormes changements, qui se ramènent tous à la question de l’évaporation progressive des marchés politiques nationaux, au profit de la naissance de marchés politiques européens. Faire évoluer le navire peuplé de passagers clandestins, vers un navire peuplé de passagers en accord sur la direction et la gestion du gouvernail, dépend de la capacité à faire naitre des entreprises politiques nouvelles, marginalisant les vieilles entreprises politiques nationales. Les énormes coûts d’une implosion de l’euro pourraient faciliter cette perspective.

    Note de l’auteur : L’ambition du présent texte était dépourvue de connotations prédictives plus ou moins prétentieuses. Il s’agissait simplement de repérer le jeu complexe des forces qui dessinent le paysage de l’euro et ses trajectoires possibles.


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  • Restaurer la souveraineté monétaire
     
     par Jean Claude Werrebrouck
    26 février 2010

    Comment solder les différences de niveaux de prix intra européens, lorsqu’a disparu l’arme de la dévaluation ? La réponse classique consiste à prôner la déflation salariale - entendre blocage ou baisse des salaires, qui entrainerait une baisse relative de l’inflation et des coûts par rapport à la zone euro et permettrait de restaurer la compétitivité des économies du sud. En clair, plusieurs années d’éreintantes vaches maigres en perspective. L’économiste Jacques Delpla, reprenant une étude d’Olivier Blanchard, du FMI, propose une mise en œuvre à marche forcée de ce programme. Les Etats du sud, propose-t-il, devraient imposer une réduction coordonnée des salaires et des prix, de l’ordre de 10 à 30%. Jean Claude Werrebrouck s’inquiète des conséquences de cette mesure « abracadabrantesque », aux effets de bord imprévisibles, et qui de plus aurait pour conséquence remarquable d’être favorable aux rentiers. Face à la grande crise qui menace, le temps n’est plus aux bricolages, juge-t-il : il convient de « rétablir la souveraineté monétaire ».

    Par Jean Claude Werrebrouck, 25 février 2010

    L’économiste en chef du FMI, Olivier Blanchard, propose de sanctionner les « GIPEC » (Grèce, Irlande, Portugal, Espagne et Chypre), encombrants passagers clandestins du navire Euro. Puisqu’il est impossible de les « amincir » par des progrès rapides de productivité, leur permettant tout à la fois de rétablir l’équilibre extérieur, le plein emploi et l’équilibre des comptes publics, il faut en monnaie unique, passer par une dévaluation interne. Le schéma proposé est ambitieux. Puisque la monnaie unique interdit toute manipulation de la valeur externe de la monnaie, il est urgent de procéder à une révolution des prix internes. Concrètement il s’agit d’une déflation imposée et généralisée des prix, et si possible déflation coordonnée pour assurer l’homothétie du recul. Plus concrètement encore il est proposé une baisse générale, par exemple de 30%, de tous les prix, salaires, loyers, transferts sociaux, retraites, etc.

    Il s’agirait bien d’une dévaluation puisqu’il y aurait diminution du pouvoir d’achat international des résidents, en particulier celui les salariés. En même temps, la capacité exportatrice augmenterait en raison de la baisse du niveau général des coûts et des prix. Et, en principe, l’évolution positive du solde commercial serait porteuse d’un ré enclenchement dynamique de la demande globale, et donc porteuse d’emplois nouveaux. Jacques Delpla voit dans cette proposition, un keynésianisme d’un genre sans doute nouveau, marqué par le double sceau de l’acceptabilité politique (hypothèse d’homothétie dans la déflation et donc d’équité) et de l’efficience économique (ajustement plus rapide que les politiques traditionnelles de rigueur). Remarquant toutefois que le poids relatif du stock de dettes serait accru dans les mêmes proportions, il propose à enveloppe constante des budgets bruxellois, un redéploiement des fonds structurels et de la politique agricole commune vers les « GIPEC » soumis à la dévaluation interne. On peut imaginer que les dettes privées pourraient également bénéficier de ce redéploiement.

    Un tel projet laisse place à de lourdes interrogations. Tout d’abord il semble bien qu’il s’agit d’une déflation organisée. Cela signifie le rétablissement d’un contrôle des prix avec toutes les difficultés correspondantes. D’abord la mise en place d’une bureaucratie nouvelle chargée du contrôle et de la gestion des litiges. Mais aussi d’inextricables difficultés d’application : dans quelle mesure les prix des marchandises, dont le contenu en input importations est infiniment variable, doivent ils baisser au même rythme que les marchandises locales ? Faut-il établir des barèmes en fonction du contenu importation de marchandises pourtant produites localement ? Plus encore, faut-il prévoir une diminution des prix des crédits nouveaux, ce qui suppose le contrôle des banques et donc du taux de l’intérêt ? La baisse des salaires pourra t’elle être uniforme ? Et surtout peut-on sérieusement imposer une telle baisse, sans voire apparaitre de gigantesques comportements opportunistes, comme dans le cas des heures supplémentaires à la française dans le cadre de la loi « TEPA » ? La liste des questions n’est évidement pas exhaustive, et seule la mise en pratique peut faire apparaitre l’étendue des problèmes, notamment l’étendue imprévisible d’externalités elles mêmes imprévisibles. Levitt et Dubner (cf « Superfreakonomics ») et plus généralement les bons connaisseurs de la micro économie savent à quel point toute intervention développe des conséquences pour le moins inattendues.

    Mais au-delà, une question fondamentale se doit d’être évoquée. Si tous les prix diminuent, il est logique que la valeur du stock d’actifs financiers soit rognée dans les mêmes proportions. Pourquoi jacques Delpla semble soucieux de ne pas déflater la dette existante, et en contre partie mobiliser à ce titre les fonds européens devenant indisponibles par ailleurs ? Le coût d’opportunité d’un tel choix a-t-il fait l’objet d’évaluation ? Pourquoi faut-il ainsi « sacraliser » la dette existante ? Et la réponse consistant à dire qu’une bonne partie de la dette est détenue par des non résidents est insuffisante car l’autre partie est détenue par des résidents qui eux - mais pour quelle raison ?- ne seraient pas soumis à la même déflation. Pourquoi faudrait-il ainsi créer 2 catégories de résidents, les titulaires de la rente s’opposant à tous les autres ?

    Mieux, attendu que durant la période de déflation autoritaire, il faudrait continuer à assurer la gestion de la dette publique avec les moyens habituels des agences des Trésors, lesquels passent toujours par des adjudications, faut-il penser que les dites adjudications seraient « déflatées » comme les autres prix ? En clair les agences pourraient-elles imposer le prix de la dette souveraine nouvelle en imposant un taux ? Dans quel Traité de Sciences Economiques a-t-on pu lire qu’un acteur de marché - fusse t-il en situation de monopole - pouvait simultanément fixer et les quantités et les prix ?

    Les dérapages des économistes qui - très imprudemment - se déclarent libéraux sont saisissants : au nom de l’ajustement et donc du marché, certains sont prêts à restaurer un ordre, à tout le moins autoritaire, porteur de bien des déconvenues. Comme quoi il est difficile de sacraliser l’ordre spontané de Hayek en édifiant un ordre organisé. Comme quoi il est difficile de conserver le cercle si on le transforme en carré.

    Mais s’agit-il par la voie de l’autorité, de protéger des marchés libres, ou plutôt de protéger les ardeurs prédatrices de la rente ?

    Car enfin, il est une façon plus simple pour sortir de l’étau les « petits un peu ronds », et ce peut-être sans même renoncer à la monnaie unique : rétablir une souveraineté monétaire dont le blog La Crise des années 2010 se fait l’ardent défenseur.

    La rencontre européenne des marchés politiques nationaux a débouché sur le drame de la dénationalisation monétaire dans les années 80 et 90. Bien des mises en gardes furent étouffées dans le climat idéologique de ces années, climat porteur de sacralisation. Et la Raison - comme toujours et partout- s’est effacée devant le nouvel objet sacré. C’est que rien ne peut être entrepris contre le sacré. La violence de ce que certains commencent à appeler - à très juste titre - la « grande crise » met à nu - peut-être plus rapidement que prévu- les incohérences des choix nationaux et européens qui furent promulgués. Et les adeptes de la dénationalisation monétaire sont aujourd’hui terrorisés par l’énormité des conséquences résultant des décisions des années 90. Face à l’énormité des coûts associés au démantèlement de la zone euro ces mêmes adeptes poursuivent leur fuite en avant en imaginant des dévaluations internes abracadabrantesques. Et bien évidemment les entreprises politiques sont encore bien plus démunies devant l’épaisseur du brouillard.

    Sur le web :

    Les Echos : Keynes, Blanchard et les vaches sacrées, par Jacques Delpla

    La crise actuelle de la zone euro dans huit de ses pays offre deux solutions. Le retour aux déflations dures des années 1930. Ou bien de l’innovation keynésienne et européenne : baisses et gels immédiats et coordonnés de tous les prix et salaires, avec aide européenne massive.


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  • ¿Se repite la historia?



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  • Finkythérapie : le film qu'il te faut
     
    Tu te relâches un peu ? Tu as la mémoire qui flanche? Tu trouves que l'on parle trop de la shoa ? tu as tendance à ne plus te culpabiliser? Alors tu dois faire une bonne séance de finkythérapie.Va voir ce film... Si au bout de 10 minutes, tu n'as pas versé une larme, regarde à nouveau les résultats que tu peux obtenir ici FINKYTHERAPIE ....courage !!! En toute circonstance,reste FINKY
     
     

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  • A Séoul, un train électrique sans rail ni caténaire


    Par Jean-Luc Goudet, Futura-Sciences <script type="text/javascript"> var addthis_pub="futurasci"; var addthis_language = "fr"; var addthis_header_color = "#ffffff"; var addthis_header_background = "#000000"; var addthis_options = 'facebook, email, twitter, favorites, digg, delicious, myspace, google, live, technorati, linkedin, more'; var addthis_localize = { email_caption: "Email", more: "autres...", email: "Email"}; </script><script type="text/javascript" src="http://s7.addthis.com/js/200/addthis_widget.js"></script>

    Il tire son énergie d'une ligne électrique enterrée sous la route mais il embarque aussi quelques batteries, qui lui confèrent une certaine autonomie. Ce curieux train, qui vient d'être inauguré dans la capitale de la Corée du Sud, représenterait-il un compromis astucieux pour des transports en commun urbains ? Oui, expliquent ses concepteurs, qui l'envisagent aussi pour les voitures particulières.

    Avec sa caricature de locomotive couleur vert pomme tirant trois voitures ouvertes, son allure est celle de ces trains destinés à promener les touristes... Et c'est d'ailleurs la fonction de ce prototype qui vient d'être inauguré, ce 9 mars 2010, au sein du parc d'attraction de Gwacheon, dans la banlieue sud de Séoul. Mais cet engin, élaboré par le Korea Advanced Institute of Technology (KAIST), est bien plus qu'un manège.

    C'est la démonstration d'un transport en commun original, baptisé Olev, pour On Line Electric Vehicle, soit véhicule électrique en ligne. « En ligne » parce qu'il n'est pas autonome, comme le serait un bus électrique, et recueille son électricité d'un câble conducteur. Bref, c'est un train électrique, ou plutôt un tramway, comme tant de villes dans le monde cherchent à se doter, même Tenerife, qui s'adosse sur un volcan lui imposant des pentes jusqu'à 8,5%.

    Mais les roues de l'Olev sont des pneus et les disgracieux caténaires aériens ont disparu, comme dans certains réseaux de tramways récents. A Bordeaux, les matériels d'Alstom sont alimentés, du moins en centre ville, par un rail supplémentaire. On parle d'APS (Alimentation par le sol). L'Olev coréen, lui, s'alimente sans contact grâce à des câbles enterrés sous la chaussée, à environ trente centimètres de profondeur. Les Bordelais, qui ont vécu durant de longs mois les déboires de ce système novateur, comprendront facilement l'intérêt de protéger les câbles d'alimentation installés dans la chaussée.

    Charger les batteries en roulant, une idée pour les bus, les trams et les voitures

    En plus des 30 centimètres de revêtement, le système à induction doit traverser les 13 centimètres de garde séparant du sol le dispositif de réception du courant installé sous la motrice. La perte entre émission et réception serait de 26%, selon le KAIST.

    L'autre originalité est que cette alimentation externe n'est pas disponible sur tout le trajet. A Gwacheon, la ligne inaugurée s'étend sur 2,2 kilomètres mais le train n'est alimenté que sur quatre tronçons, trois de 122,5 mètres et un de 5 mètres, soit, au total, 372,5 mètres, c'est-à-dire seulement 16% du parcours.

    Entre deux zones alimentées, et notamment aux stations, l'Olev charge ses batteries, ce qui lui permet de rouler sur une chaussée normale. Le train devient ainsi autonome par endroits. Pour les transports en commun, les avantages sont intéressants. Par rapport à un tramway classique, les travaux d'infrastructure sont considérablement allégés tandis que l'on gagne en souplesse. Il sera ainsi plus facile d'allonger ou de dévier une ligne existante. Des bus électriques pourraient ainsi desservir n'importe quel quartier d'une ville. « Dans un système de transport urbain par bus, il suffirait de tronçons d'alimentation sur 20% seulement du trajet », estime le KAIST.

    Selon les concepteurs, on peut imaginer que le système fournisse de l'électricité à des voitures électriques particulières, ce qui éviterait de les recharger à l'arrêt. L'idée de recharger des véhicules électriques en roulant n'est d'ailleurs pas nouvelle. « Deux centrales nucléaires, ou leurs équivalents, suffiraient alors pour faire rouler indéfiniment toutes les voitures de la Corée du Sud » a-t-on expliqué lors de la conférence de presse, rapporte TimesOnLine.


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  • En Europe, la rigueur mènera à la déflation

    Les économies considérées comme étant "solides" de l’Union Européenne sont tout à la fois dépendantes et corrélées aux économies actuellement en période de tourmentes. En fait, c’est les flux financiers, générant les déséquilibres des balances des paiements, qui sont le trait d’union entre ces diverses économies rendant ainsi indispensable la résolution de toutes les problématiques auxquelles sont confrontées chacune de ces nations Européennes et impensables la cherche de règlement à l’interne de ses propres problèmes sans se préoccuper du voisin, fût-il aussi loin que l’Espagne et ce vu depuis l’Allemagne !

    L’Espagne est ainsi à l’Allemagne ce que Etats-Unis sont à la Chine en cela qu’elle entretient des déficits massifs contrebalancés par des excédents Allemands (ou chinois dans le cas des Etats-Unis) leur étant directement proportionnels. Dans une telle configuration, il va de soi que l’Allemagne et l’Espagne ne sauraient bénéficier toutes deux et en même temps d’excédents de leur balance des paiements car, un excédent étant systématiquement financé par un déficit, les conséquences à l’échelle Européenne étant qu’un (ou des ) pays tiers devront en être réduit à assumer ces excédents Allemands et Espagnols. Les comptes excédentaires Allemands ont donc été, sont et seront toujours compensés par des déficits Espagnols et Portugais et Irlandais et Grecs... car toute transaction financière implique (au moins) deux contreparties.

    Comment comprendre alors les injonctions Allemandes selon lesquelles certains pays doivent impérativement résorber leurs déficits fiscaux alors qu’une telle amélioration ne se réaliserait qu’à ses propres dépens via une réduction de ses excédents nationaux ? La seule autre possibilité pour l’Allemagne de continuer à entretenir des excédents étant qu’elle puise dans l’épargne privée de ses citoyens !

    Si l’Espagne, qui subit un déficit budgétaire énorme du fait d’un volume d’importations qui dépasse celui de ses exportations, décidait ainsi d’adopter des mesures d’austérité (afin de soigner ses déficits), elle devra fatalement puiser dans sa propre épargne privée avec, à la clé, une diminution de son P.I.B., donc de ses importations, avec des implications directes sur les exportations Allemandes. En somme, la conjoncture actuelle dominée par une politique de réduction généralisée des déficits, Irlandais, Espagnols, Grecs mais aussi Allemands, sera ainsi d’autant plus marquée par un retour de la déflation que les mesures d’austérité Espagnoles, ayant donc un impact sur l’Allemagne, précipiteront chez cette dernière des réductions généralisées de ses propres dépenses Gouvernementales !

    La rigueur Espagnole et Grecque et Irlandaise semble donc aujourd’hui la voie royale pour un cauchemar déflationniste Européen ... à moins que l’Allemagne ne réussisse enfin à convaincre sa population de dépenser plus !

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  • La descente aux enfers des Etats-nations !

    Dette des Etats-nations
    La dette

    Les 92% de dettes (en pourcentage du PIB) pour la France en 2012 sont confirmés par le FMI (graphique ci-dessus) et 99 % sont prévus en 2011 ce que j’ai annoncé il y a 2 ans.
    Vous remarquerez que le Japon bat tous les records avec 197% de dette, 130% pour la Grèce et l’Italie dont personne ne parle.

    L’Irlande explosera sa dette en 2011 avec +12%.
    L’Espagne est en comparaison "peu endettée" avec 68% en 2010. Les 74% prévus me semblent sous évalués avec un dépassement que j’évalue pour ma part à plus de 80%.

    Source : BRI http://www.bis.org/publ/othp09.pdf page 4.

    Les produits dérivés

    Les produits dérivés continuent leurs décrues (sauf aux USA).
    Ils avaient atteint la somme faramineuse de 690 000 milliards de dollars au début de l’année 2008 et ne représentent plus que 444 000 milliards de dollars (8 fois le PIB mondial) au quatrième trimestre 2009 d’après la dernier rapport trimestriel BRI de mars 2010.

    On le voit ici, il existe un découplage entre les activités sur les produits dérivés aux USA et dans le reste du monde.
    Pour rappel, le 30 juin 2008 , l’OCC (Comptroller of the Currency, l’autorité gouvernementale de tutelle des banques) déclarait que les USA possédaient 182 100 milliards de dollars de produits dérivés (des métastases), or, il y a quelques mois, le dernier rapport faisait état de 200 000 milliards de dollars (contrôlés par 5 banques).

    La finance US a donc créé 20 000 milliards de dollars de produits dérivés en 1 an, soit 1,5 fois le PIB des USA alors que le reste du monde a pris conscience du danger qu’ils représentent.
    Plus inquiétant encore, les USA détiennent désormais près de la moitié de ces produits financiers qui sont au coeur du risque systémique.

    Vous comprenez mieux pourquoi Tim Geithner, le ministre américain des Finances (secrétaire au trésor), a vivement critiqué le plan que va présenter la Commission européenne de régulation des produits dérivés et notament des CDS afin de prévenir les effets « systémiques » de ces produits financiers dont la banque Golman Sach (un cheval de Troie) s’est servie afin d’affaiblir l’Europe au profit des USA. Affaiblir l’euro renforce en effet le dollar, une monnaie en sursis.

    En ce qui concerne l’euro, ne vous inquiétez pas, une solution est en cours (les explications bientôt).

    Sources : OCC page 12 http://www.occ.gov/ftp/release/2009....
    BRI rapport trimestriel page 11, http://www.bis.org/publ/qtrpdf/r_qt...
     

     Gilles Bonafi


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  • Israël : La paix dans la guerre

    Des chiffres de la dernière offensive. Des chiffres de la colonisation. Des chiffres qui n’annoncent pas de paix. Des chiffres qui n’offensent pas la communauté internationale. Des chiffres sombres. 

    C’est avec beaucoup de surprise et de colère que Joe Biden a condamné l’annonce d’Israël de construire 1600 nouveaux logements à Jérusalem-Est alors que l’Autorité palestinienne venait tout juste d’accepter la reprise des pourparlers.
     

    Cette décision, qui vise à contenter les juifs ultra-orthodoxes, est lourde de sens puisqu’elle a lieu sur le territoire revendiqué par les palestiniens comme leur future capitale. Elle intervient aussi après que :

    •    Beyamin Nétanyahou, Premier ministre israélien, a permis la poursuite de la colonisation de Jérusalem-Est malgré un moratoire décrété sur les constructions en Cisjordanie.
    •    L’Etat hébreu a annoncé la mise en chantier de 112 logements dans une autre colonie de Cisjordanie.
    •    Israël a fait savoir, en novembre, qu’il allait construire 900 logements dans le quartier de Gilo au lendemain de la condamnation américaine de la colonisation.

    Le quotidien Haaretz annonce aujourd’hui que ce sont en fait quelque 50 000 nouveaux logements pour la population juive qui sont en phase d’approbation, se situant pourtant sur la partie palestinienne.

    Avec cette poursuite acharnée de constructions illégales, on voit mal comment Israël pourrait convaincre de sa volonté de faire la paix.

    Le parti travailliste israélien envisage d’ailleurs de quitter la coalition du Premier ministre qui est selon eux un frein à la relance du processus de paix avec les palestiniens. Le ministre travailliste de l’agriculture a même ajouté que « la colère de Biden est justifiée, une grave erreur a été commise (par Israël) et il y a un prix à payer ».

    Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon et le chef de la diplomatie européenne ont également condamné la reprise de ces constructions.

    D’ailleurs Politis n’a pas oublié de rappeler quelques chiffres qui en disent long sur la politique d’Israël et le laxisme inouï de la communauté internationale :

    A Gaza

    •  Du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009 en 22 jours, quelque 1400 Palestiniens ont été tués, dont environ 300 enfants et des centaines de civils non armés, parmi lesquels plus de 115 femmes et 85 hommes de plus de 50 ans.
    • Des délégués d’Amnesty International ont enquêté à Gaza sur plusieurs attaques et conclu que la destruction s’était la plupart du temps avérée gratuite, délibérée et non justifiée par une « nécessité militaire ».
    • Des civils blessés sont morts simplement parce que les forces israéliennes ont fréquemment refusé de laisser passer des ambulances ou des équipes médicales.
    • Tout au long de l’opération « Plomb durci », les frontières de Gaza sont restées fermées, empêchant civils de fuir.

    Dans le Sud d’Israël

    •  Les tirs de roquettes palestiniennes ont tué trois civils israéliens, en ont blessé 4 grièvement, 11 modérément et 167 légèrement
    •  6 soldats israéliens ont été tués lors des attaques de groupes armés. palestiniens.
    •  4 soldats israéliens ont été tués par des « tirs amis » de militaires israéliens.
    •  Les groupes armés palestiniens ont tiré plusieurs centaines de roquettes en direction du sud d’Israël (571 selon Israël).
    •  Des milliers de familles ont fui vers d’autres régions du pays.

    Source : Amnesty International Belgique


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  • La faillite grecque : leurre, levier ou laboratoire ?

    Il faut le dire, même si c’est un peu gênant à l’égard de notre (nos ?) éventuel(s) lecteur(s) grec(s) francophone(s) : en Grèce, il ne se passe pas grand-chose. Que l’Etat grec soit au bord de la cessation de paiement est très ennuyeux pour les Grecs, voilà une chose qu’on ne peut nier. Que cela soit réellement gênant pour l’Union Européenne, a fortiori pour l’économie mondiale, voilà qui, en revanche, est tout à fait faux.

    Rappelons les ordres de grandeur, histoire de remettre les pendules à l’heure.

    Le PIB de la Grèce avoisine 340 milliards de dollars, soit 2,3 % du PIB de l’Union Européenne et 3 % de celui de l’Euroland (petit joueur). Le pays présente la particularité déroutante d’importer 3 fois plus qu’il n’exporte (60 milliards de dollars contre 20 milliards), et de dépendre, pour financer ce trou béant, d’un énorme secteur touristique (15 % du PIB). La corruption est endémique (généralisée serait plus juste), l’économie informelle (terme pudique pour « marché noir ») franchement surdimensionnée (omniprésente si on préfère). Avec une dette extérieure totale estimée à 550 milliards de dollars (160 % du PIB) et une dette publique de l’ordre de 300 milliards d’euros (chiffre du gouvernement grec), ou plutôt 400 milliards d’euros (120 % du PIB, calcul aimablement fourni par les experts de la banque allemande Commerzbank), la Grèce est techniquement en faillite (un pays structurellement déficitaire, à faible croissance et dont la dette publique, en grande partie extérieure, dépasse le PIB, est un pays en faillite – là-dessus, pas de contestation possible). Soit dit en passant, pour ceux qui s’étonneraient que le gouvernement grec se soit « trompé » à hauteur de 30 % du PIB national concernant la dette publique (c’est pas chez nous qu’on verrait ça !), précisons que « l’erreur » a été facilitée par l’ingénierie financière fournie (moyennant commissions, cela va sans dire) par les petits génies de Goldman Sachs, au moment où la Grèce peinait à entrer dans la zone euro.

    Faillite, donc, et faillite frauduleuse, en prime.

    Comme je vous le disais, pour les Grecs, c’est très ennuyeux.

    MAIS pour le reste de la planète, eu égard à la situation d’ensemble, c’est une broutille.

    Là encore, histoire que les pendules marquent toutes l’heure exacte, rappelons quelques péripéties récentes dans le Grand Feuilleton Passionnant de la Faillite Globale (GFPFG) :

    - Interrogé récemment au Congrès sur la question de savoir s’il voulait bien fournir quelques indications au sujet de ce que la FED avait fait de la modique somme de 8 700 milliards de dollars (rachat de titres plus ou moins pourris, en partie revendus, en partie toujours en stock, par la FED, pour sauver les grandes banques de Wall St.), le big boss de cette vénérable institution (soyons poli), monsieur Bernanke (meilleur comique de sa génération), a répondu, avec son urbanité et sa concision coutumières : « No » (point). Pour apprécier le propos comme il se doit, signalons que la somme en cause représente à peu près 16 fois la dette publique grecque totale telle que recalculée par les Teutons. Franchement, mister Bernanke, pour ce prix-là, vous auriez pu arrondir à 9 000 milliards et filer un pourboire aux Grecs, non ?

    • Dans le cadre de sa géniale démarche visant à résoudre la quadrature du cercle financier par la magie de la « swift action on economy », le Président américain des USA appointé par Wall Street pour achever les USA, monsieur Obanania Obama, a récemment démontré une capacité très relative à redresser les comptes publics de la première (?) puissance mondiale. Aux dernières nouvelles, le déficit public des USA devrait avoisiner 1 900 milliards de dollars (presque 6 fois le PIB de la Grèce), et la dette publique US, rapportée au PIB américain (lui-même calculé comme on sait, c’est-à-dire n’importe comment) pointera probablement vers 2012 au niveau actuel de la dette grecque rapportée au PIB de la Grèce (lui-même dépendant en partie du pouvoir d’achat des touristes américains). Je ne veux pas dire par là que les Grecs ne sont pas dans la m… Je veux dire que leur m… est minuscule par rapport à d’autres.
    • Dans ces conditions, il est assez comique de lire, dans la presse anglo-saxonne, une vertueuse condamnation de l’économie grecque financée par la dette alors que sa balance commerciale est ultra-déficitaire. D’autant plus comique, d’ailleurs, que la Grande-Bretagne (très sourcilleuse en ce moment s’agissant de la vertu des finances publiques dans la zone euro) est, on le remarquera au passage, en train de rattraper la Grèce à une vitesse impressionnante. Avec une croissance négative de l’ordre de 5 % en 2009, une dette publique avoisinant 70 % du PIB (+ 18 % en un an, à ce rythme-là, la Grèce n’a qu’à bien se tenir), un déficit commercial de 120 milliards de dollars (6 % du PIB, et encore, les importations s’effondrent) et un endettement des ménages faramineux (140 % du revenu disponible), la Grande-Bretagne est à peu près autant en faillite que la Grèce – pour l’instant, ça ne se voit pas parce que la City continue à prêter au pays qui l’héberge, mais ça ne durera pas, la City elle-même devant pour finir faire faillite (c’est ce qui arrive quand on prête à des gens qui ne peuvent pas rembourse.
    • Enfin, cerise sur le gâteau, signalons que la vertueuse (tout est relatif) Allemagne ferait bien, plutôt que d’embêter les Grecs (les pauvres), de s’occuper de ses oignons. Par exemple, pour aider à soulager les petits Grecs, Berlin pourrait s’intéresser de près, disons, aux petites combines de la Deutsch Bank. La Deutsch Bank a joué un rôle clef dans la faillite de sa partenaire IKB, en 2007. Où l’on découvrirait que cette faillite fut due à l’implosion d’une filiale spéculative basée en Irlande, avec à la clef une impasse de 13 milliards d’euros (pour la petite histoire, il semble que cette addition faramineuse ait été cumulée par une société au capital de 500 euros – en matière de ratio dettes/capitaux propres, un record du monde). Où l’on s’apercevrait encore que c’est la Deutsch Bank qui a entraîné IKB dans cette aventure, avant de la laisser tomber comme une vieille chaussette. Où l’on réaliserait par là-dessus (le monde est bien fait) que la Deutsch Bank est, pour l’essentiel, un faux nez de Wall St. On suggère donc aux autorités de Berlin de dire aux anciens de l’aventure IKB de demander à la Deutsch Bank d’exiger de ses partenaires à NY qu’ils filent les 13 milliards aux Grecs pour qu’ils remboursent ce qu’ils doivent aux Allemands. Déjà, ce serait un début. Si on fait la même chose avec tout le fric que la haute finance d’Outre-Rhin, consanguine à celle d’Outre-Atlantique, a pompé dans les bas de laine teutons et autres, on trouvera sans problème de quoi sauver la Grèce.

    Tout ceci pour dire que décidément, à l’échelle du GFPFG, la Grèce, c’est roupie de sansonnet.

    Ici, une question se pose : étant donné que c’est tout le système financier international qui est en train d’imploser dans la joie et la bonne humeur, pourquoi la focalisation médiatique sur le micro-problème posé par l’ultra-fantaisiste mais très modeste finance athénienne ?

    A cette question, il y a trois réponses.

    UN. Parce que la Grande-Bretagne et les USA sont entrés dans une année électorale, et que, dans ces conditions, la presse aux ordres de ces pays ruinés a besoin de donner l’illusion aux populations que certes, chez eux, ça va mal, mais ailleurs, c’est pire. Explication sans doute en partie valable (surtout en Grande-Bretagne, cette petite île en train de couler qui continue à croire qu’elle est le centre du monde). Mais insuffisante. Il y a d’autres raisons, plus sérieuses.

    DEUX. Parce que s’il y a des liquidités en abondance (et pour cause, ça fait deux ans que les banques centrales en répandent à tout va), même cette énorme masse de liquidités ne peut pas saturer l’incroyable trou noir de la dette globale. Pour dire les choses en gros, il y a dans le monde occidental au moins une fois et demi la quantité de liquidités nécessaire pour faire tourner la machine économique, mais sans doute à peine la moitié de la quantité qu’il va falloir injecter pour rembourser (en monnaie de singe) les dettes accumulées par trois décennies de laxisme monétaire (et encore, ça, c’est sans compter les produits dérivés – si on compte les dérivés, enfin non, mieux vaut ne pas compter…). Dans ces conditions, la chasse au capital est ouverte. Tous les moyens vont être bons pour en ramener chez soi, et plus particulièrement à Londres et New York. D’où la gourmandise des médias anglo-saxons pour tout ce qui peut pousser le capital à s’éloigner de l’Euroland. D’où l’intérêt, pour ces médias, de zoomer sur la crise grecque, annonciatrice d’une (possible) explosion de l’eurozone (1). Ça permet un redressement momentané du dollar (mais pas de la Livre Sterling, le cas est désespéré). (2)

    TROIS. Parce que la Grèce est, peut-être, un laboratoire. Si l’on admet l’hypothèse un tantinet paranoïde que j’ai longuement développée dans mon livre « Crise ou coup d’Etat ? » (en vente sur ce site, pub), à savoir que l’intelligence émergente des marchés financiers a, de manière plus ou moins planifiée, plus ou moins spontanée, pris appui sur le krach pour déclencher un coup d’Etat global invisible, alors l’issue de la dépression, dans l’esprit des dirigeants, doit être l’écrasement des peuples. Sous cet angle, la dynamique grecque (mise en faillite, plan de rigueur, troubles sociaux, durcissement sécuritaire) est un cas d’école. Et ce que l’on incube là-bas, c’est l’ingénierie sociale qui permettra, le moment venu (et il viendra) de manger tout l’Occident à la sauce grecque. Ceci expliquerait que l’Allemagne, une fois de plus, endosse l’uniforme du flic européen sans trop rechigner (« Tu parles comme les méchants dans les films de guerre, alors tu vas faire le méchant » - « Jawohl, Onkel Sam ! »). En ce sens, le zoom sur la Grèce serait, pour les médias, un moyen de préparer psychologiquement les populations (espagnoles, italiennes, anglaises, américaines, françaises, allemandes – dans cet ordre ou à peu près) à ce qui va bientôt leur arriver. Sur le thème : regardez, on l’a fait aux Grecs, ils ont gueulé, on leur a fait quand même, c’est comme ça et puis c’est tout.

    Trois explications qui, au demeurant, peuvent très bien être vraies toutes les trois.

    ( 1 ) Le différentiel de taux entre les bons du trésor grecs et allemands se tendant jusqu’au point où, pour se financer, l’Etat grec n’aurait plus d’autres solutions que de sortir de l’euro.

    ( 2 ) Soit dit en passant, le calcul des anglo-saxons est facilité par une paradoxale convergence d’intérêt avec les poids lourds européens. Les premiers ont besoin de capital, les seconds trouvent très bien que l’euro baisse un peu, c’est mieux pour les exportations. Ironie de l’histoire et complexité des stratégies croisées.


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